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Moi aussi j’ai succombé à la littérature scandinave, toujours très en vogue.
Ce roman suédois, n’est pas à proprement parler un polar même s’il a sa dose de noirceur (et combien !). L’histoire suit quatre jeunes femmes, toutes belles. Il y a Léa, la galeriste ambitieuse, Laura, l’écrivain paumée, Mia, l’ancienne danseuse et Iris alias Siri, la photographe brillante et cynique. Les trois premières ont pour point commun d’avoir été manipulées par la quatrième. Une vengeance perverse à souhait se trame contre cette dernière.
Dans un style magnifique et audacieux, l’auteur suit une galerie de personnages entre la Suède et Paris sur une période s’étalant entre le milieu des années 80 et 2006. L’intérêt de ce livre réside moins dans la narration de cette vengeance que dans le parcours croisé de ces femmes, détruites et humiliées à un moment ou à un autre par une autre femme.
À la première écoute de Vendetta, le nouvel EP de Brune, son troisième, la première réaction est de dire : quel bonheur de retrouver du rock revigoré et féminin, mené avec une telle maîtrise !
Brune, c’est du solide, du brut à la PJ Harvey, de la braise et du sentiment chauffé à blanc, à l’instar de cette vibrante déclaration d’amour qu’est "C’est tous les jours" ("Reste là / Ton corps est chaud comme la braise / Reste le même / Je veux te mordre tant je t'aime") ou encore l’appel désespéré à l’amour et à "l’émotion dans les hanches" de cet autre morceau, "Des vagues et des lunes" ("Viens faire trembler les murs / Vas-y fais monter le mercure / Quand tout me lasse et me torture"). De vrais beaux et puissants messages, et pourtant, en amour, "pourquoi tout est si complexe ?" s’interroge l’artiste tout haut.
L’émotion dans les hanches
Des sons électros viennent viennent autant revivifier le rock de Brune que les paroles engagées et bien de notre époque dans laquelle l’artiste lyonnaise chante les états d’âme d’une fille passablement énervée par les mecs – et bien décidée à prendre sa revanche. C’est "Vendetta", un cri de colère sans concession, avec ce je ne sais quoi du timbre des Brigitte : "Et j’irai claquer tout ton fric / Dans des boites et champagnes à gogo / Et j’irai m’planquer à 10 000 bornes / T’auras qu’à pleurer dans les cuisses de ta conne".
La sincérité est sans doute ce qui caractérise le plus Brune. "Devenir une autre", comme elle le chante dans le dernier morceau ? Très peu pour celle qui va à l’essentiel : aimer, vivre, rassurer et trouver la douceur dans les bras de son enfant ("À l’abri"). Ainsi pourrait être la délicate, doux et émouvante conclusion de cet EP, à la fois brillant, revivifiant et fort bien conçu. Du bel ouvrage.
Bien entendu, les auteurs et, surtout, autrices, seront les vedettes de ce salon, avec notamment Brigitte Lahaie, Camille Aumont-Carnel, Marilyn Jess, Octavie Delvaux, Les Sapphos, Léa Celle Qui Aimait, Alexandra de Taddeo (L’Amour), Lucile Bellan (Polyamoureuse), Dr. Kpote (Pubère la vie) ou Eva Delambre. Avec la sortie récente du beau livre Hold-Up 21 (éd. Anne Carrière) auxquelles 20 autrices ont participé, et Immorales (éd. La Musardine), qui a fédéré 10 autrices, la littérature érotique met à l’honneur la sororité et le narratif féminin autour de l’amour et du sexe en cette rentrée littéraire 2023.
Mais, cette année, que nous réserve plus précisément ce salon ?
Le salon littéraire le plus sexy, le plus insolent et le plus pertinent de cette fin d’année
Dans la lignée du succès de 50 Nuances de Grey, la littérature érotique féminine met en scène des rapports de pouvoir, un sujet qui a toujours la côte. 25% des autrices du salon ont déjà écrit de la littérature BDSM, en tant que soumise ou domina. Seront présentes : Alda Mantisse (La Loi du Talon), Eva Delambre (Plurielles), Sania Saint-Germain (Intimes Connexion), Axelle de Sade, Octavie Delvaux (Immorales), Chloé Saffy (La Règle de Trois), Julie-Anne de Sée (Désir et Désordes).
Parmi les conférences et débats proposés, il faut citer celle de Brigitte Lahaie, "Trouver les mots justes pour parler aux Français" de Brigitte Lahaie, les interventions de Stephen Carrière et Alice Groult pour un échange sur le thème : "Éditeur/autrice, comment fonctionne ce duo ?" ou encore l’intervention des Sapphos "La visibilité queer dans la littérature érotique".
À l’instar des précédentes éditions, le salon de la littérature érotique accueille avec beaucoup d’intérêt le discours d’influenceurs "sexo" qui ont de l’impact auprès d’un jeune public (20 - 35 ans). En particulier Camille Aumont-Carnel (678K abonnés sur Instagram, autrice de Les Mots du Q), Les Sapphos (60K abonnés sur Instagram, autrices du Kamasutra Queer) ou encore Léa Celle Qui Aimait (43,8K sur Instagram, Et tes soupirs entre les draps).
À cela s’ajoutent des défis d’écriture érotique, avec des cadeaux à la clé, des stands originaux et des animations insolites. (L’institut de beauté littéraire par l’atelier d’Éros, des histoires érotiques hot par Le Son du Désir, sans oublier le tarot des fantasmes par Sweet Paradise).
Rendez-vous donc le dimanche 19 novembre à La Bellevilloise (Paris 20e) pour le salon littéraire le plus sexy, le plus insolent et le plus pertinent de cette fin d’année.
Aloysius Chabossot sévit actuellement sur le web, dans un blog (http://comment-ecrire-un-roman.eklablog.net). Ce livre en est le versant littéraire. Usant d’un humour ravageur, Aloysius Chabossot (il s’agit bien entendu d’un pseudonyme) publie ce vade-mecum pour tous les écrivains en herbe rêvant d’être publiés (et, si possible, lus).
Au menu : conseils d’écriture, pièges à éviter dans la conception d'un roman (et uniquement le roman), outils indispensables (Internet) ou à proscrire (logiciels d’écriture), considérations sur les éditeurs (traités avec pas mal de bienveillance) ou les agents littéraires…
Au final, ce bouquin enfonce pas mal de portes ouvertes et est plutôt à lire au 33ème degré. Lorsque l’on referme ce manuel faussement présomptueux, plutôt bien vu et vraiment drôle, on ne peut que se poser la question : qui est Aloysius Chabossot ?
D’emblée, une question se pose à la lecture de Tous des Spécimens, l’un des romans que propose Plon cet automne : qui est Italique, le mystérieux auteur de ce récit canin - et artistique ?
Puisque nous n’en serons (pour l’instant ?) pas plus, contentons-nous de dire qu’Italique est le nom d’un carlin adopté par un écrivain parisien, tout aussi anonyme. Une vie de chien pas franchement désagréable, entre promenades dans les beaux quartiers, vie mondaine avec petits fours et caresses à gogo, plateaux télé et longues journées passées avec un maître scotché devant son ordinateur.
Mais qu’elle est l’activité étrange de ce maître aimé, se demande le paisible chien en début d'ouvrage ? Quelques semaines après avoir été adopté, la révélation apparaît chez le jeune chiot, cependant dubitatif : "Mon maître est donc romancier. Pourtant, toujours fourré à droite à gauche, il n’écrit jamais. Il n’a pas écrit depuis mon arrivé. Je l’entends toutefois souvent dire qu’il a un texte à finir, un livre à rendre, mais il préfère passer ses après-midi en ma compagnie."
Drôle de vie de cabot, et surtout drôle de vie d’écrivain. Lorsque son maître commence à écrire, Italique est le témoin du début d’une savoureuse aventure artistique mais aussi une année littéraire. L’écriture du roman de son maître, les sollicitations des médias et des bloggeurs, les discussions avec l’éditeur, la correctrice et l’imprimeur, les soirées VIP, les salons littéraire et les échanges riches avec les lecteurs ("[Mon maître] répond aux questions indiscrètes, conseille, s’épanche, reçoit des histories par dizaines car le temps d’une soirée, il n’est plus un romancier, il est un ami, un infirmier, un psy").
Fausse chronique et récit imaginaire d’un chien pas cabot pour deux sous
Inventer des histoires, l’animal en est certes capable, mais il ne peut que constater que l’activité de son maître, tout à son roman et "assigné à domicile" prend le pas sur les gamelles, les caresses et les promenades. Les activités de son maître ne sont pas sans conséquence sur le carlin lui-même et son intelligence, pas peu fier d’écrire : "Vous me direz, parce que je vous vois venir : « Pour un chien, celui-là parle bien. Il parle comme un homme, il s’exprime bien, façon grand conteur ». Et ce n’est pas ma faute. C’est grâce à mon maître qui écrit et que j’écoute avec dévotion comme un disciple".
Le brave cabot regarde avec un mélange d’effarement, d’ironie et de fascination l’étrange activité de son maître qui ne se sépare jamais de son chien. Drôle de spécimen ! Un animal qui assiste aux discussions entre lui et sa libraire comme aux échanges avec ses lecteurs. Aimant ("J’aime mon maître. J’aime mon maître beaucoup, intensément, à la folie…"), Italique sait aussi être lucide, contredisant son physique peu avantageux – ses bourrelets et ses yeux globuleux. Il se montre même sévère lorsque son maître le délaisse pour son travail ou ses rendez-vous, lorsqu’il se montre capricieux avec l’écriture.
Fausse chronique et récit imaginaire d’un chien pas cabot pour deux sous, Tous des Spécimens est aussi une déclaration d’amour pour un métier aussi exigeant que mal payé (on pense à l’épisode de la pièce de deux euros), qu’Italique exprime ainsi : "[Mon maître] fait vivre ses personnages, réinvestit le monde qu’il a construit, monté de toutes pièces, le temps de l’écriture".
Et si, plus qu’un écrivain, ce maître chéri n’était finalement pas un sage ?
Disons-le d’emblée : le journal intime, genre littéraire qui a connu ses lettres de noblesse par le passé (que l’on pense à ceux des Frères Goncourt, de Paul Léautaud, d’Anaïs Nin ou encore de Franz Kafka) a été remisé aux oubliettes, balayé par les blogs et autres publications sur les réseaux sociaux. Autant dire que l’on ne peut que saluer l’audace de Delphine Bell qui, avec Inattendu (éd Le Lys Bleu), propose un journal s’étalant de mars à octobre 2020.
Le lecteur l’aura deviné tout de suite : cette période correspond à la période de la crise sanitaire du Covid et au confinement, une période atypique et qui a marqué les esprits : "Le chant des oiseaux est strident, très clair et il règne une nouvelle qualité de silence, presque effrayant. Non, l’humanité est encore là…" Le confinement et la parenthèse de toute vie sociale et professionnelle est-elle une chance ? Pas si simple. "Je me lève de plus en plus tard, nous nous couchons de plus en plus tard. Les horaires nous appartiennent, ce qui donne un sentiment factice de liberté. Peut-être que faire semblant empêche de sombrer."
Une profondeur humaine et tragique
Delphine Bell raconte au quotidien ces mois passés, enfermée avec ses proches, ressassant ses souvenirs, méditant sur sa vie, sa famille, ses amis, son destin, et sur le "catastrophisme éclairé" que lui offre notre période actuelle – et en particulier cette "inattendue" année 2020.
La pandémie, avec son lot de masques, de télétravail, de peur de l’autre et d’enfermement imposé ("Le temps s’est désorganisé", "Nous manquons tous de repères") permet à moins à Delphine Bell de se concentrer sur l’écriture ("Mes cahiers m’attendent", "Je nage, je surnage, j’écris des pages…"), à commencer par son compagnon, sa famille ("Avec Mat, nous inventons des fêtes…") et ses parents. Son père, en maison de retraite, est au centre des préoccupations de l’auteure, mais il y aussi sa mère, disparue quelques années plus tôt. La douleur est tangible dans ces pages. Le deuil et le manque rythme les jours, les semaines et les mois de la diariste, donnant à cette période de confinement et de déconfinement une profondeur humaine et tragique.
Singulier journal intime, dans laquelle Delphine Bell ose un chapitre, inattendu, justement : une chronique imaginant le 1er août 2030…
Et si, face à cette "fausse liberté" qu’a été le confinement, la survie ne venait pas de l’écriture ? Elle est une "vraie arme, elle élargit les possibles, fixe le marbre de [ses] souvenirs, car qui sommes-nous à part des bribes de mémoire ?"
Le narrateur de ce roman est Joey, un cheval. Acheté au début du XXème siècle, il devient le fidèle compagnon de son jeune maître Albert. Mais la première guerre mondiale se déclenche et Joey est vendu comme cheval de guerre à l’Armée britannique. Il rejoint bientôt le front français et vit les horreurs de ce conflit, du côté allié comme du côté allemand.
Cheval de Guerre se dévore d’une traite. Ce grand roman pacifiste parvient à rendre absurde toute idée de guerre en se plaçant du point de vue d’un animal. Un livre qui devrait être étudié dans toutes les écoles !
À noter que Cheval de Guerre a fait l’objet d’une adaptation cinématographique de Steven Spielberg, rien que ça !
On peut aisément se tromper dans les premières pages du roman de Gilles Paris lorsque l’on découvre la magnétique, magnifique et insaisissable actrice Belle Kaplan. S’agit-il d’un biopic romancé d’Audrey Hepburn, comme le laisse suggérer la couverture du livre Les 7 vies de Mlle Belle Kaplan (éd. Plon) ou encore le récit d’une comédienne actuelle tombée dans les oubliettes de l’histoire du cinéma ? Rien de tout cela, car le roman se passe bien de nos jours. Il est question de portables, de réseaux sociaux, d’influenceurs et surtout de la machine médiatique si caractéristique de notre époque. Pour autant, la figure de l’actrice de Diamants sur canapé n’est pas absente du roman, comme le dit la narratrice elle-même : "J’imitais Audrey Hepburn dans Vacances romaines. Je ne peux pas m’empêcher ce mimétisme. J’ai vu des centaines de films, qui ont toutes inspiré mes attitudes, mes poses, ma façon de jouer."
Belle Kaplan fait figure de météore. Découverte dans le film d’époque – et imaginaire – États Généraux, elle enflamme le public et les critiques avec le long-métrage suivant, et tout aussi fictif, Incendiée. Gilles Paris construit une de ces stars de cinéma à la fois adulée, admirée, jalousée jusqu’à l’insulte, et finalement malheureuse.
Et si "l’énigmatique" mademoiselle Caplan ne désirait pas plus que tout retrouver la paix et un lointain amour qu’elle n’a plus jamais connue par la suite ? La solution pourrait bien être dans son passé à Québec, un passé que peu de personnes connaissent en réalité. Gilles Paris ne nous le raconte.
"Je n’ai rien d’une diva, mais ma présence intimide réellement"
Construire de A à Z un personnage fictif – certes, non sans références et modèles – est sans doute le travail le plus passionnant de tout romancier et romancière. Ajoutez à cela un milieu fascinant. Pour Belle Kaplan, Gilles Paris semble dédaigner le milieu du cinéma, des plateaux télé, des soirées prestigieuses et des scandales médiatisés pour préférer entrer dans l’âme d’une femme qui a eu de multiples vies.
Orpheline, celle qui se fait appeler tour à tour Grâce, Paradis, Talia puis Belle, a été recueillie, ainsi que son ami et âme sœur Ben, par un couple violent, les Matuchet, avant que ceux-ci ne décèdent. La suite, c’est une vie de chapardages, la rencontre avec Pierre, son grand amour, puis son entrée dans une autre vie, celle des call-girl. Sa souteneuse, Madeleine, en fait sa préférée et l’envoie aux quatre coins du monde auprès de richissimes clients. Elle y découvre un autre visage de la violence, du cynisme et des humiliations faites aux femmes. Viendra ensuite le cinéma et le succès mondial.
"Je n’ai rien d’une diva, mais ma présence intimide réellement", avoue un moment Belle Kaplan, à la recherche finalement d’une forme de simplicité, de celle qu’elle a connue avec Pierre. N’a-t-elle pas fait d’un modeste machiniste, à l’ordinaire prénom de Régis, un de ses amants ? "J’aime surtout contrôler ma vie", écrit-elle encore. Pas évident lorsque les journalistes, les fans et les influenceurs scrutent les moindres de vos faits et gestes.
C’est donc vers le passé que se tourne la star, admiratrice d’Audrey Hepburn, Rita Hayworth ou Tippi Hedren, et qui a "l’âge de Sharon Stone" au moment où elle écrit. Elle a vu partir Pierre, puis son "frère d’armes" Ben, disparu lui aussi du jour au lendemain. Le roman se veut également une enquête policière pour retrouver leurs traces.
Gilles Paris suit le chemin intérieure de cette artiste jusqu’aux derniers chapitres qui annoncent ce que sera son but : la liberté d’une femme meurtrie.