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Notre hors-série consacrée à la romancière Karine Giebel débute avec un thriller sorti il y a cinq ans. Ce que tu as fait de moi est aujourd’hui disponible chez Pocket. Une belle occasion de découvrir une autrice aux récits rudes.
Saluons pour commencer la facture de ce roman construit autour d’un double interrogatoire mené par la Police des Polices. Karine Giebel va à l’essentiel : les faits et rien que les faits, avec des dialogues, tour à tour du commandant de police Richard Ménainville et de la lieutenant Lætitia Graminsky.
La jeune femme est arrivée peu de mois plus tôt dans le service des stupéfiants d’une ville dont nous ne connaissons qu'une initiale – L. Le lecteur ne sait que peu de choses lorsque le roman commence, sinon qu’il s’est passé un événement très grave que les deux protagonistes relatent avec précision, sans rien cacher. Les deux ne cachent pas que tout a débuté avec l’arrivée de la lieutenant Graminsky dans le service de Richard. Lors d’une opération, la policière commet une erreur qui met en danger son équipe. C’est le début d’un engrenage terrible et le point de départ d’une relation ambiguë avec son supérieur.
Engrenage terrible
Efficace, Karine Giebel l’est indubitablement dans sa manière de trousser une histoire mêlant le crime, la passion, la manipulation et les faiblesses humaines. L’engrenage est mis en place dès les premières pages et l’arrivée de Lætitia dans un service qui décidera de ne rien lui laisser passer – si ce n’est un de ses collègues Damien qui, à un certain moment, servira de pion.
Hitchcockienne, Karine Giebel ne ménage pas ses personnages, réservant ses griffes les plus acérées à Richard, le commandant apprécié par ses subalternes, sûr de son pouvoir, père de famille et mari au-dessus de tout soupçon mais qui va bientôt perdre pied. Son N-1 et ami Olivier va lui servir à la fois de confident et complice, notamment dans l’une des scènes les plus déstabilisantes du roman.
Un roman qui se déploie avec précision, ponctué par les questions des deux inspecteurs de la Police des Polices. Sorti en 2019, soit deux ans après le déclenchement de la révolution #Metoo, le livre de Karine Giebel trace le portrait d’une femme victime, prise dans un piège mêlant pouvoir masculin, séduction, passion amoureuse et emprise. Le résultat n’en sera que plus désastreux.
Comme chaque année, Bla Bla Blog propose son top 10 des publications phares de cette année, celles qui ont fait le buzz et celles qui sont les plus populaires. Comme souvent, elles sont représentatives de Bla Bla Blog, le site des découvertes culturelles et artistiques. Qu’y trouve-t-on dans ce florilège ? Rimbaud et son actualité poétique autant que technologique (certes très critiquable !), de la musique avec du jazz (très bien représenté) mais aussi Gabriel Fauré dont nous fêtions en 2024 les 100 ans de sa mort. La chanson et la pop ne sont pas en reste, pas plus qu’une série télé que nous avons trouvé formidable ! Et pour épicer le tout, du sexe, avec un roman à ne pas mettre entre toutes les mains… Bref, il y a de tout pour faire un monde, et c’est très bien comme ça.
"Bobbie, c’est l’une des révélations du moment. Mais attention, pas n’importe quelle révélation ! La jeune chanteuse française a puisé dans l’Amérique profonde les sources de son album The Sacred In The Ordinary.
Les influences de Bobby s’appellent Joni Mitchell, Dolly Parton ou Bob Dylan. Un opus en anglais où la pop (Last Ride, Back Home) fait la part belle à la country, à l’instar du morceau Losing You qui ouvre ce délicieux album ou encore le formidable et enlevé The Sacred In The Ordinary qui lui donne son nom…"
"Hervé Sellin propose de nouvelles adaptations jazz dans son Jazz Impressions. Après Debussy, c’est Gabriel Fauré et Maurice Ravel qui ont les honneurs du pianiste français.
L’opus commence par un véritable tour de force. En l'occurrence, Gabriel Fauré et son Requiem en mode jazz, avec une "Introduction" et un "Kyrie", moins funèbre que sombre et mélancolique. On peinera à retrouver l’aspect liturgique de ces premières Impressions. L’"Agnus Dei" sonne comme un chant d’amour paisible, avec des improvisations au piano qui ont toute leur place. Le lyrisme du "Libera Me" originel est plus intimiste et personnel dans cette revisite. Plus paisible aussi. Une vraie libération, aurions-nous envie d’écrire. Les connaisseurs de Fauré et de son Requiem peineront sans doute à reconnaître l’œuvre originale, en particulier dans cet extrait, léger et rafraîchissant…"
"Peu d’instruments sont aussi à la fois élégants et humains que le violoncelle. Et si vous ajoutez à cela un répertoire de la classe de Gabriel Fauré, voilà qui devrait définitivement vous convaincre de découvrir l’album que Pauline Bartissol – au violoncelle, donc – et le pianiste Laurent Wagschal consacrent à l’auteur du fameux Requiem.
En cette année Fauré (le compositeur est mort en 1924), Laurent Wagschal consacre une intégrale de ses œuvres pour piano. Pauline Bartissol le rejoint dans ses enregistrements consacrés au violoncelle et au piano. Au programme, les deux Sonates op. 109 et 117 pour violoncelle et piano et des pièces de musiques de chambre devenues universelles, à savoir la Sérénade op. 98, la célèbre Élégie op. 24, la Romance op. 69, la naturaliste pièce intitulée Papillon op. 77 et la délicieuse Sicilienne op. 78…"
"Qui était vraiment Rimbaud ? Que reste-t-il de lui ? Quelques (vraies) photos, une correspondance et surtout une œuvre brève (Une saison en enfer et Les Illuminations, sans compter de nombreux poèmes en vrac). Pour autant, son importance et son influence sur la littérature est exceptionnelle. Précurseur de la poésie moderne, Arthur Rimbaud a produit une œuvre révolutionnaire avant ses 20 ans. Il abandonne définitivement la poésie en 1875, jusqu’à son décès en 1891 à l’âge de 37 ans.
C’est sur les années 1870-1875 que se concentre la biographie de Luc Loiseaux, Rimbaud est vivant (éd. Gallimard), c’est-à-dire de son premier séjour à Paris – qui se termine en prison – jusqu’au décès de Vitalie, la jeune sœur de Rimbaud. Ce deuil marque aussi la fin de sa carrière littéraire…"
"Une chose est sûre. Mattieu Lavagna et Michel Onfray ne passerons pas leurs vacances ensemble, comme aurait dit un journaliste sportif.
Depuis le temps que le philosophe Michel Onfray truste les plateaux télé et propose sa "bonne parole", il fallait bien que quelques voix discordantes vienne susciter la polémique. C’est le cas avec cette Libre réponse à Michel Onfray proposé par les éditions Artège.
Ce n’est pas un mais plusieurs ouvrages qui intéressent le philosophe et théologien Matthieu Lavagna : Traité d’Athéologie (2005), Décadence, Vie et Mort du Christianisme (2017) et Anima (2023). Le tort de Michel Onfray ? Affirmer que Jésus n’a jamais existé, ni plus ni moins, et que sa vie n’est jamais qu’un mythe. C’est la "thèse mythiste", très ancienne, pour ne pas dire datée. Dès la préface, Matthieu Lavagna cogne, et dur..."
"C’est par une œuvre collective que commence cet enregistrement d’œuvres de Robert Schumann pour violon et piano. La Sonate F.A.E. nous vient de deux figures majeures du romantisme – Brahms (pour le troisième mouvement Allegro (Scherzo) et Schumann pour les deuxième et quatrième mouvements, Intermezzo et Finale.
Le troisième est Albert Dietricht, compositeur du premier mouvement Allegro. Les trois amis écrivent en 1853 cette sonate au nom étrange mais plein de sens : F.A.E. pour Frei Aber Einsam ("libre mais solitaire"). Elle a été offerte cette année-là au violoniste Joseph Joachim. Ce dernier l’a d’ailleurs joué, tout comme Clara Schumann…"
"En ce début d’année, et alors que nous sommes toujours nombreux à trouver une bonne série à se mettre sous les dents, pourquoi ne pas se tourner vers la télévision publique ? La série Sambre avait, à juste titre, suscité l’enthousiasme. L’une des meilleures de 2023, osons le dire. Bla Bla Blog en avait parlé. Voilà une autre qui mérite tout notre intérêt.
Elle se nomme Les Invisibles et se présente comme une passionnante saga policière. Nous suivons un groupe de quatre enquêteurs du Nord, sous la direction du commandant Darius. Il est secondé par l’expérimentée et râleuse Marijo, la jeune lieutenant fraîchement recrutée surnommée Duchesse, sans oublier Ben, un autre lieutenant, père de famille exemplaire capable de jouer des poings en cas de besoin.
Ces quatre-là ont une semaine pour identifier des morts anonymes, surnommés des "invisibles". Une chasse à l’identité qui devient vite une course à l’assassin..."
"Attention, voici un ouvrage à ne pas mettre entre toutes les mains. Plurielles, paru aux éditions Tabou, est un roman qui nous transporte vers un milieu peu courant, celui du BDSM.
Son autrice, Éva Delambre fait partie de ces noms fameux de la littérature érotique, jamais aussi à l’aise que lorsqu’elle interroge des thèmes de la soumission et de la BDSM.
Plurielles nous propose une plongée plus vraie que nature dans un milieu vivant dans la discrétion.
Éva Delambre en profite pour le désacraliser et de le faire découvrir, parfois dans toute sa crudité…"
"Lorsque la chanson française se pare de jazz, ça donne A French Songbook, un album du Antoine Delaunay Quintette, un ensemble mené par Antoine Delaunay, avec la chanteuse Mélanie Dahan en vedette, Gilles Barikosky au sax ténor, Marc-Michel Le Bévillon à la contrebasse et Luc Isenmann à la batterie.
L’opus commence dans le mystère et la mélancolie avec la reprise des Passantes le classique de Brassens, sur un air de jazz épuré, chanté par Mélanie Dahan, une vraie revisite jazz. "Je veux dédier ce poème / À toutes les femmes qu'on aime / Pendant quelques instants secrets".
On sera sans doute un peu plus décontenancée par cette Jolie Môme, moins espiègle que la version de Léo Ferré. On a là une promenade germanopratine et joyeuse propre à autant éclairer les cœurs que la Jolie Môme originelle, avec en plus les improvisations d’Antoine Delaunay…"
Parmi la pléthore d'ouvrages de vulgarisation philosophiques, celui-ci offre la particularité de s'intéresser aux grands concepts philosophiques. La caverne de Platon, le pari de Pascal, la dialectique de Hegel, le Cogito de Descartes, la mauvaise foi de Sartre ou le Surhomme de Nietzsche sont expliqués de manière claire.
Les lycéens de Terminale - mais aussi tous ceux qui s'intéressent un tant soit peu à la philosophie - trouveront certainement dans cet ouvrage matière à éclairer leur lanterne et à comprendre des théories parfois mal comprises.
Les auteurs ont également choisi de traiter de concepts moins connus : le théorème de Gödel, le cerveau dans une cuve, le sens commun de Moore ou... les zombies de Chalmers ! J'ai cependant quelques réserves à faire sur ce vade-mecum. Tout d'abord, on peut être frustré par ce livre aux articles si courts qu'ils restent parfois obscurs (je pense à la rubrique "Langage et logique" que j'ai trouvée très difficile). Le choix de grands chapitres est lui aussi critiquable : "Langage et logique", "Science et épistémologie", "Esprit et métaphysique", "Philosophie politique et éthique", "Religion", "Grands moments" (!) et "Philosophie européenne" (!). Un choix chronologique n'aurait-il pas été mieux ? Ensuite, ce livre prend le parti de faire l'impasse sur les philosophes eux-mêmes (leur biographie se limite à leur nom, prénom et dates, à l'exception de sept philosophes dont la vie et la carrière sont résumées en quelques lignes).
S'il veut aller plus loin, le lecteur est invité à se munir d'un dictionnaire. Disons que c'est un choix délibéré des auteurs. Mais la principale réserve reste sur la brièveté de ce manuel (qui est certes un argument en sa faveur) : en faisant de larges raccourcis, ce petit livre fait des choix arbitraires et - pire - des impasses assez peu compréhensibles. A côté des penseurs allemands ou grecs antiques incontournables, les auteurs ont offert une place de choix aux philosophes anglo-saxons et américains. Cela peut se comprendre pour des penseurs comme Hume ou Russell. Seulement, comment expliquer que des philosophes comme Ryle, Chalmers ou Kuhn aient droit à une rubrique alors que d'autres, comme Kierkegaard, Foucault ou les Encyclopédistes français aient été zappés ? Dommage.
On parle moins en ce moment des polars venus d’Europe du Nord. Or, non seulement ils n’ont pas disparu mais en plus ils continuent à avoir leurs fans, et c’est bien mérité. Revenons dix ans en arrière avec la sortie d’un de ces thrillers venus de la Mer du Nord, plus précisément le premier volume du cycle du Département V, Miséricorde d'Adler Olsen disponible en Livre de Poche.
Il s’agit de la première enquête de Carl Mørck, policier danois à la vie professionnelle et personnelle en miettes. Séparé d’une femme qui s’est fait la belle avec son amant, avec un beau-fils d’adolescent insupportable, Carl ne peut même pas se consoler avec son métier. Sa dernière enquête a été un désastre. Un de ses coéquipiers a été tué et un autre gravement handicapé, si bien que leur supérieur en conçoit un grand sentiment de culpabilité.
Ne faisant pas l’unanimité chez ses collègues, son supérieur choisit de le mettre au placard en lui donnant la responsabilité d’un nouveau service, le Département V dédié aux cold cases. Un improbable adjoint le rejoint, un immigré d’origine syrienne, Hafez el Assad (sic), homme à tout faire s’avérant un enquêteur plus malin qu’il n’y paraît. Les deux collègues s’intéressent à une disparition vieille de cinq ans, celle d’une femme politique renommée, Merete Lyyngaard.
Une première enquête serrée qui commence une saga policière devenue culte
Merete est-elle vivante ? Que lui est-il arrivé ? Pour la première question, le lecteur a la réponse dès les premières pages, les chapitres du roman alternant les scènes dans son cachot depuis son enlèvement en 2002 et celles sur le suivi de l’enquête menée de main de maître par Carl Mørck. Quant à savoir ce qui lui est arrivé, le roman le dévoile au fur et à mesure de la progression de l’investigation.
Retors, Adler Olsen brouille les pistes : disparition sur un ferry en Mer du Nord, passage par les couloirs d’un parti danois qui a très bien sûr faire sans la brillante et ambitieuse politicienne, interrogatoires des secrétaires de Merete. De cette femme qui s’est visiblement faite plusieurs ennemi⸱e⸱s, les questions se succèdent. A-t-elle eu vent d’une affaire gênante ? A-t-elle été victime d’un amoureux éconduit ? Le portrait de Merete n’arrête pas de s’épaissir : son frère handicapé suite à un accident de la route, sa supposée homosexualité, ses rendez-vous discrets quelques jours avant son enlèvement. Tout se brouille pour Carl mais il finira tout de même par avoir le fin mot de l’histoire, au terme d’un dénouement explosif et grâce à l’aide d’Hafez.
Le tranquille pays du Danemark devient un terrain inquiétant, avec ses chausse-trappes, ses secrets, son climat politique trouble et ses silences.
Voilà une première enquête serrée qui commence une saga policière devenue culte.
On l’oublie trop souvent : de la Russie soviétique de l’entre-guerre jusqu’à l’Amérique latine des années 70, Tintin a d’abord été un reporter belge – certes, les mauvaises langues diront qu'il était proche de la retraite lors de sa toute dernière aventure (Tintin et les Picaros). En tout cas, ses pérégrinations n'ont été rendues possibles que parce que le jeune journaliste devait sillonner le monde pour informer ses lecteurs.
La bonne idée de Marc Ouahnon, pour son ouvrageDe notre envoyé spécial (éd. 1000 Sabords), est d’avoir imaginé les articles que le reporter imaginaire aurait pu écrire suite à ses pérégrinations (Le Petit Vingtième pour ses premières "enquêtes").
Sur 62 pages – la pagination canonique des albums d’Hergé – Marc Ouahnon a écrit les chroniques des 23 albums complets (Tintin et l'Alph-Art a été volontairement mis de côté). Écrits à la première personne, en se mettant dans la peau de Tintin, Marc Ouahnon imagine comment celui-ci aurait pu relater ses pérégrinations en URSS, au Congo, sur la lune ou bien lors du séjour de La Castafiore à Moulinsart lors du vol de ses bijoux.
Ses articles ont sensé être parus dans trois magazines : Le Petit Vingtième de 1930 à 1939, La Nuit de 1941 à 1943 et Le Reporter de 1946 à 1976.
Un livre-hommage que les tintinophiles ne manqueront pas de se procurer
De notre envoyé spécial est un livre-hommage que les tintinophiles ne manqueront pas de se procurer et de lire. L’ouvrage est une plongée dans les aventures du reporter belge. Marc Ouahnon prend évidemment soin de se baser fidèlement à chacun de ses ouvrages.
Ainsi, pour Tintin au Pays des Soviets, la BD originelle aux imperfections réelles mais touchantes, il se base en partie sur des élections truquées, avant de relater son investigation dans une Russie de la duperie et du crime. Pour la chronique sur Tintin en Amérique, c'est le récit sur une expropriation de peaux-rouges de leurs terres qui sert à pourfendre le capitalisme cynique des États-Unis durant La Prohibition.
L’actualité et l’histoire sont au cœur de l’ouvrage, même si des libertés peuvent être prises : le faux-attentat des Japonais en Chine (Tintin et le Lotus Bleu) ou la course à l’espace (le fameux diptyque lunaire).
Des articles font honneur à la fantaisie et aux récits d’aventure (L’étoile mystérieuse, Le Crabe aux pinces d’or, Tintin au Tibet ou les Bijoux de la Castafiore, même si Marc Ouahnon en profite pour parler de racisme pour ce dernier album). Intelligemment, les personnages accompagnant Tintin ne sont pas nommés tels quels, l’auteur préférant leur donner une apparence bien réelle, à l’image de Tournesol nommé Pr Piccard, son investigateur.
Léa Grosson cache bien son jeu. Maman d’un garçon, en couple et heureuse avec son compagnon, provinciale et vivant à la campagne entourée d’animaux, celle qui s’est fait connaître sous le nom de Celle qui aimait grâce à son blog et ses réseaux sociaux, nous propose cette année son premier roman Depuis cette nuit (éd. La Musardine). Une vraie réussite en la matière et une entrée fracassante dans la littérature érotique.
Léna, graphiste free-lance, est une accro au jeu, au poker plus précisément. Cette célibataire bien dans son époque se rend compte qu’elle est prise au piège de cette addiction. Lors d’une soirée qui s’est mal passée – elle s’en est prise à un distributeur automatique – elle est embarquée par les flics. Faute d’avocat, elle choisit d’appeler la seule personne dont elle a le numéro. Il s’appelle Étienne, elle l'a rencontré après une sortie au casino et il tombe à point nommé : avocat, attentionné, il est irrésistible. Mieux, il est un ancien drogué aux jeux. Il lui propose de l’aider à se sortir de cette spirale infernale. La recette ? L'amour ! Car quoi de mieux pour soigner une addiction qu’une autre addiction. En l’occurrence, le sexe.
Roman particulièrement moderne et contribuant à secouer le petit monde de l’érotisme littéraire
Léa Grosson explique dans sa longue section de remerciements – en réalité une postface – que Depuis cette nuit a commencé par une nouvelle qu’elle a publiée sur son blog. Cette nouvelle est précisément le Chapitre 45 (sic) qui ouvre le roman. Et quel chapitre ! L’auteure nous offre une scène sacrément audacieuse autour d’un jeu à plusieurs. Inutile de vous en dire plus pour vous laisser la surprise. Caliente !
Après ce début, la nouvelle est devenue un projet de roman. Pour le commencer, l'auteure a fait le choix d'interagir avec ses abonné⸱e⸱s : profession d’Étienne (avocat ou professeur ?), lieu de leur premier rendez-vous (Appartement de Léna ? Résidence d'Etienne ? Une maison isolée ?) et choix du cadeau offert par le fringuant lover. La suite, c’est une série de jeux à deux – puis à plusieurs.
Léa Grosson s’est visiblement beaucoup amusée dans ce roman astucieusement présenté comme "à mi-chemin entre romance et littérature érotique". La love story est bien là, répétée à l’envi par Léna, la narratrice, mais le sexe a la part la plus généreuse. En cette période Meetoo, Léa Grosson se plaît à interroger les interdits, la soumission, la masculinité et le féminisme. Cela rend ce roman particulièrement moderne et contribue à secouer le petit monde de l’érotisme littéraire. Libre, Léa Grosson – et son alter-ego Léna – le sont, assurément.
Pas de prise de tête, vraiment, mais d’autres prises...
Soyons sérieux. Ces 50 histoires lunaires sur le vin n’ont pas pour ambition de dresser un tableau de l’œnologie, ni de faire une chronologie de l’histoire de la vigne et du vin, ni surtout de faire preuve d’érudition pour impressionner le lecteur ou la lectrice. Quoique ! En parlant d’érudition, Fabrizio Bucella n’en manque pas. Mais il la manie avec humour et dans un style enlevé. L’OVNI qu’il nous propose (Objet Vinicole Non Identifié, éd. Hachette) se veut avant tout une histoire d’amour sur une boisson vieille de plusieurs millénaires, souvent admirée autant que critiquée. Et aujourd'hui en danger à cause du réchauffement climatique.
L’ouvrage, illustré par Théophile Sutter ("L’Immortel"), propose cinquante chroniques sans ordre chronologie. Ces courts textes montrent que le vin a, de tout temps, suscité admiration, rejet, fascination et a réussi à devenir un marqueur de raffinement, de luxe, voire de signe extérieur de richesse. En tout cas, c'est un sujet de passion, pour ne pas dire de fascination pour ses amateurs et amatrices. Loin d’être un ayatollah de la dive bouteille, Fabrizio Bucella a choisi de parler du vin par le petit bout de la lorgnette.
Chacune de ses chroniques n’aura de cesse d’intriguer : pourquoi Châteauneuf-du-Pape a-t-il interdit de survol de son territoire les soucoupes volantes ? (après tout, l’ouvrage se nomme OVNI…), James, Bond était-il un fieffé alcoolique – en plus d’être espion et tombeur de ces dames ? Napoléon buvait-il du Chambertin ? Comment l’église s’en est-elle prise aux charançons ?
Rien de très sérieux a priori. Sauf que...
"Comment parler des vins qu’on n’a pas bus ?"
Sauf que Fabrizio Bucella propose aussi des chroniques à la fois courtes et pertinentes sur des sujets plus sérieux. Comment les Romains buvaient-ils leurs vins ? Pourquoi le roi Scorpion (roi égyptien vers 3200 av. JC) s’est-il fait enterrer avec 700 jarres de cet alcool princier ? Pourquoi le vin est-il d’abord arrivé en Europe ? Comment Bordeaux est-elle devenu la capitale de l’œnologie ? L’histoire est au cœur de ce livre. La science aussi. Fabrizio Bucella explique l’importance chimique de la levure dans la fabrication du vin. Il parle de l’apport capitale de Roger Dion dans la compréhension de l’œnologie. Plus étonnant encore, un chapitre sur l’umami explique en partie le succès quasi magique d’une boisson dont le succès n’a jamais été démenti.
Jamais ? C’est là que l’auteur s’interroge. Réchauffement climatique oblige, le vin serait-il un danger ? Sans doute. En tout cas, il est à la croisée des chemins ("Est-ce la fin du vin ?").
Outre des planches mêlant considérations sérieuses ("Comment bien accorder les plats et les vins ?") ou pas ("Comment parler des vins qu’on n’a pas bus ?") et illustrations potaches (non sans jeux de mots et calembours), Le livre consacre plusieurs pages sur l’opéra et le vin (Faust,La Traviata ou La Bohême pour les œuvres les plus connues).
Pas de prise donc de tête pour cet ouvrage savoureux. Les illustrations très pop et bourrées d’humour, elles aussi, font de ce livre une délicieuse en matière à l’approche des fêtes où le champagne coulera à flot, cela va sans dire.