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  • Bach total

    Enregistré à Dijon, cette Passion selon s. Jean de Jean-Sébastien Bach, mis en scène par la chorégraphe Sasha Waltz, entrera sans aucun doute dans les annales. Arte propose en replay cette incroyable vision jusqu’en juin prochain. Choc visuel et sonore garanti, pour public averti cependant.

    L’oratorio de Bach, conçu comme un ballet contemporain osé, intelligent et faisant la part belle au symbolisme, commence par cette incroyable scène de 11 danseurs et danseuses nues cousant leur propre vêtement – leur linceul, avons-nous envie de préciser – dans un silence monacal, si l’on excepte celui des machines à coudre.

    Et ce n’est que le début d’un spectacle total où la danse, les jeux exigeants des artistes et la mise en scène inventive et audacieuse de Sasha Waltz ne font que servir une œuvre à la fois profane et sacrée – elle s’appuie sur les Évangiles mais n’était pas destinée au culte. À la direction musicale, Leonardo García Alarcón et son orchestre sont parties prenantes, dans tous les sens du terme, de cette version vitaminée de la Passion de Jean. Que l’on  pense au "Von den Stricken meiner Sünden", interprété par un formidable Benno Schachtner ou à la lumineuse interprétation du "Ich folge dir gleichfalls" par Sophie Junker. 

    Des idées de mise en scène qui feront date

    Œuvre baroque, il fallait bien un spectacle baroque pour donner à ce chef d’œuvre créé en 1724 une nouvelle lecture. Sasha Waltz avait déjà proposé sa mise en scène à Liepzig, à l’occasion des 300 ans de cet opus intemporel.

    Il est évident que beaucoup hurleront au choix artistique d’un décor dénudé et d’acteurs et actrices qui ne le sont souvent pas moins. Que l’on adhère ou non, on ne pourra qu’applaudir aux idées de mise en scène qui feront date : la fameuse scène des machines à coudre (Ouverture), les bâtons symbolisant des instruments de supplice ("Christus, der uns selig macht"), les cadres figurant les croix ("Betrachte, meine Seel, mit ängstlichem Vergnügen")  et en général les performances des danseurs et danseuses lorsque les corps s’unissent, s’affrontent, se rejettent et emplissent l’espace. Le but de la chorégraphe ? Proposer une lecture moins sacrée qu’humaine. Le personnage de Jésus prend une figure symbolique et interchangeable, tantôt homme, tantôt femme – voire couple enlacé (le "Mein teurer Heiland, laß dich fragen" dans l’Acte IV). Sasha Waltz a volontairement choisi de faire de cette Passion une œuvre de notre époque, n’éludant pas un discours féministe, tout en parlant de souffrance, de sacrifice, de liberté et d’écrasement du faible par la force brutale – ici, politico-religieuse.

    Véritable coup de maître, ce spectacle mérite d’être vu et revu pour saisir tous les détails de la mise en scène, comme pour apprécier la maîtrise des danseurs et danseuses. Rien n’est laissé au hasard dans ce chef d’œuvre de création contemporaine pour servir la musique indémodable de Jean-Sébastien Bach. Du grand art total, assurément.  

    Jean-Sébastien Bach, La Passion selon saint Jean, par Sasha Waltz,
    Arte, 132 mn, Arte, 2024, Arte, jusqu’en juin 2026

    avec Sasha Waltz (Mise en scène et chorégraphie), Cappella Mediterranea dirigé par Leonardo García Alarcón, chœur de la Chambre de Namur, Opéra de Dijon
    https://www.arte.tv/fr/videos/119415-000-A/la-passion-selon-saint-jean-de-bach-par-sasha-waltz
    https://www.sashawaltz.de

    Voir aussi : "Pierre Boulez, le maître au marteau et à la baguette"

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  • Une route de la soie

    Intitulée The Silk Roads ("Les routes de la soie"), cette incroyable programmation, issue d’un enregistrement au centre de Création et de Formation "La Cure" à Lasselle-en-Cévennes entre 2023 et 2024, propose un voyage musical à travers les siècles, entre Chine, Moyen-Orient et Europe.

    Figure, pour commencer, la pièce la plus ancienne, Yuqiao Wenda. Ce Dialogue entre le pêcheur et le bûcheron a été compilé en 1560 par Xiao Luan. Le morceau illustre la philosophie bouddhiste sur l’immanence du monde et l’appel à la sagesse de l’homme humble, bienveillant et droit. Cette version a été arrangée par Zao Songguang et Dai Xiaolian en 2006. Une lecture moderne donc d’un morceau traditionnel mais qui en garde toute sa simplicité méditative. Dépaysement assuré pour cette première étape des Routes de la soie proposées par Indésens.

    C’est assez naturellement qu’on en vient à Oriental Puzzle, une création contemporaine du jeune compositeur chinois Sheng Song, largement mis à l’honneur du reste dans cet opus. À l’alto, Riuxin Niu s’empare avec une grande maîtrise d’une pièce puisant ses influences dans la musique traditionnelle et l’opéra chinois, comme dans l’écriture musicale occidentale. Cela donne un morceau à la fois hétéroclite – un puzzle, donc – et cohérent. Loin de tourner le dos à la musique traditionnelle, Sheng Song assume tout de ses influences, que ce soit avec Nay Improvisation, que Sheng Song propose dans deux versions ou dans les somptueuses variations sur Yangguan, un classique du répertoire chinois et adaptation du poème Adieu à Yuan Er en mission pour Anxi : "Je vous exhorte à vider une dernière coupe de vin / Au-delà de Yangguan, il n’y aura plus d’amis", dit la poétesse avec un mélange de résignation, de pudeur et de douleur cachée. L'un des plus beaux morceaux de l'album.

    Plus étonnant encore, Esquisses et Cariccios, toujours de Sheng Song, propose de se diriger vers l’Orient, un Orient mêlant traditions dans ses thèmes (Le Nil, Palmier-dattier, Le Livre des Morts, La Plume de Maât) et le modernisme grâce à sa facture musicale.      

    L’Orient est de nouveau présent, cette fois avec Shadi Hanna qui propose de faire un pont entre traditions méditerranéennes et innovation occidentale. On s’arrêtera avec plaisir sur l’envoûtant Sama’i Nahawand qui semble paradoxalement très familier à nos oreilles, avec son dialogue entre mandoline et instruments à cordes. Shadi hanna propose une autre pièce, Qanum Improvisation, dont les textures musicales font se rejoindre Orient et Asie.

    Le compositeur phare de cette Route de la Soie artistique est Maurice Ravel himself

    Ruixin Niu met à l’honneur un compositeur important du XXe siècle, Gamal Abdel-Rahim (1924-1988), un passeur de la musique égyptienne dans la modernité, avec sa Petite Suite, traditionnelle dans son essence et contemporaine dans sa manière de se jouer des sonorités et des rythmes. On pourrait dire autant de sa dépaysante Mandolin Improvisation.

    Vincent Beer-Demander parle de sa courte pièce Le Poudin Mange des Bambous comme d’une "miniature musicale qui évoque l’empire du Soleil Levant". Il est vrai que cette fantaisie s’empare avec bonheur des rythmes et des sons de la musique chinoise.

    Le compositeur phare de cette Route de la Soie artistique est Maurice Ravel himself, avec une orchestration extrême-orientalisante d’extraits des Contes de Ma Mère L’Oye (Pavane, Laideronnette). Ruixin Niu est à l’œuvre dans cette version plus envoûtante que jamais et qui donne au compositeur français un lustre des plus chinois. Une sacrée redécouverte ! 

    Place de nouveau avec la jeune génération avec deux morceaux de la compositrice française Florentine Mulsant. L’altiste chinoise Ruixin Niu et Pierre-Henri Xuereb, à qui a été dédié ce morceau, jouent son Chant pour viole d’amour et alto, op. 117. Chant d’amour certes, mais aussi étrange voyage comme si la compositrice nous prenait par la main pour un voyage à deux dans un havre de paix. Elle propose elle aussi des improvisations (Percussions Improvisation), nous menant cette fois en Extrême Orient, dans un morceau appelant à la méditation.

    Le traditionnel, le classique le contemporain ont largement leur place dans cet opus. Mais le baroque aussi, avec Ludovico Berreta, compositeur vénitien du XVIIe siècle dont on a découvert récemment un Canzon à quattro. Cette pièce est enregistrée ici pour la première fois. Il est singulier de voir Sheng Song reprendre à son compte cette merveille baroque pour en faire une chanson actuelle, s’inspirant et rendant hommage au XVIIe siècle italien, tout en y insufflant des éléments chinois.

    Au final, pour ce dernier morceau, comme d’ailleurs pour l’album toute entier, rarement modernisme, classique et traditionnel n’ont fait aussi bon ménage. On le doit en premier lieu à la locomotive de ce projet, la formidable altiste Ruixin Niu. 

    The Silk Roads, Ravel, Sheng Song, Abdel-Rahim, Mulsant, Ruixin Niu (alto), Indesens Records
    https://indesenscalliope.com/boutique/the-silk-roads

    Voir aussi : "Si la musique m’était contée"

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  • Leila et les Loups

    Les Cramés de la Bobine présentent à l'Alticiné de Montargis le film Leila et les Loups. Il sera visible les jeudi 28 août, dimanche 31 août à 18 heures, lundi 1er septembre août à 14 heures et mardi 2 septembre à 20 heures 30.  

    Leila, étudiante libanaise, voyage à travers le temps et l’espace pour réfuter la version coloniale et masculine de l’Histoire présentée par son amoureux Rafic. Son périple commence sous le Mandat Britannique des années vingt et finit dans la Guerre Civile libanaise. Survolant 80 ans d’Histoire, elle procède à l’excavation archéologique de la mémoire collective des femmes palestiniennes et libanaises et révèle leur rôle occulté. Au bout de son voyage elle réalise que le Patriarcat opprime également les hommes.

    Leila et les Loups, drame libanais de Heiny Srour avec Nabila Zitouni, Rafic Ali Ahmad, 2025, 90 mn
    Titre original : Layla wa z-zi’ab
    https://www.cramesdelabobine.org/spip.php?rubrique1594 
    https://cooperativedhr.fr/index.php/leila-et-les-loups

    Voir aussi : "Eephus - Le Dernier tour de piste"

     

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  • Du passé, ne faisons pas table rase

    Impossible ne rester insensible à Artdéco qui nous revient cette année avec un nouvel album, sobrement intitulé À Présent. Ce disque a été réalisé par Antoine Essertier (Vianney, Keziah Jones, Daran…). Cet opus est paradoxalement placé sous le signe du passé. Passé tout d’abord avec la facture pop-rock eighties et nineties, le musicien ne cachant pas son appétence pour U2 ou Serge Gainsbourg. On saurait difficilement le blâmer. Passé également avec les thèmes de ces 14 titres, dans lequel le souvenir, la nostalgie et la difficulté de tourner la page semblent être les dénominateurs communs.

    Il y a, pour commencer, le morceau qui donne son nom à l’opus. Dans À nouveau, ArtDéco fait le constat d’un couple en déshérence, tout en invitant à ne pas tourner la page : "Reprenons notre amour à zéro / Il serait temps qu’on se parle à nouveau". Et même lorsque départ il y a, pas question de couper totalement les fils "Voyage avec moi", chante-t-il dans le morceau éponyme. Cette invite au souvenir est reprise dans Ne m’oubliez pas : "Écrivez mon nom quelque part / Ne m’oubliez pas".

    On saluera la belle création qu’est Amour Winchester, jolie déclaration amoureuse en forme de jeu en plein Far West. Dans Astroman, cette fois c’est dans un espace imaginaire que nous transporte le chanteur, mais cette fois plus de gravité : "Foutu pour foutu / C’est trop tard / Tout est fini". En cette période d’été, on écoutera Palava non sans nostalgie : ce sont des souvenirs de plages qui intéressent ArtDéco, que ce soit à Juan-les-Pins, à Nice, à Monaco ou à Palavas, justement.

    On saluera la belle création qu’est Amour Winchester

    Un enfant sommeille derrière celle de l’artiste à l’œuvre dans une production musicale soignée. Il revient à ses promesses et ses secrets de gamins dans le morceau sensible Notre secret, redonnant vie à un amour d’enfance, comme pour le rendre immortel ("Dans mille ans j’te jure / Que je t’aimerai").    

    Cependant, parfois, c’est la mémoire qui fait défaut, à l’instar de Je ne m’en souviens plus. Tel n’est pas le cas de Louve, déclaration pour une mère capable d’effacer les "peurs" et "les ombres à chaque pensée de toi".

    Plus sombre et plus atypique dans cet album, dans le morceau 340 visages, c’est le chiffre 340 qui est répété en forme de mantra. Le titre rappelle ces visages de migrants noyés dans la mer, comme par les flux d’informations et souvent de préoccupations futiles (McDo, réseau, bécanes…).

    C’est un ArtDéco rock qui se déchaîne, moins sage, dans le singulier Schrödinger. Tout aussi engagé que la chanson précédente, l’artiste fait un triste constat : "Qu’est-ce qu’elle me manque ma vie d’avant", plus "insouciante". "Sans cesse on pratique la superposition quantique", constat-t-il encore, fataliste, philosophe et… un peu physicien.

    Après le plus léger Panama et le psychédélique et poético-humoristique Astroman, ArtDéco termine - presque - son album avec Loin des autres. Le musicien revient une nouvelle fois vers le passé, avec cette chanson en forme d’autobiographie et de confession, celle d’un garçon seul et "déraciné", issu d’un pays méconnaissable où "la forêt a brûlé". Voilà qui est, hélas, très d’actualité.

    L’album propose, en guise d’au revoir, une reprise pop des Moulins de mon cœur de Michel Legrand. Sans doute, le compositeur préféré de Jacques Demy aurait apprécié cette modernisation d’un grand classique de la chanson française. Le titre a en tout cas généré près de 4 millions de vues en quelques mois sur Internet.

    ArtDéco, À Présent, Active One / Remark Music / SMK Music, 2025
    https://www.artdecomusique.com
    https://www.facebook.com/artdecomusique
    https://www.instagram.com/artdecomusique
    https://ditto.fm/artdeco-a-present

    Voir aussi : "Altiera : ‘L’amour existe peut-être ailleurs, dans un autre univers, une autre dimension’"

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  • Where is Emmylou ? Emmylou is in the house

    Beaucoup connaissent Sidonie Bonnec. Elle officie sur France 2 chaque soir de la semaine avec Olivier Mine (et aujourd'hui Bruno Guillon) en animant le jeu Tout le monde a son mot à dire, avec un peps et une vitalité qui n’appartiennent qu’à elle. Or, elle dévoile cette année un nouveau visage, celui d’une romancière et auteure de polar. Et pas n'importe quel polar : du noir de chez noir.

    La fille au pair (éd. Albin Michel), c’est Emmylou, jeune femme de 18 ans, paumée dans sa Bretagne natale, avec des parents qu’elle ne supporte pas, des rêves de journalisme cadrant mal avec son quotidien et surtout le suicide d’une amie qui la laisse déprimée. Lorsqu’une de ses nouvelles copines lui parle de son expérience récente de jeune fille au pair dans une riche famille anglaise, Emmylou saute sur l'occasion. C’est l’occasion ou jamais de voir du pays, gagner un peu d’argent, tout en améliorant son anglais. Les premiers jours dans la villa cossue d’Hidden Grove, chez les White démarre au mieux : ses patrons sont charmants et les enfants attachants, en particulier le petit Simon, deux ans. Son frère aîné, Lewis, dix ans, montre les signes d’une sérieuse maladie. Bientôt, la jeune fille au pair perçoit l’indice que tout ne se passe pas comme prévu. Lentement, un piège se referme sur elle.      

    Pas mal pour un début

    Preuve que ce premier roman de Sidonie Bonnec a su convaincre, La Fille au pair a été Finaliste au Prix Le Point du Polar européen 2025 ainsi qu’au Prix Maison de la presse 2025. Pas mal pour un début, et qui n’est pas juste dû au pedigree de l’animatrice télé et journaliste. Journaliste comme le rêve d’Emmylou, l’adolescente se désespérant de sa vie bretonne – les origines de l’auteure. Le 4e de couverture parle de l’inspiration personnelle de ce thriller. On n’en saura pas plus – pour l’instant ?

    En attendant, voici notre fille au pair entre les griffes d’une famille pour le moins dysfonctionnelle. Mais n’en disons pas plus. L’autrice avance masquée en se mettant dans la peau de son héroïne, parfois agaçante, non dénuée d’humour, mais surtout émouvante et avec qui l’on tremble entre les murs d’Hidden Grove.   

    Cette histoire de piège sordide, de crimes cachés et de plans machiavéliques est aussi le récit d’une rédemption. Un roman à découvrir absolument. 

    Sidonie Bonnec, La fille au pair, éd. Albin Michel, 2025 
    https://www.albin-michel.fr/la-fille-au-pair-9782226497949
    https://www.instagram.com/sidoniebonnec

    Voir aussi : "Les vivantes et les autres"
    "Femmes, je vous hais"

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  • Des détectives, des vraies

    La première saison de True Detective, il y a 11 ans de cela, déjà, était entrée dans l’histoire des séries, avec les géniaux Matthew McConaughey et Woody Harrelson en flics cyniques et butées face à des crimes aussi tordus et cruels que religieux et métaphysiques.

    Il était difficile de faire mieux. D’ailleurs, les deux saisons suivantes n’avaient pas laissé de souvenirs impérissables. La saison 4, qui a débarqué il y a peu sur Max, pouvait inquiéter. Or, si elle n’a pas le lustre de la saison 1, elle réussit à en prendre le contre-pied, parfois avec maladresse mais souvent avec justesse. Ajoutez à cela un dernier épisode qui propose une conclusion étonnante et bien vue.  

    Après le climat moite de la première saison, la créatrice Issa López transporte de nouveaux détectives en plein Alaska, pendant une semaine de Noël à haut risque. Pour ne rien arranger à l’histoire, dans cette contrée arctique, la nuit polaire s’est abattue pour de longs mois. La police locale est chargée d’enquêter sur la mort de scientifiques d’une station de recherche, retrouvés nus et gelés. Liz Danvers et Evangeline Navarro sont chargés d’enquêter et font vite le lien avec la mort quelques années plus tôt d’Annie Kowtok, une militante de la tribu Iñupiat. Sa langue coupée est en effet trouvée sur la base polaire. 

    Mais qu’est-il arrivé à cette foutue langue ?

    Pour cette saison, c’est Jodie Foster qui fait figure de star, dans un rôle peu enviable de policière tyrannique. À ses côtés, Kali Reis fait plus que tirer son épingle du jeu. C’est une vraie révélation, au point que le couple qu’elle forme avec Jodie Foster semble évident.

    True Detective est de retour avec ses fondamentaux : des crimes sordides et mystérieux, des policiers aux sombres personnalités, une atmosphère lourde avec son lot de mysticisme. Et ici, un contexte très actuel mêlant enjeux climatiques et propos féministes. Que les deux flics soient des femmes est tout sauf un hasard.

    La série prend son temps, campant des personnages paumés, dans un décor rarement vu au cinéma ou à la télé : celui d’une petite ville en Alaska, battue par le froid glacial et le blizzard. Avec cela, une nuit perpétuelle – si on excepte toutefois une singulière et courte scène où une lumière blafarde apparaît derrière l’agent Navarro. Une erreur ?

    Les fans se sont interrogés sur la destinée de la langue coupée d’Annie. Sans faire de spoils, on pourra regretter des zones d’ombres – bon, il est vrai que nous sommes en pleine nuit polaire – et les informations laissées sous silence – la relation par Internet d’Hank Prior avec sa "fiancée" russe, le passé de Liz Danvers et l’ultime image de la série. Admettons. C’est plus problématique s’agissant d’un élément de l’enquête, qui a fait dire à de nombreux fans : "Mais qu’est-il arrivé à cette foutue langue ?"

    Ceci étant dit, voilà une très bonne série, qui nous réconcilie quelque peu avec le projet True Detective. Une saison 5 est d’ailleurs déjà programmée. Cool.

    True Detective : Night Country, série américaine de Issa López, avec Jodie Foster, Kali Reis, Fiona Shaw, Christopher Eccleston, Finn Bennett, John Hawkes et Isabella Star LaBlanc, HBO Max, 6 épisodes, 2025
    https://www.hbomax.com/fr/fr/shows/true-detective

    Voir aussi : "Un détective, un vrai"

     

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  • Si la musique m’était contée

    Il faut d’abord saluer la bonne idée de cet album entièrement consacré à des contes mis en musique par Dana Ciocarlie au piano et Vincent Figuri en récitant. Ajoutons pour être complet la participation du violoniste Christophe Giovaninetti et du clarinettiste Philippe Cupper.  

    Avant de nous intéresser à Ma Mère L’Oye, le chef d’œuvre de Ravel, parlons du premier conte de l’opus, aussi peu connu que son compositeur. Nikolaï Tcherepnine (1873-1945) a terminé Le Conte du pêcheur et du poisson en 1917, juste avant son exil de la Russie communiste. Il a mis en musique un texte de Pouchkine, souvent mal traduit par Le Petit poisson d’or. Cette histoire de poisson magique, d’un pêcheur bon et sage et de sa femme acariâtre a été mise en musique dans un style romantique typique de la la musique russe de la fin du XIXe et du début du XXe siècle. Le talent de conteur de Vincent Figuri hypnotise dans ce joli conte moral, à découvrir absolument dans cet enregistrement de Salamandre.

    C’est Vincent Figuri qui a écrit le texte pour Ma Mère L’Oye. Il est vrai que cette petite merveille de Maurice Ravel (1875-1937) ne pouvait pas être absente du programme de l’album. Pour cette composition délicate et instrumentale datant des années 1908-1912, Vincent Figuri a imaginé quatre textes autour des figures légendaires de La Belle au bois dormant, du Petit Poucet (également présent plus tard dans l’opus), de Laideronnette et de la Belle et la Bête. Le talent de narrateur de Vincent Figuri est porté par des musiciens respectant la composition hyper sensible de Ravel, en particulier dans cette merveille qu’est Le jardin féerique – sans texte.

    "Ah! pauvre petite innocente, que de transes, que d'angoisses pour ce premier aveu d'amour"

    Reynaldo Hahn (1874-1947) a 18 ans lorsqu’il compose son délicat Clair de lune, vraiment typique de cette musique française des années 1890-1900. Sur des mélodies simples, Louis Montégut a imaginé un texte à la fois naïf et romantique – et non sans humour – sur deux jeunes gens s’éloignant pour batifoler en paix. Mais, même au milieu d’une nature plus bruyante qu’on ne le croie, s’aimer est-il encore possible ? "Ah! pauvre petite innocente, que de transes, que d'angoisses pour ce premier aveu d'amour."

    La mère et l’enfant d’Edouard Lalo (1823-1892), de la même période, doit sa présence à son titre. Ces deux pièces instrumentales ont été transcrites par Florent Schmitt (dont on regrette qu’il soit toujours si méconnu) pour le violon et le piano. Elles ont la particularité de ne pas être accompagnées de textes. L’auditeur ou l’auditrice gouttera le travail de mélodie et la facture néo-romantique de ces deux morceaux rares.  

    De Marcel Landowski (1915-1999), on connaît surtout son conte La Sorcière du placard aux balais. Or, c’est une œuvre moins connue qui est proposée ici, à savoir une déclinaison du Petit Poucet : Le Petit Poucet joue du piano. Dans le livret de l’album, Vincent Liguri précise que Landowski propose ici une composition à vocation ludique autant que pédagogique. "Chaque pièce développe un travail sur les gammes, le jeun détaché, le legato, les notes répétées…" Cela donne une version du Petit Poucet étonnante et très moderne, par un compositeur contemporain qui a toujours revendiqué son attachement à la musique classique, tonale et à sa liberté. Voilà qui est parfait pour clore cet enregistrement attachant et qui restera longtemps dans les têtes.

    Tcherepnine, Ravel, Hahn, Lalo et Landowski, Contes
    (Conte Du Pêcheur Et Du Poisson - Ma Mère L’Oye,
    Au clair de lune, La mère et l’enfant, Le Petit Poucet joue du piano)
    ,
    Dana Ciocarlie (piano) et Vincent Figuri (narrateur), Salamandre, 2025

    http://www.salamandre-productions.com
    http://www.vincentfiguri.eu
    https://www.danaciocarlie.com

    Voir aussi : "Satie Cool"
    "Loïe Fuller sur les pas de Salomé"

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  • Eephus - Le Dernier tour de piste

    Les Cramés de la Bobine présentent à l'Alticiné de Montargis le film Eephus - Le Dernier tour de piste. Il sera visible les jeudi 21 août, dimanche 24 août à 18 heures, lundi 25 août à 14 heures et mardi 26 août à 20 heures 30.  

    Alors qu’un projet de construction menace leur terrain de baseball adoré, deux équipes amatrices d’une petite ville de la Nouvelle-Angleterre s’affrontent pour la dernière fois. Face à cet avenir incertain les tensions et les rires s’exacerbent, annonçant la fin d’une ère de camaraderie.

    Eephus - Le Dernier tour de piste,
    drame américain de Carson Lund avec Keith William Richards,
    avec Frederick Wiseman, Bill Lee, 2025, 99 mn

    Titre original : Eephus
    https://www.cramesdelabobine.org/spip.php?rubrique1592
    https://capricci.fr/product/eephus 

    Voir aussi : "Grand Tour"

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