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témoignage

  • À nous deux Paris

    jean-paul nishi,jp nishi,manga,bd,bande dessinée,paris,témoignage,japonaisCe manga savoureux est un ensemble de tranches de vie.

    L'auteur, Jean-Paul Nishi, mangaka japonais, rejoint Paris afin de se perfectionner - c'est d'ailleurs l'occasion de découvrir la situation envieuse de la bande dessinée française par rapport à ce qui se passe au Japon.

    JP Nishi décrit avec humour, et sans nous égratigner, nos us et coutumes : le stress de la vie parisienne, la mauvaise humeur légendaire des Français, les contrôles de police, la drague ou... la curieuse coutume des bisous !

    Un manga qui se lit et se relit avec plaisir et qui est aussi le coup de cœur d'un Japonais pour la France. A l'image de la passion réciproque, nous dit-il, que les Français portent pour le Japon.

    Jean-Paul Nishi, À nous deux, Paris !, éd. Philippe Picquier, 191 p.
    http://confrerie2010.canalblog.com/archives/2013/01/13/26131268.html

    https://www.editions-picquier.com/produit/a-nous-deux-paris
    https://www.facebook.com/profile.php?id=100003881948183

    Voir aussi : "Ward Ier-IIe siècle"

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  • Le fils de l’homme invisible

    francois berleand,témoignage,cinéma,enfance,confrerieRésumer ce livre comme une simple autobiographie d'un des meilleurs acteurs français actuels serait injuste : d'abord parce que cet ouvrage retrace en fait l'enfance et l'adolescence de François Berléand sans qu'elle ne nous éclaire sur la carrière de cet artiste ; ensuite parce que Le Fils de l'Homme invisible est diablement bien écrit (impossible de décrocher de ce livre une fois qu'on l'a commencé) ; enfin parce que savoir que l'auteur de ce récit est un acteur célèbre ou un parfait inconnu n'a pas beaucoup d'intérêt !

    L'histoire racontée par François Berléand - son histoire, donc - est proprement hallucinante : l'auteur commence son récit par le souvenir de propos ironiques de ses parents à son sujet : "Toi, de toute façon, tu es le fils de l'Homme invisible !" Et voilà que ce petit garçon candide et surtout très imaginatif se met à croire vraiment à cette histoire de "super pouvoir". Cela va le mener jusqu'aux bords de la folie...

    Un livre passionnant, émouvant et avec des passages très drôle (notamment cette scène à la bibliothèque). Une autobiographie inoubliable. 

    François Berléand, Le Fils de l’Homme invisible, éd. Stock, Paris, 2006, 209 p.
    http://confrerie2010.canalblog.com/archives/2010/02/16/16938912.html
    https://www.editions-stock.fr

    Voir aussi : "Le jeu de l’ange"

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  • L'un dans l’autre, l’un contre l’autre 

    Galaad est, quelque part, le "héros" du dernier livre d’Adeline Baldacchino, Une Joie sauvage et douce (éd. Michalon). L’auteure a voulu "raconter en temps presque réel" sa grossesse, jusqu’à la naissance de son fils – Galaad, donc. La deuxième partie du livre est celle d’une jeune maman découvrant et vivant les premiers mois de jeune maman.  

    Voilà un ouvrage à la fois touchant et d’une superbe écriture qui ne se veut "ni roman, ni essai ; ni poème, ni démonstration".

    On ne trouvera pas dans Une Joie sauvage et douce de considérations médicales, pas plus que l’auteure ne tombe dans feel good ou le pensum pédagogique. Il y est d’abord question de la construction d’une femme devenant mère, et dont les liens intimes avec son bébé ("L’un dans l’autre") deviennent une véritable aventure humaine.

    Une langue qui de déploie dans une belle poésie

    De l’annonce ("La théorie de l’émerveil") à l’accouchement, en passant par les manifestations physiques du fœtus, le constat de la fin de l’insouciance et l’attente, Adeline Baldacchino nous parle d’identité, de la construction de soi, de l’identité, des liens familiaux ("Il y a dans toute jeune mère la nostalgie de sa propre mère") mais aussi de l’être en train de grandir, à qui Adeline Baldacchino consacre ses plus belles pages.

    Les premiers mois de la maternité constituent plus de la moitié du livre. Galaad vient de naître et, avec son arrivée, la jeune mère découvre cet être qui était quelques temps plus tôt dans son ventre. Elle nous parle de ses moments, aussi uniques que sa grossesse : l’émerveillement du jeune enfant, le regard de mère à fils, les exigences de la vie quotidienne, la peur d’une maman pour son enfant ou la découverte du monde et de son corps par le nourrisson.

    Adeline Baldacchino parle de tout cela dans une langue qui de déploie dans une belle poésie, à l’instar de ce passage : "J’aspire férocement à cette douceur. Les cheveux de maman sont des algues à la surface de la mer où nous plongeons en rêve."

    Adeline Baldacchino, Une Joie sauvage et douce, éd. Michalon, 2023, 192 p. 
    https://www.michalon.fr
    https://www.facebook.com/adeline.baldacchino

    Voir aussi : "Cherchez la femme"

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  • Aujourd'hui, maman est morte

    L’écrivain Youcef Zirem est une figure importante de la littérature contemporaine algérienne. Il est aussi un opposant au pouvoir en place qui l’a contraint à l’exil, en l’occurrence en France. Journaliste, chroniqueur, écrivain, il anime aussi depuis 2017 le café littéraire l'Impondérable, à Paris.

    Intellectuel, dissident (Algérie, La Guerre des Ombres, éd. Complexe), engagé et humaniste, Youcef Zirem revient en ce début d’année avec un ouvrage des plus personnels, Lâaldja, notre Mère, aux éditons Fauves. Il y parle de sa mère décédée à l’Hôpital de Sidi-Aich, en septembre 2022. Son exil politique l’a souvent éloigné d’elle, au point qu’il n’a pas pu l’accompagner pour ses derniers jours.  

    Un livre très personnel donc, qui est aussi un hommage à une femme simple, discrète et à l’influence considérable sur sa vie. Sur 180 pages, l’auteur égraine ses souvenirs familiaux.

    Une femme simple, discrète

    Comment ne pas aimer cette femme, Lâaldja, dont parle Youcef Zirem, avec nostalgie, tendresse et reconnaissance ? Disons que ce livre peut s’apparenter à une longue lettre pour celle qui lui a donné sa vie.

    Écrit peu de temps après son décès, ce témoignage respire la sincérité. Une trame chronologique suit le destin d’une femme de Kabylie, ayant vécu dans un village modeste, riche d’une culture et d’une civilisation que l’écrivain algérien ne cesse de louer ("Nos champs avaient des noms qui faisaient rêver ceux qui comprennent la langue la plus ancienne d’Afrique du Nord, le tamazight, la langue du roi Massinissa, du roi guerrier Jugurtha, de la reine Dilhya, des écrivains Mouloud Feraoun, Mouloud Mannezri, Tahar Djaout, des parents de Zidane, le footballeur").

    Youcef Zirem inclut à l’intérieur de son livre des poèmes en hommage à Lâaldja. Parler d’elle, louer son souvenir pour qu’elle ne soit jamais oublier, est aussi l’occasion, de parler de sa famille, et en particulier de ses cinq frères et de ses deux sœurs.

    Lâaldja, notre Mère est à lire comme l’un des plus beaux et des plus émouvants portraits de femme, généreuse, courageuse, fière et d’une belle humanité. À sa mort, l’un des plus beaux commentaires est sans doute celui du journaliste et poète Djaffar Benmesbah : "Elle a donné au monde un fragment de littérature et, ainsi, elle enrichit l’humanité".

    Youcef Zirem, Lâaldja, notre Mère, éd Fauves, 2023, 180 p.
    https://www.armitiere.com/livre/22298465-laaldja-notre-mere-youcef-zirem-fauves-editions
    https://www.fauves-editions.fr/livre-laaldja_notre_mere_youcef_zirem-9791030204605-76143.html

    Voir aussi : "Si la vie ne tient à rien"

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  • Top 10 de Bla Bla Blog en 2022

    C’est l’heure du grand bilan pour 2022. Quels sont les chroniques qui ont été les plus buzzé cette année. Musiques, expos, livres, BD : il y en a pour tous les goûts cette année.

    Avec de jolies surprises à la clé. 

    10 "Elise Bertrand, ultra moderne romantique"

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    Extrait : "Les Lettera Amorosa, qui donnent son nom au premier album d’Elise Bertrand, marquent la découverte d’une nouvelle venue dans la musique contemporaine. La maison de disques Klarthe Records a eu la bonne idée de sortir les premières œuvres de la jeune compositrice et violoniste, et en premier lieu cet opus 10 que sont le quatuor avec flûte "Lettera amorosa". Elise Bertrand a mis en musique le recueil éponyme de René Char, que l’écrivain présentait ainsi dans son épigraphe : "Amants qui n’êtes qu’à vous-mêmes, aux rues, aux bois et à la poésie ; couple aux prises avec tout le risque, dans l’absence, dans le retour, mais aussi dans le temps brutal ; dans ce poème il n’est question que de vous…" LA SUITE ICI...


    9 "Gâtinais gratiné"

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    Extrait : "Dans la grande famille des cabarets, Bla Bla Blog ne pouvait pas ne pas parler du Diamant Bleu, un lieu de fête sexy qui a ouvert ses portes il y a déjà vingt ans en plein cœur du Gâtinais, à Barville-en-Gâtinais. C'est le cabaret du Loiret par excellence, à une heure de Paris et quelques kilomètres de Montargis et qui n’entend pas se laisser impressionner par les Moulin Rouge, Crazy Horse et autres Paradis Latin. Non sans raison, Le Diamant Bleu peut se targuer de porter l’étiquette de "plus grand cabaret de Province"…" LA SUITE ICI...


    8 "Choses vues"

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    Extrait : "Derrière "Les choses", l’énigmatique titre de la dernière exposition au Louvre qui se tient jusqu’au 23 janvier prochain, se cache une aventure de plusieurs milliers d’années au cœur de la représentation des objets. Grâce à 170 œuvres prêtées par plus de 70 institutions et musées, la vénérable institution propose de revenir sur la question de la représentation des choses, depuis les stèles funéraires de l’Égypte ancienne jusqu’à l’intelligence artificielle, en passant par les objets religieux médiévaux, les peintures classiques de Chardin, ou les installations et ready-made du XXe siècle. Le parcours muséographique fait l’objet de 15 séquences chronologiques passionnantes…" LA SUITE ICI...


    7 "Les étrusques débarquent à Nîmes"

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    Extrait : "Du 15 avril au 23 octobre 2022, le Musée de la Romanité  de Nîmes met à l’honneur une civilisation antique méconnue et pourtant l’une des plus fascinantes et raffinées de la Méditerranée : les Étrusques. L’histoire de ce peuple d’habiles navigateurs et d’artisans raffinés se développe à partir du IXe s. av. J.-C., connaît son apogée entre le VIIe et le Ve siècle, et finit par tomber progressivement sous la domination débordante de Rome, entre le IVe et le Ier s. av. J.-C…" LA SUITE ICI...

     

    6 "Les tribulations d’un Allemand en France"

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    Extrait : "Ces chroniques d’un Allemand en France, Douce Frankreich de Frank Gröninger (éd. AlterPublishing), sont un hommage appuyé autant qu’un récit amoureux pour un pays – la France – à la fois attirant, fascinant, mais qui est aussi mal compris, sinon mal aimé. Qui peut le mieux en parler que précisément un étranger, qui a aujourd’hui la double nationalité ? L’auteur, Frank Gröninger, cite à ce sujet cette phrase de Kurt Tucholsky : "Un Allemand, il faut le comprendre pour l’aimer ; un Français il faut l’aimer pour le comprendre…" LA SUITE ICI...

     

    5 "Fantasmer et faire l’amour"

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    Extrait : "Les films à sketchs, un genre à part et considéré avec méfiance, peut vite tomber dans le piège de sketchs de qualités variables. Les fantasmes de Stéphane et David Foenkinos n’évite pas cet écueil, ce qui ne l’empêche pas d’être une œuvre à la fois osée, souriante et étonnante. Soulignons d’emblée le choix de la bande originale, choisie avec soin, avec notamment la découverte ou redécouverte de "Teach Me Tiger" d’April Stevens. Stéphane Foenkinos et son écrivain de frère, auquel Bla Bla Blog consacre un hors-série spécial, ont choisi un thème unique : le fantasme en amour…" LA SUITE ICI...

     

    4 "Monstrueusement sexy"

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    Extrait : "Le dernier ouvrage de Raúlo Cáceres, Eros et Thanatos (éd. Tabou) est à part dans la bibliographie du dessinateur espagnol. Cet art book rassemble sur 80 pages une sélection d’illustrations, pour la plupart inédites ou appartenant à des collections privées et datant des années 2018 à 2021. L’univers de Raúlo Cáceres est celui du sexe, de la violence, des monstres, de la cruauté mais aussi du mal, parfois incarné par des vamps aussi terribles qu’attirantes. Derrière ses adaptations de Justine et Juliette de Sade ou l’incroyable roman graphique des Saintes Eaux (toujours aux éditions Tabou), le dessinateur de Cordoue parvient à "radiographier les profondeurs de l’âme humaine, avec ces espaces sombres, qui ont peu changé au cours des siècles", comme l’écrit Serafín Pedraza Pascual, en présentation d’Éros et Thanatos. Il ajoute ceci : "La profondeur inégalée du graphisme de de Raúlo le place à un niveau d’excellence à la hauteur des plus grands auteurs de bande dessinée contemporaine…" LA SUITE ICI...

     

    3 "Anne et Hannah"

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    Extrait : "On ne va pas se mentir : l’histoire d’Anne Franck n’a jamais été aussi bien traitée que par le film de George Stevens (The Diary of Anne Frank, 1959) et bien entendu par le Journal d’Anne Franck. Le manuscrit de l’adolescente néerlandaise, retrouvé par miracle par son père après la guerre, est par la suite devenue une œuvre majeure de la littérature mondiale, le journal le plus célèbre du monde et aussi une des pierres angulaires de la littérature concentrationnaire. Le film Anne Frank, ma meilleure amie, proposé par Netflix, est consacré à ce sujet sensible et difficile sous un biais inattendu. Il fallait être culotté pour revenir sur ce récit, ce que Ben Sombogaart et ses deux interprètes principales, Josephine Arendsen et Aiko Mila Beemsterboer, font avec conviction…" LA SUITE ICI...

     

    2 "Rammstein en version classique par le Duo Jatekok"

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    Extrait : "Adapter en version acoustique et classique Rammstein, le groupe de rock metal allemand le plus emblématique de la scène mondiale : voilà un  projet qui ne pouvait qu’interloquer Bla Bla Blog. C’est le Duo Jatekok, formé par les pianistes Nairi Badal et Adélaïde Panaget, qui s’est attelé à la tâche. À bien y réfléchir, le projet a du sens si l’on pense à l’intrusion de sons symphoniques chez Rammstein ("Mein Herz Brennt" ou "Ohne Dich"). De plus, les fans du groupe allemand savent que les deux pianistes assurent depuis 2017 leur première partie. Ce pont entre deux courants musicaux, a priori aussi antinomiques que le metal et le classique, est à saluer. Le résultat est ce Duo Jatekok plays Rammstein, un passionnant album de reprises qui sort cette semaine. Un opus qui ravira autant les fans du groupe de rock que les familiers du classique – deux mondes qui peuvent d’ailleurs parfois se confondre…" LA SUITE ICI...

     

    1 "Adé, l’ex de Therapie TAXI, bien partie pour rester"

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    Extrait : "C’est l’énorme coup de cœur de cet été ! Celui qui vous fait complètement chavirer et qui vous envoie aussi une énorme frustration : celle de devoir attendre un album, qui viendra inévitablement. En un seul single, "Si tu partais", Adé montre qu’elle n’est plus seulement la co-leadeuse et chanteuse envoûtante de Therapie TAXI ("Coma idyllique", "Hit sale", "PVP"), le groupe de pop-rock le plus passionnant et le plus détonnant de ces dernières années. La séparation du groupe avait désespéré ses fans, et à juste titre. En promettant de revenir en solo, Adé, Adélaïde Chabannes de Balsac dans l’état-civil, n’a pas menti : elle propose, quelques mois après la séparation, son premier single, "Tu partais"…" LA SUITE ICI...

    Voir aussi : "Le top 10 de Bla Bla Blog pour 2021"

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  • Analyse d’une analyse

    Au sujet de Jacques Lacan, dont Betty Milan est à la fois une admiratrice et une disciple, le lecteur de son court essai Pourquoi Lacan (éd. Érès) pourra avoir l’image d’un psychanalyste élitiste, obscur et qui cultivait cette approche déroutante : "Un maître dont la pratique exigeait la plus grande patience" et avait du mal à "se soumettre aux impératifs de la communication immédiate".

    Ceci dit, ce Pourquoi Lacan a cette immense qualité d’être immédiatement accessible. Il se lit comme le témoignage d’une femme dont la rencontre avec Jacques Lacan s’est d’abord faite sur le divan du plus grand psychanalyste, avec Sigmund Freud. "Il a changé ma vie. Il m’a permis d’accepter mes origines, mon sexe biologique et la maternité", écrit Betty Milan en début d’ouvrage.

    "J’ai fait mon analyse avec Lacan dans les années 1970. Quarante ans après sa mort, j’ai eu envie de revenir sur ce qui s’était passé au 5 rue de Lille" annonce l’auteure dès l'ouverture. À l’époque, celle qui n’est encore qu’étudiante brésilienne en psychiatrie se paie l’audace de frapper au cabinet du célèbre praticien et scientifique, au départ pour préparer un séminaire au Brésil sur les théories lacaniennes. Betty Milan est à Paris pour raisons universitaires mais cet exil s’expliquait aussi par les liens intellectuels de la France et de son pays d’origine. La situation politique du Brésil, en pleine dictature à l’époque, n’est pas non plus étrangère à sa présence au pays de Voltaire. La première visite chez Lacan sera suivie par plusieurs autres, dans le cadre d’une analyse.

    "Le Docteur"

    Grâce au témoignage de Betty Milan, le spectateur entre dans la tête d’une jeune Brésilienne des années 70, tiraillée entre plusieurs cultures puisque sa famille est originaire du Liban. Sa reconnaissance pour le psychanalyste ("Le Docteur" comme elle l’appelle) est immense : "Lacan  a éclairé ma route, en permettant qu’une descendante d’immigrants libanais, victime de la xénophobie des autres et de la sienne propre, puisse enfin s’accepter".

    L’ancienne analysée, devenue elle-même psychanalyste – lacanienne –, fait entrer le lecteur dans le cabinet du praticien et relate les échanges qu’elle a pu avoir avec lui au cours de séances souvent courtes. Elle raconte comment Jacques Lacan interrompait ses séances au moment où des informations pourtant importantes, commençaient à être révélées.

    Betty Milan parle des rendez-vous réguliers, de l’interprétation des rêves, de la place de l’argent mais aussi du problème de la langue maternelle qui constituait a priori un obstacle à l’analyse (en ce sens, le titre  Pourquoi Lacan – sans point d’interrogation – prend tout son sens). 

    Betty Milan parle aussi de la France, de Paris, des années 70 mais aussi du déracinement et de ses questionnements sur ses origines et sa liberté de femme. Car c’est bien de la réinvention de la vie dont il est question dans cette analyse d’une analyse chez une figure historique des sciences humaines disparue en 1981.

    Betty Milan, Pourquoi Lacan, éd. Érès, 2021, 160 p.
    https://www.editions-eres.com/ouvrage/4773/pourquoi-lacan
    https://www.bettymilan.com.br/fr

    Voir aussi : "En tongs avec Platon"
    "Lorsque les arbres pensent"

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  • Le 6 juin 44 en roman-photo

    C’est un livre de témoignages tout à fait exceptionnel que nous propose Benoit Vidal avec son ouvrage, Gaston en Normandie (éd. FLBLB). Les monographies, autobiographies, enquêtes et documents sur le Débarquement du 6 juin 1944 sont très nombreux. L’auteur rappelle aussi les films aussi emblématiques que Le jour le plus long ou Il faut sauver le soldat Ryan.

    Là où Benoit Vidal étonne c’est la facture de son ouvrage se voulant au plus près des témoins ordinaires de cette journée capitale dans l’histoire du XXe siècle : il choisit le roman-photo, un genre qui a été popularisé par les romances populaires.

    Pour Gaston en Normandie, le lecteur découvre que ce type de livre se prête si bien à ce genre de projet littéraire et historique qu’il est étonnant qu’il n’ait pas été si souvent utilisé. Sans doute trouverait-il un nouveau public et une nouvelle manière de vulgariser l’histoire. Mais fermons la parenthèse. 

    Le Gaston en question est le père de l’auteur, un témoin jeune à l’époque des fais – il avait 7 ans en juin 1944 – mais à la mémoire intacte. Si intacte que, grâce à Gaston, l’auteur dévoile par exemple un discours du Général de Gaulle à Bayeux en juin 1945 (en plus de ceux de 1944 et de 1946) que l’Histoire avait oublié. "L’histoire vue par le bas, comme disent les historiens, ne correspond donc qu’imparfaitement à l’histoire vue d’en haut" écrit en avant-propos Olivier Wieviorka, de l’ENS Paris-Saclay, comme pour faire écho à cet "oubli".

    Ce qui intéresse Benoit Vidal est l’histoire vue par les gens ordinaires : ces témoins, résistants ou non, découvrant le débarquement un petit matin de juin. Ce sont ces Normands apeurés par les bombardements alliés, hésitant à quitter leur domicile comme le confie Joséphine, la grand-mère maternelle de l’auteur. Son témoignage recueilli par Benoît Vidal est riche de ces petits faits ignorés par la grande histoire et pourtant poignants et mémorables : ce soldat anglais capturé par les Allemands, les jeunes filles s’improvisant infirmières de campagne ou encore cet homme enseveli suite à un bombardement et sauvant son bébé.

    Le jeune Gaston voit le champ de bataille normand comme un terrain de jeu

    Olivier Wieviorka dit encore ceci : "Le livre de Benoit Vidal (…) ne retrace ni la bataille de Normandie ni les hauts faits des guerriers alliés. Il se propose de présenter le débarquement et ses suites à hauteur d’homme, tels que les événements ont été vécus par des Français moyens — sa famille en l’occurrence."

    Les témoignages de Gaston, que son fils a enregistré en dépit du caractère pudique du vieil homme de 80 ans, viennent apporter la saveur du regard d’un enfant de sept ans. Un gosse traumatisé par la guerre ? Non, bien au contraire. En dépit de la prudence exigé par ses parents pour éviter les dénonciations (l’auteur s’arrête sur le cas épouvantable et inhumain d’un médecin dénoncé par une jeune femme, maîtresse d'un militaire allemand), le jeune Gaston voit le champ de bataille normand comme un terrain de jeu ("À l’époque on n’avait pas peur. On laissait faire les enfants d’une façon incroyable !… On était très libres").  

    Le témoignage déborde de son cadre lorsque Benoit Vidal fait entrer dans ce récit centré sur le 6 juin 44 l’intime, les souvenirs familiaux, au point d’évoquer des secrets de famille. Dans les derniers chapitres, Gaston en Normandie s’apparente à un face-à-face émouvant entre un père et son fils, comme le dit l’auteur : "Mais je prends conscience dans le même temps que la quête qui me pousse à collecter la mémoire familiale est motivée par la volonté de combler un manque de communication". Cette rencontre entre un père et son fils est l'une des très belles surprises de ce roman-photo pas tout à fait comme les autres.

    Benoit Vidal, Gaston en Normandie, éd. FLBLB, CNL, 2022, 160 p.
    https://www.flblb.com/catalogue/gaston-en-normandie
    https://www.facebook.com/editionsflblb

    Voir aussi : "Un Churchill costaud et massif"

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  • Raconter l’enfer et faire œuvre de littérature

    Voici sans doute le livre le plus incroyable de ces dernières années. Dans les Geôles de Sibérie de Yoann Barbereau (éd. Stock) n’est pas seulement le témoignage brut d’un rescapé du régime autoritaire russe : c’est aussi une œuvre littéraire remarquable qui parvient à rendre dérisoire le flot d’autofictions que chaque rentrée littéraire nous abreuve.

    "La grande prose de Sibérie reste à inventer", dit un moment l'auteur. Il est probable qu’il vient de proposer un texte bien plus important littérairement que ce qu’en dit le pitch du livre : un Français, parti travailler en Sibérie pour le compte de l’ambassade de son pays, est arrêté du jour au lendemain, victime d’une kompromat – un mot russe désignant un dossier bidon monté contre quelqu’un pour le faire tomber. Emprisonné, incarcéré puis placé sous surveillance, Yoann Barbereau parvient cependant à s’enfuir en parcourant des milliers de kilomètres, au nez et à la barbe des autorités russes.

    Voilà pour l’histoire. Une histoire que les médias français ont suivi et relaté après-coup et que le public a découvert, ahuri. Si vous souhaitez en savoir plus, faites donc un tour du côté de la remarquable émission d’Affaires sensibles sur France Inter.

    S’il n’y avait qu’une seule raison de lire le livre de Yoann Barbereau c’est bien celle-là : découvrir le complot incroyable d’un Français "presque" ordinaire (car Yoann Barbereau reste tout de même un homme assez peu commun, comme il en témoigne) pris dans un piège fomenté par des agents du FSB (l’ex-KGB), beaucoup plus pied-nickelés et stupides que l’image que l’on a de ces fonctionnaires, prêts à tout pour des motivations qui restent encore obscures. Yoann Barbereau le dit autrement, en prenant l’exemple du film des frères Cohen, Burn After Reading : "Les benêts ont enchaîné les décisions insensées sans jamais rien comprendre de la mécanique cruelle qu’ils alimentaient. Il n’y avait pourtant aucun enjeu, sinon celle des carrières et des opérations de surveillance farfelues."

    Un très grand ouvrage littéraire

    Le résultat de ce coup monté, ce fameux kompromat, a eu pour l’auteur des conséquences tragiques : arrestation, emprisonnement, prisons infâmes de la Russie, découverte des conditions de vie des détenus dont il partagera le sort souvent fraternellement (la "toussovka" des prisonniers), l’asile psychiatrique puis le bracelet électronique. À cela, il faut ajouter l’incompétence des fonctionnaires des affaires étrangères : Un précepte guide les hommes du Quai d’Orsay : "En toutes circonstances, penser d’abord à se couvrir". Une réflexion qui s’explique par la manière dont le fugitif français est accueilli à l’ambassade français de Moscou après son évasion.

    Nous sommes en Russie : autant dire que le témoignage de Barbeau nous renvoie à la période sombre de l’Union Soviétique, du Goulag, des réclusions arbitraires et des décisions arbitrales de fonctionnaires, qu’une citation d’Andreï Vychinski, le procureur de Staline, décrit ainsi : "Donnez-moi l’homme, je trouverai l’article de loi".

    Yoann Barbereau inscrit d’emblée son livre dans le sillon de la littérature des victimes de la Russie, qu’elle soit soviétique ou post-soviétique. Il cite abondamment ces écrivains qu’il admire, que ce soit Soljenitsyne, Tchekhov ou Boulgakov. Il faut le dire et le marteler :  Dans les Geôles de Sibérie est un très grand ouvrage littéraire, servi par des phrases tour à tour sèches, amples, élégantes et poétiques. Cet amoureux de la Sibérie et des hommes et ses femmes (on apprend d’ailleurs que l’auteur les a aimées avec passion, ce qui a été à la fois l’une des causes de sa perte mais aussi son salut), en parle comme peu d’écrivains avant lui, son ouvrage apparaissant pour le lecteur comme la première pierre plus que convaincante d’une œuvre littéraire à venir.

    Mieux qu’un témoignage sur un fait d’hiver ahurissant, Dans les Geôles de Sibérie peut se lire comme un cri d’amour pour ce pays. Il suffit pour cela de lire ce passage consacré au lac Baïkal : "Le lieu donnait son assentiment, le lac nous accordait la sainteté. Qu’il nous avalât la minute d’après était chose possible, mais pour l’heure les histrions prenaient place sur l’icône".

    Yoann Barbereau, Dans les Geôles de Sibérie, éd. Stock, 2020, 323 p.
    https://www.editions-stock.fr

    Voir aussi : "Chanter dans les forêts de Sibérie avec Jean-Baptiste Soulard"
    "RIP URSS"

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