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  • Être une femme libérée

    Irrésistible. Voilà le premier mot qui vient à l’écoute de l’album du groupe Womankind, Womanpower.

    Derrière ce projet, se cache Sylvie Burger qui a choisi de fusionner chansons françaises et sons latino-américains au féminisme enthousiasmant. Car, oui, cet album engagé refuse d’être chiant. C’est aussi une main ouverte et un cri du cœur, à l’instar de Dis-moi des mots ou, mieux, du premier titre, Aime-moi mens-moi. Un amour vibrant et chaleureux qui est pourtant tout sauf aveugle. Et c’est ça qui est bon.

    Womankind choisit des rythmes latinos pour rendre plus souriante des histoires de déception et de rupture (Rappelle-toi, You Don’t Desserve My Love). L’auditeur ne pourra pas être insensible au bouleversant Petit frère. Sylvie Burger raconte un traumatisant sourire d’enfance, à savoir la mort de son petit frère à l’âge de deux ans, lorsqu’elle n’en avait que cinq. Une déchirure d’autant plus tragique que l’enfant est enterré dans la brousse africaine. Vie en communauté, rupture à l’âge de 15 ans avec un petit copain… que lui a piqué son propre père, départ au Mexique (Apaga la luz), passage par la case prison après avoir été chanteuse officielle de la police nationale Mexicaine… Quelle vie ! 

    Quelle vie !

    Plus d’un et plus d’une ressortirait lessivé⸱e par ces aléas, voire jetterait l’éponge. Pas Sylvie Burger qui a au contraire trouvé dans ces aventures et mésaventures de l’énergie à revendre et de la matière à un album libre, ode à la féminité et à la vie. Ce n’est pas sans espièglerie que l’artiste confie qu’ado, elle a dû faire son "coming in" (sic), pour avoir le droit d’être une femme hétéro…  

    Sur un rythme latino, la chanteuse parle, dans Mon ex en Provence, d’un ancien petit ami qu’elle a quitté, entre résignation, regret et tendresse : " Je dois dire qu’il était plutôt mignon / Mais voilà un jour on a vu rouge à Orange / Et le jour où j’aurais pu lui dire oui j’ai dit non… Le soir quand il fait beau, celui à qui je pense / C’est mon ex".

    Pour Cosmic Cosma, Womankind propose un joli et jazzy hommage à Pierre Richard, "le plus grand de tous les maladroits que nous a donné le cinéma".

    Womanpower of Love c’est un réel chaudron de bonheur, de plaisir et de vie, sans oublier ces danses collées serrées (Sambasalsa) et ce superbe et attachant portrait de La Reine des Grambois, sans doute l’un des plus jolis titres de l’opus et vient conclure l'album.

    Womankind, Womanpower of Love, Inouïe Distribution, 2025
    https://www.facebook.com/womankind.fr
    https://www.youtube.com/channel/UCsQNgIldSr11Y7ZEoo5JJ2w


    Voir aussi : "Chaude et envoûtante Méditerranée"

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  • Pas si frivole que ça

    Reynaldo Hahn est partiellement tombé dans l’oubli. Voilà pourquoi l’enregistrement du Dieu bleu par Les Frivolités Parisiennes (b.records) prend tout son intérêt. Pour ce ballet en un acte crée en mars 1912, le compositeur français né au Venezuela en 1874 (et décédé à Paris en 1947) a composé une musique typique de sa réputation de mélodiste raffiné, attaché aux harmonies et à contre-courant du modernisme qui a vu naître la musique contemporaine au début du XXe siècle.

    Dès les premières notes du Prélude, nous sommes bien dans un esprit typique de la musique française de la Belle Époque : harmonique, onirique et fortement influencée par Debussy (que l’on pense au passage éloquemment intitulé Clair de lune). Reynaldo Hahn s’y meut avec grâce, pour ne pas dire magnificence.

    Le Dieu bleu était au départ une commande de Serge Diaghilev pour les Ballets Russes sur un argument de Cocteau. L’histoire s’apparente à un conte oriental et pittoresque, que ne manque pas de refléter la musique de Hahn (Première danse, Danse des porteuses d’offrandes et des musiciennes). Sur un argument assez classique – une histoire d’amour impossible entre une jeune femme et un prêtre voué à la religion et que le Dieu bleu va autoriser et accepter de bénir – le compositeur imagine une musique à la facture classique et aux inspirations orientales, l’histoire étant sensée se passer dans une Inde fantasmée. 
    Les spectateurs et spectatrices de 1912 ont été à l’époque convaincus par la qualité de la composition somme toute assez académique et n’étant pas sans rappeler le Shéhérazade de Nikolaï Rimski-Korsakov (Danse des Bayadères du Lotus). Reynaldo Hahn peut bien faire des concessions au modernisme dans un but expressionniste (Danse des Yoghis), il n’en reste pas moins vrai que son opus a bel et bien été éclipsé par ces autres ballets révolutionnaires que furent Petrouchka, L'Oiseau de feu ou le Sacre du Printemps dans les mêmes années.

    Son œuvre a été éclipsée par ces autres ballets révolutionnaires que furent Petrouchka, L'Oiseau de feu ou le Sacre du Printemps

    L’orchestre de 70 musiciens et musiciennes des Frivolités Parisiennes, que dirige Dylan Corlay, se pose en découvreur d’une œuvre qui n’en reste pas moins dense, intelligente et sensible. Romanesque et romantique aussi (Scène de la jeune fille), mais non sans moments tragiques, à l’instar de celui de La Colère des prêtres qui fait basculer l’histoire du couple. Pensons aussi aux apparitions fantasmagoriques de Monstres et démons.

    On ne sera paradoxalement pas dépaysé par ce ballet à la facture classique – les mauvaises langues utiliseront le terme "académique" – dont l’enregistrement public (à la Cité de le Musique et de la Danse de Soissons, en septembre 2023) présente l’avantage de sortir le Maestro Reynaldo Hahn d’un injuste oubli. Le musicologue Christophe Mirambeau parle dans le livret d’accompagnement de l’album de "l’incroyable modernité" du compositeur. Soulignons aussi qu’il s’agit d’une œuvre attachante dans sa simplicité (Le miracle, La déesse paraît).

    Le moment phare du ballet reste la danse éponyme du Dieu bleu. Le morceau séduit par sa richesse harmonique et par ses riches teintes orientales, poétiques à souhait. La musique de Reynaldo Hahn ne dépareillerait pas dans une bande originale de film actuel. Alors, parler d’auteur dépassé ? Oublions cela. L’ensemble des Frivolités parisiennes mettent à l’honneur une partition solide, raffinée et non sans originalité (L’enchantement divin), certes avec cet exotisme oriental typique de l’époque. Pour ne rien gâcher, ce conte dépaysant se termine avec un happy end, où l’amour des deux jeunes gens peut se vivre au grand jour (Les amants se réunissent) sous le regard des dieux (L’escalier d’or et la montée du Dieu). Une vraie belle curiosité. 

    Reynaldo Hahn, Le Dieu bleu, Les Frivolités Parisiennes,
    dirigé par Dylan Corlay, b•records, 2025

    https://www.b-records.fr/le-dieu-bleu
    https://reynaldo-hahn.net/Html/balletsDieuBleu.htm
    https://lesfrivolitesparisiennes.com

    Voir aussi : "4 voix désirables"
    "Loïe Fuller sur les pas de Salomé"

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  • Philipp Scharwenka, nocturne et en pleine lumière

    Philipp Scharwenka (1847-1917)  n’est certes pas le plus connu des compositeurs allemands romantiques du XIXe siècle. Manque de bol pour Philipp Scharwenka à l’époque, sa notoriété avait déjà été quelque peu éclipsée par son frère Xaver, plus célèbre que lui – à l’exception toutefois des États-Unis où Philipp a remporté un certain succès. Oublié depuis, on doit son retour en grâce à un très joli album de la pianiste turque Cansu Sanlidag. Elle propose, sous le titre The Nocturnal Poet, des œuvres représentatives du compositeur, à savoir sa Ballade op. 94, la Rhapsodie op. 85 n° 1, le Scherzo op. 97 n°3 et les six premiers Abendstimmungen op. 107.

    Cansu Sanlidag caresse les touches de son clavier pour la langoureuse et mélancolique Ballade composée en 1894, ponctuée de moments lumineux et presque joyeux. L’influence de Chopin est évidente dans cette pièce. Rien d’étonnant que le compositeur polonais soit cité ici. Philipp Scharwenka et son frère Xaver sont natifs de Samter, actuelle Szamotuly, en Pologne. Ils ont par la suite rejoint en famille Berlin où le musicien a passé la majeure partie de sa vie. Il faut préciser que faire sa place musicale dans la bouillonnante capitale allemande n’a pas été simple. Après les décès des postromantiques allemandes que furent Liszt et Wagner, les Scharwenka ont été éclipsés par ces autres "monstres" qu’ont été Mahler, Wolf ou Richard Strauss. Aussi on ne peut que saluer l’entreprise de Cansu Sanlidag de faire sortir de l’ombre ce "poète nocturne".

    Faire sa place musicale dans la bouillonnante capitale allemande n’a pas été simple

    Les six Abendstimmungen op. 107 (littéralement "ambiances du soir") ont été composées en 1915. Philipp Scharwenka suit ses propres inspirations, bien loin du tapage de ses contemporains. Le néoromantisme est à l’œuvre chez lui, alors que la musique prend à l’époque bruyamment la voie de la modernité (Schoenberg, Berg et Webern, pour ne citer qu’eux). Pédagogue réputé, Philipp Scharwenka fait le choix du classicisme, de la pudeur et de la retenue. Cansu Sanlidag, dont la virtuosité est reconnue dans le monde, rend hommage à un compositeur aussi discret en ville que classique dans ses pièces (n°1). Le deuxième Abendstimmung renvoie à Chopin, lorsque le n°3 se fait plus onirique, plus inquiétant aussi. La Rhapsodie op. 85 datant de 1891, robuste et sombre, prouve que le romantisme est loin d’être mort lorsque Philipp Scharwenka compose cette pièce tourmentée et ambitieuse.

    Le quatrième Abendstimmung séduit par sa mélancolie au rythme entêtant, on pourrait même dire par sa dramaturgie exprimée par une Cansu Sanlidag décidément bien inspirée. Le n°5 laisse exploser les sentiments du compositeur allemand, avec toujours cette simplicité dans l’écriture et une interprétation hypersensible de la pianiste.

    Le sixième Abendstimmung s’écoute comme une saynète intime, touchante et simple. Philipp Scharwenka s’y montre tel qu’en lui-même, posé et à l’abri des tourments du monde, un monde à l’époque plongé dans le fracas de la première guerre mondiale – le musicien décède en 1917 sans avoir revu la paix.

    L’enregistrement se termine avec le Scherzo n°3, écrit en 1896. Le morceau a eu un joli succès à l’époque. Pétillant au départ, il monte peu à peu en gravité et en expressivité. Cansu Sanlidag s’y meut avec un naturel évident mais aussi un rare plaisir. Celui aussi d’avoir pu nous faire découvrir un compositeur injustement tombé dans l’oubli.     

    Philipp Scharwenka, The Nocturnal Poet, Cansu Sanlidag (piano), Pavane, 2025
    https://www.cansusanlidag.com
    https://www.instagram.com/p/DJznLjOtmmF

    Voir aussi : "Bach made in Rana"

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  • Chaude et envoûtante Méditerranée

    Il souffle un parfum de Méditerranée dans ce superbe album de l’Ensemble Myrtho. Avec Au Gré d’Eros nous voilà embarqué dans un périple à la fois géographique et temporel. Géographique parce que le groupe nous convie dans le bassin méditerranéen, que ce soit la Grèce, la Macédoine (Me Minise), la Corse et la France continentale ; temporel car les chants proposés ici sont issus de traditions multimillénaires.

    L’ensemble est formé par Pierre Blanchut (au santour, un instrument d’origine iranienne appartenant à la famille des cithares sur table), Laetitia Marcangeli (au chant et à la vielle à roue), Raphaël Sibertin-Blanc (aux violon, alto et kemençe d’Istanbul, un instrument à cordes frottées utilisé dans la musique classique turque jusqu'à la fin du XVIIIe siècle) et Timothée Tchang Tien Ling (aux percussions méditerranéennes).

    Laetitia Marcangeli ne chante pas Sapho, la poétesse du VIIe siècle avant notre ère ; elle est Sapho dans ce poétique, dépouillé et poignant Hymne à Aphrodite : "Viens à moi maintenant encore, et délivre-moi de ma douloureuse anxiété". Sapho revient plus loin dans l’album avec un fragment dans lequel la poétesse grecque se lamente sur un amour cruel : "L’amour a ébranlé mon cœur, comme le vent, dans les montagnes, s’abat sur les chênes" (Yo m'enamori d'un aire). Là encore, la chanteuse et musicienne Laetitia Marcangeli s’approprie l’âme de la femme de lettres antique. 

    Puisqu’il s’agit d’un opus placé sous le signe d’Éros, l’amour est omniprésent

    Puisqu’il s’agit d’un opus placé sous le signe d’Éros, l’amour est omniprésent. Il y a cette déclaration venue de Chypre, Paphitissa : "Ô ma douce colombe, quand ton vol s’incline sur le coteau, dis-moi où tu prends ton eau…" Pour cet autre chant amoureux qu’est Laledakia, L’Ensemble Myrtho emprunte le titre à un poème de Gérard de Nerval : "Je pense à toi, Myrtho, divine enchanteresse, / Au Pausilippe altier, de mille feux brillant, / A ton front inondé des clartés d’Orient, / Aux raisins noirs mêlés avec l’or de ta tresse / C’est dans ta coupe aussi que j’avais bu l’ivresse, / Et dans l’éclair furtif de ton œil souriant, / Quand aux pieds d’Iacchus on me voyait priant, / Car la Muse m’a fait l’un des fils de la Grèce".

    L’opus, aussi singulier soit-il, séduit à, tout point de vue. Généreux, brillant et attachant, l’Ensemble Myrtho bâtit de passionnantes passerelles entre des cultures liées par la Mer Méditerranée. Avre tu purta, une délicieuse invite pour que la belle ouvre sa porte à l’amoureux, nous vient de la culture séfarade. Culture séfarade encore avec le traditionnel chant Yo m’enamori de un aire ou encore avec l’envoûtant, romantique et oriental Una matica de ruda, un air traditionnel venu de Rhodes dans lequel une jeune fille avoue à sa mère qu’un garçon lui a offert un bouquet de fleurs. Ces deux morceaux précèdent une chanson traditionnelle française écrit par Clément Marot (La belle endormie). On retrouve un autre air traditionnel français, du Quercy, avec la sérénade Rossignolet du bois, charmante adresse adressée à un oiseau afin qu'il enseigne la manière d’aimer.      

    La Corse n’est pas oubliée avec deux airs traditionnels corses : Lisa Bedda, qui pleure le départ pour Bonifacio d’une femme encore aimée et U pinu tunisianu, une singulière chanson sur une lettre entre deux cousins dont l’un, exilé en Tunisie, regrette d’avoir été rejeté par une femme. Incroyable découverte que ce chant qui rend hommage à l’une des plus importantes cultures vivantes en Méditerranée et dont on peut goûter avec délice le rythme comme la densité.  

    Une jolie découverte que cet album, idéal en ce début d'été.

    Ensemble Myrtho, Au Gré d'Eros, Concertons ! / L'Autre Distribution, 2025
    https://www.facebook.com/profile.php?id=100070835440216
    https://bfan.link/au-gre-d-eros

    Voir aussi : "Voyage vers les Corées"

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  • Femmes puissantes

    Un mot un destin (éd. Litos), le recueil de chroniques de la journaliste et historienne Clémentine Portier-Kaltenbach présente la première particularité de dresser le portrait de 90 femmes remarquables, célèbres ou non, de l’Antiquité à nos jours, d’Agrippine la Jeune, mère de Néron, à l’Américaine Dorothy Counts-Scoggins, figure antiségrégationniste, en passant par Marie-Antoinette, Margaret Michell ou Françoise Sagan. Il faut saluer le talent de l’autrice qui parvient à aller à l’essentiel, chaque chronique ne dépassant pas les trois pages.

    La seconde particularité du recueil est d’accoler à chacune de ces femmes un mot permettant d’expliquer en quoi elle a marqué son époque, souvent en bien, parfois en mal à l’instar d’Elena Ceaucescu, l’épouse du dictateur roumain ou encore Agrippine. Pour ce personnage devenu légendaire, Clémentine Portier-Kaltenbach a choisi le mot "Matricide", bien logique étant donné le destin de Néron et de son implacable mère. Pas mal de termes tombent sous le sens : "Libertinage" pour la courtisane Ninon de Lenclos, "Baccalauréat" pour la première bachelière de l’Histoire, Julie-Victoire Daubié ou "Bikini" pour Ursula Andress.

    Bien entendu, le lecteur "musclera" son vocabulaire avec des termes aussi rares que "Réticule", "Autodidaxie" ou "Épectase". Ceci dit, c’est d’abord le portrait de ces femmes, que l’on qualifiera aisément de courageuses et même de "puissantes", qui constitue le gros atout de ce recueil de chroniques. 

    Bien entendu, le lecteur "musclera" son vocabulaire avec des termes aussi rares que "Réticule", "Autodidaxie" ou "Épectase"

    Quels sont les plus petits dénominateurs communs de ces femmes ? Certainement de s’être battues pour s’imposer, ou du moins d’avoir tenté de se faire leur place dans un monde dominé par les hommes. Les mariages arrangés sont légion dans le recueil, que ce soit la pathétique union entre Philippe Auguste et la jeune princesse danoise Ingeburge, le couple ennuyeux que formait Louise de Bourbon-Condé avec un fils illégitime de Louis XIV, sans oublier le mariage raté de Valentine de Chimay.

    Il y a aussi ces relations, devenues légendaires, que ce soit Carol Lombard et Clark Gable qui ne s’est jamais remis de la mort prématurée du seul amour de sa vie, Clara Goldschmidt à jamais liée avec André Malraux ou encore Sophie de Ruffey dont le décès touchera Mirabeau au plus haut point. Le lecteur sera par contre certainement refroidi par l’étonnant et pas envieux portrait de Colette, une "Cougar" (c'est d'ailleurs ce mot qui la définit dans le recueil) à la fois irrésistible, dévorante et parfois gênante.

    Ces 90 destins réservent bien des surprises. On apprendra ainsi qui était Dido Elizabeth Belle, une jeune femme noire devenue la première aristocrate anglaise de couleur dans le pays de Jane Austen. On en saura un peu plus sur Sophie Germain, une mathématicienne maintenant reconnue, sur Betsy Balcombe qui a été la singulière, touchante et dernière "relation" féminine de Napoléon en exil, sans oublier Eleanor Roosevelt, première "vraie" First Lady au caractère incroyable. Sans compter ces inventrices parfois oubliées, moins célèbres que leurs inventions : l’aquarium de Jeanne Villepreux-Power, le parachute de Jeanne Labrosse-Garnerin ou encore… Wonder Woman, une création – par un obscur psychologue américain – inspirée par deux femmes. Shoking !

    Inutile d’avoir lu le premier tome d’Un mot un destin pour goûter l’ouvrage de Clémentine Portier-Kaltenbach.

    Clémentine Portier-Kaltenbach, Un mot un destin, tome 2, éd. Litos, 2025, 312 p. 
    https://www.editionslitos.fr/product/132272/un-mot-un-destin---tome-2
    https://www.instagram.com/clementineportierkaltenbach

    Voir aussi : "Elles causent des femmes"

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  • Qui n’aime pas Ravel ?

    Comment ne pas aimer Ravel ? Popularisé grâce au célébrissime Boléro, aimé des amateurs classiques et respecté pour sa grande modernité, Maurice Ravel avance toujours avec délicatesse et sans esbroufe.

    Le Quintette Moraguès, avec Claire Désert au piano, propose chez Indésens un enregistrement de quelques-uns des chefs d’œuvre de Ravel (1875-1937) : Le Tombeau de Couperin, Pavane pour une infante défunte et Ma Mère L’Oye. Le Quintette pour piano et vents d’André Clapet (1878-1925), un de ses contemporains français, vient compléter l’album.

    C’est Le tombeau de Couperin qui ouvre le bal. Un tombeau des plus somptueux et apaisant, contrairement à ce que ne le laisserait penser le titre. Il y a de la virtuosité dans ces arabesques musicales (Prélude) mais aussi de la couleur, ponctuées par le piano tout en finesse et en discrétion de Claire Désert. Ravel a mis trois ans, de 1914 à 1917, pour accoucher du Tombeau de Couperin. À l’époque, la première guerre mondiale éclate et Ravel s’engage en dépit de sa santé fragile. Il connaît Verdun, a de graves soucis de santé et est finalement démobilisé en 1917, année où il termine cette pièce d’une grâce et d’une insouciance singulières étant données les circonstances tragiques. Ravel choisit de l’ancrer dans le classicisme, avec cet hommage à François Couperin (1668-1733) – on pense au Menuet et au Rigoton – sans pour autant tourner le dos au modernisme.

    Dans les premières années du XXe siècle, Stravinsky a secoué le milieu de la musique avec L'Oiseau de feu, Petrouchka et Le Sacre du printemps. Pas de provocation chez Ravel, dont on a pu railler parfois – et à tort ! – la modération, sinon la tiédeur. Or, c’est bien encore de modernisme dont il s’agit mais de modernisme assagi ! Que l’on s’en rende compte avec le Forlane, un rythme de tango pour cette danse italienne à deux temps, vive et animée, et que l’on a pu juger licencieuse au XVIIe siècle.     

    C’est bien de modernisme dont il s’agit mais de modernisme assagi !

    L’auditeur retrouvera avec plaisir l’autre joyau qu’est La Pavane pour une infante défunte. Ravel revient là aussi vers une danse ancienne, faussement simple et à la ligne mélodique incroyable qui a fait son succès. Cette pavane est restituée avec le Quintette Moraguès et Claire Désert dans toute sa mélancolie. Imparable.

    Troisième œuvre majeure de Ravel, Ma Mère L’Oye met en musique quelques-uns des contes de Charles Perrault (La Belle au bois dormant, Le Petit Poucet), de Madame Leprince de Beaumont (La Belle et la Bête) et de Marie-Catherine d'Aulnoy (le personnage de Laideronnette dans Le Serpentin Vert). On est ici dans un univers onirique. Aussi envoûtante que les contes écrits, la suite de Ravel insuffle de la modernité tout en restant d’un beau classicisme, porté par un Quintette Moragès inspiré et une Claire Désert impeccable et semblant avoir toujours travaillé avec le prestigieux ensemble porté par Pascal Moraguès. On goûtera avec délice, toujours dans ces "contes musicaux", le mouvement du Jardin féerique, à la grande lenteur mélancolique, comme un dernier adieu.

    Cet album Ravel se termine avec un compositeur et une pièce méconnus. André Caplet et Maurice Ravel se connaissaient d’autant plus que le premier gagna devant le second un prestigieux Prix de Rome, en 1901. La proximité artistique des deux artistes est évidente à l’écoute du Quintette pour piano et vent de Caplet. Nous sommes au cœur de cette musique française harmonique (Allegro con brio) et néoromantique (le bouleversant Adagio), lorgnant par ailleurs vers des rythmes et influences anciennes (Scherzo – Très vif), André Caplet reste pourtant dans son époque (le Final, allegro con fuoco), à l’instar de son homologue Maurice Ravel. Plus modernes qu’il n’y paraît.

    Ravel et Clapet, Quintette Moraguès & Claire Désert, Indésens Calliope Records, 2025
    https://indesenscalliope.com/boutique/ravel-et-caplet
    https://www.quintettemoragues.com
    https://www.clairedesert.com

    Voir aussi : "Cécile Chaminade et ses amies"

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  • Voyages en Électronique

    Dès les premières  notes d’Iris, la première piste de Mirages II, nous sommes bien au pays de l’électronique. JB Dunckel et Jonathan Fitoussi proposent avec leur nouvel opus Mirages II ce qui se fait de meilleur dans un style puisant loin ses sources, du côté de l’électro des années 70 et 80. Les lignes mélodiques et le rythme séduisent rapidement – le fameux Iris, donc. 

    Les inventions sonores laissent deviner le travail qu’il leur a fallu pour concocter un opus imparable, à la fois mélodieux, intelligent et envoûtant (le mystérieux Ghost Town).

    Dans Marimbalum, on devine que les deux compères ont lorgné du côté du courant répétitif contemporain (à commencer par Philip Glass et Steve Reich) pour bâtir un titre à la fois actuel, dépaysant et hyper-moderne. Et entêtant.

    Cette étrange sensation de dépaysement à l’écoute de Mirages II, avec ces sons comme venus d’un autre lieu ou d’une autre époque, celle précisément des seventies, lorsqu’un petit monde musical découvrait les possibilités infinies des machines (Karakoum). 

    Dépaysant et hyper-moderne

    Au fur et à mesure que l’opus déploie ses vagues synthétiques, on reste en apesanteur, surpris et carrément séduits par JB Dunckel et Jonathan Fitoussi, se permettant autant des digressions vers le pop-rock – mais toujours en instrumental (Spark) ou vers une forme de minimalisme, ce qui n’est pas le plus aisé (Atlantica).

    L’auditeur se laissera transporté par ces séquences ne s’étirant pourtant pas démesurément en longueur – un seul titre, Marimbalum, dépasse les 7 minutes. JB Dunckel et son acolyte Jonathan Fitoussi utilisent l’électronique à bon escient, sans jamais accumuler des couches de sons (Tanzanite). La rythmique est tout aussi bien pensée. L’album se termine sur le subjuguant Automnal Equinox, le point final d’un joli voyage. Sacrée découverte.

    JB Dunckel & Jonathan Fitoussi, Mirages II, Prototyp Recording / Transversales Disques, 2025
    https://www.facebook.com/JBDunckelMusic
    https://www.instagram.com/jbdunckel
    https://www.facebook.com/jonathan.fitoussi.composer
    https://www.instagram.com/jonathanfitoussi

    Voir aussi : "Sônge d’une nuit d’électro"
    "On est sérieux quand on n’a pas 17 ans"

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  • À l’origine, le rock

    Partons aux origines du rock avec le bien nommé Origins du bluesman lyonnais Léo Benmass. Direction donc les States. Mettons sous couvert les idées qui fâchent avec un pays décidément bien insaisissable – restons poli – en ce moment.

    Voilà un premier album qui s’assume tel qu’il est, en déclinant le rock sur toutes ses coutures : rock indé, blues rock, pop et même rockabilly. Après un début prometteur – roulements de guitare, voix rocailleuse de Léo Benmas (Origins) – place au rockabilly, assumé et sans fausses notes (le séduisant Let Me Love You Baby).

    Le rock sur toutes ses coutures

    Impossible de parler de Léo Benmass sans citer les deux musiciens qui l’accompagnent, Arnaud Liatard à la batterie et Martin "Blues" Cortel à la basse, car c’est en trio que se produit le guitariste et chanteur. Les trois proposent ainsi une version décomplexée du Voodoo Child de Jimi Hendrix, avant une reprise, elle aussi séduisante, du désormais classique Riders on the Storm des Doors. Revisite oui mais dans la même facture que la bande à Jim Morrisson.

    Pour See My Troubles, nous voilà dans le sud américain, chaud, poussiéreux et douloureux. Ambiance blues pour ce morceaux roulant comme une mécanique bien huilée. On se laissera encore plus séduire par la jolie ballade In The Deep Of My Soul au pop-rock très nineties. Un morceau capable de faire tomber n’importe qui. Après le séduisant et formidable Excuse Me, c’est du côté de Woodstock que se termine le voyage de Léo Benmass. Une fin de voyage psychédélique et rock. Cela va sans dire.

    Léo Benmass, Origins, Rock'n'Hall / Dixiefrog, 2025
    https://leobenmass-music.com
    https://www.facebook.com/leobenmass.music
    https://www.instagram.com/leobenmass.music

    Voir aussi : "Des amis, de la poussière, du diesel et du rock"

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