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  • Du côté de chez Mozart

    Allez, un petit crochet du côté de Mozart avec ce cinquième et dernier volume d’une intégrale de ses sonates pour piano par Jean Muller. On retient son souffle et on se laisse porter par les sonates n° 14, 5 et 18 du compositeur autrichien. 

    Le pianiste luxembourgeois a choisi de commencer son enregistrement par la Fantaisie K475 Sonate n°14, assez tardive (elle date de 1785) et fortement influencée par Bach et Haendel. Sans ostentation, Jean Muller déploie les lignes mélodiques de Mozart. Il s’en empare avec douceur et élégance jouant des silences, tant il est vrai, comme le dit une célèbre expression, que "le silence qui succède à Mozart est encore du Mozart". 

    La véritable entrée en matière de l'opus commence avec la Sonate pour piano en ut mineur K. 457. De la même période que la Fantaisie (1784), elle a une facture mozartienne bien reconnaissable. Jean Muller s’empare du Molto allegro avec ce qu’il faut de (fausse) légèreté et d’élégance. On se laissera porter par un Adagio comme suspendu. Ici encore, les silences et les pauses font loi.  

    On parlait de fausse légèreté. Le troisième et dernier mouvement de la Sonate K 457 ne fait pas exception à la règle. Derrière une certaine joie de vivre, pour ne pas dire de l’allégresse, la mélancolie n’est pas absente de l’Allegro assai dont les mouvements virevoltants sont comme laissés en suspens, contrariés.  

    Les silences et les pauses font loi

    La Sonate K283 en sol majeur fait partie des œuvres de jeunesse de Mozart. Il s’agit d’une des six sonates, dites "de Munich", composées lors d’un de ses voyages en Allemagne. Il a à l’époque 18 ans mais déjà une solide expérience et une renommée européenne. Le prodige et prodigieux jeune compositeur étincelle dès les premières mesures d’un Allegro virevoltant. Jean Muller s’en empare avec une gourmandise certaine, y compris dans le charmant mouvement lent Andante, plus subtil que la première écoute ne le laisse a priori penser. La ligne mélodique pure et la simplicité en font un moment intime, au point sans nul doute d'impressionner les contemporains de Mozart dans les salons aristocrates de l’époque. Respectant la forme classique de la sonate, Mozart termine par un mouvement rapide, Presto. Il faut de la technique et de la virtuosité pour mener à bien cette partie à la fois compliquée et passionnante.  

    Ce dernier volume de l’intégrale des sonates de Mozart par Jean Muller se termine par la La Sonate pour piano n° 18 en ré majeur K. 576. Composée en 1789 Il s’agit de la dernière sonate de Mozart. Il s’agissait à l’origine d’une commande de six sonates pour la princesse Frédérique-Charlotte de Prusse. C’est la seule qui ait été écrite par le compositeur autrichien. Cette sonate dite "de la chasse" apparaissait à un Mozart, sans doute un peu blasé, comme une œuvre "facile". En réalité, dès la première écoute elle apparaît comme d’une complexité redoutable et demandant une grande virtuosité. Jean Muller cavalcade dans le mouvement Allegro, tendu, rapide et semblant nous entraîner dans une partie de chasse endiablée. Pour l’Adagio, Mozart fait le choix de l’émotion - avec un grand "é". De la retenue, de longues respirations mais aussi une profonde mélancolie dans ce mouvement, à une époque où la situation de Mozart s’aggrave. Il est endetté, produit moins et doit déménager pour raisons financières. Le compositeur n’a plus que trois ans à vivre. Dans cet Adagio, Mozart noie sa profonde mélancolie dans une écriture harmonique toujours étincelante. L’enregistrement se termine par un Allegretto d’une belle densité, menée par un Jean Muller impérial. 

    Mozart, Piano Sonatas vol. 5, Jean Muller (piano), Hänssler Classic, 2025
    https://www.facebook.com/pianistjm
    https://www.pianistjm.com
    https://haensslerprofil.de

    Voir aussi : "Haydnissimo !"
    "Franck par Lazar"

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  • La vie made in Galiana

    C’est sur une facture rock que début le dernier album de Paul Galiana, le bien nommé De la vie donnant son titre à l’opus, véritable cri contre les religions et hymne pour le vrai, "sans encens".

    La fraîcheur est évidente dans cet album pop-rock sur instruments acoustiques mais il y a aussi de la nostalgie (Ledru-Rollin, Le Signal, souvenir d’un lieu de son enfance, ou encore la ballade Entre le fleuve et la rivière), voire du spleen (le country-folk En ligne), rendant l'album De la vie immédiatement attachant. Pour autant, pas question de apitoyer sur son sort. En forme de bilan, ce nouvel opus de Paul Galina se veut celui d’une bande d’amis partis se frotter au monde, à l’instar de son duo avec Clément Verzi, Nous défendrons l’automne.

    L’un des meilleurs morceaux de l’album, Ta place, un des plus personnels titres, que le musicien consacre à son père, non sans amertume : "Tu n'es pas entré dans ce couplet / Tu n'as pas trouvé ta place / Et sans merci, sans s'il vous plaît / Tu as regagné cette ride dans ma glace". Pour autant, Paul Galiana n’a pas choisi d’en faire un morceau triste, comme il le dit lui-même : "Il était important pour moi que la fin du morceau soit presque festive, avec une belle bande de collègues et ami(e)s venu(e)s poser de joyeux “La la la”".

    Fin observateur

    La chanson française se marie avec le blues dans Genghini blues. L’étrange titre fait référence, les fans du ballon rond le savent sans doute, à Bernard Genghini, joueur et entraîneur de football, "fier et discret" et qui évoque des souvenirs d’enfance, de sport, de pelouses, de compétitions le dimanche et finalement de petits bonheurs ineffaçables. Un joli hommage pour l’ancien jour de Sochaux et le quatrième joueur de l’emblématique "carré magique".

    C’est un autre hommage que propose Paul Galina avec La fille du train pour Tallinn. Cette fois c’est l’Europe de l’Est qui est au cœur de cette chanson parlant d’exil, d’amitié et de guerre. L’auditeur aura évidemment en tête la guerre en Ukraine ("Tu t'es enfuie d’une ville à vif / De plaies de cratères de bombes de mines / - Va plutôt voir et raconter ce qui se vit à Kyiv").

    Dans Punchline, le chanteur laisse parler son agacement et à la vanité de la communication à sens unique : "C'est ta punchline, c'est un mic-drop / Tu ne parles pas pour qu'on te réponde / C'est ta punchline pour me dire stop / Pourquoi m'écouter ? Autant rester dans ce monde / Des punchline". Il est comme ça, Paul Galiana. Il suit sa route, tranquillement, avec bienveillance. Il le chante très bien dans le délicat et irrésistible Le goût de l'horchata ("Je suis celui qui naît, qui vit, qui tangue / Entre les hauts, les bas / Je suis celui qui garde au coin de la langue / Le goût de l'horchata").

    Paul Galiana est un fin observateur de ses contemporains, à l’image de l’incroyable Jeanne Pardon, portrait touchant et cruel d’une femme "innocente et de bon fond". Dans La main qui tremble, le musicien laisse parler sa sagesse et revendique son droit au doute et à ses interrogations ("Comment faites vous, sans faiblir / Sans bleus à l'âme et sans blessure / Sans boule au ventre, sans faillir / Et le geste sûr").

    Autre lieu, autre titre. Dans Sans Paris, c’est Bruxelles que chante Paul Galiana, sur les traces de Brel. Ce dernier titre folk se veut une jolie déclaration d’amour : "Mais je suis bien ici / Sans Paris / Infidèle / Elle me pardonnera / Quelques jours avec toi / Bruxelles". 
    Attachant Paul Galiana.   

    Paul Galiana, De la vie, 2024
    https://www.paulgaliana.com
    https://www.facebook.com/paulgalianamusique
    https://www.instagram.com/paulgalianamusique

    Voir aussi : "Électroband"

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  • Liszt amoureux

    Si Beethoven a été le père fondateur du Romantisme et Schubert le jeune disciple surdoué, Liszt en a été le maître virtuose tout autant que le gardien du temple. 

    Titien Collard s’est lancé pour son premier album solo dans un programme exigeant, ambitieux mais aussi passionnant autour du compositeur hongrois. C'est le troisième mouvement des Harmonies poétiques et religieuses qui ouvre l’opus. Le romantisme européen n’a jamais aussi bien porté son nom que pour ces pièces composées en Ukraine au milieu du XIXe siècle et inspirées de poèmes de Lamartine. À l’époque, Franz Liszt file le parfait amour avec  la princesse Carolyne de Sayn-Wittgenstein qui fut sa compagne de 1847 à 1861.

    Titien Collard a choisi de jouer la deuxième pièce, Bénédiction de Dieu dans la solitude. Il s’en empare avec maîtrise et ce souffle romantique oscillant entre retenue, exaltation et religiosité. Liszt s’est inspiré de ces vers de Lamartine : "D’où me vient, ô mon Dieu, cette paix qui m’inonde ? / D’où me vient cette foi dont mon cœur surabonde ? / À moi qui tout à l’heure, incertain, agité, / Et sur les flots du doute à tout vent ballotté, / Cherchais le bien, le vrai, dans les rêves des sages, / Et la paix dans des cœurs retentissant d’orages ?", Solitude). On peut saluer l’audace de Titien Collard d’avoir choisi un programme romantique des plus exigeant et de s’en proposer une interprétation fluide, lumineuse et non sans puissance (Allegro energico).

    Pianiste expressivo, virtuoso e colorato

    L’enregistrement inclut la Sonate pour piano en si mineur S. 178. D’une très grande complexité – nous pourrions même employer le terme de "modernité" – cette sonate bouleverse les règles. Si Titien Collard la présente sous la forme classique de trois mouvements (Lento assai - Allegro energico, Andante sostenuto et Allegro energico), en réalité Liszt l’a imaginée d'un seul tenant. Cette pièce fait figure d’œuvre majeure dans la carrière du musicien hongrois comme dans le répertoire romantique. Tour à tour austère, exacerbée, sombre et méditative, la Sonate en si mineur s’écoute comme une construction architectonique et musicale ambitieuse à laquelle Titien Collard se frotte avec aplomb et justesse. "Œuvre gigantesque d’une seule cellule", selon les mots de Richard Strauss, cette pièce importante illustrant une période heureuse dans la vie amoureuse de Liszt invite à la méditation et au voyage intérieur (la partie Andante sostenuto).  

    Pour terminer cet album Liszt, Titien Collard a fait le choix de proposer les Consolations S. 172, également appelées Six pensées poétiques. Le court, gracieux et "tube" qu’est l’Andante con moto introduit les six pièces tout aussi romantiques (Un poco più mosso). L’auditeur retrouvera avec plaisir cet autre grand classique qu’est le mélodique et méditatif Lento, quasi recitativo que Titien Collard interprète avec une retenue bienvenue. La noirceur n’est pas absente dans ces Consolations que certains disent inspirés, de nouveau, d’un poème éponyme de Lamartine (Quasi Adagio). L’auditeur se laissera autant séduire par le délicat et subtile Andantino que par la simplicité de l’Allegretto sempre cantabile qui vient clore l’album d’un compositeur majeur du répertoire romantique. le tout interprété par un jeune pianiste expressivo, virtuoso e colorato

    Titien Collard (piano), Franz Liszt, Indésens Calliope, 2024
    https://indesenscalliope.com
    https://www.bs-artist.com/pages/communication

    https://www.facebook.com/people/Titien-Collard-Pianiste/100083719893138/

    Voir aussi : "Bowie, Paganini, Scarlatti et compagnie"

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  • Électroband

    Tiens, cela faisait un bail que Bla Bla Blog ne s’était pas piqué de musique électronique. Opening, le dernier opus de LGMX nous en offre l’occasion. C’est de l’électro souriante pour ne pas dire joyeuse qui inaugure leur deuxième album (Time Traveller).

    LGMX c’est d’abord un groupe de fanfare électro bien décidé à marier deux styles musicaux opposés. Musique du monde et électros se disputent la vedette dans un joyeux foutraque (Gopnik Mazurka, Hexadecimal Night Fever).

    Jamais instruments traditionnels et machines n’ont fait aussi bon ménage

    On imagine les raves à la mode LGMX, à la fois dépaysantes et planantes (Trancelation, sic). Jamais instruments traditionnels et machines n’ont fait aussi bon ménage. Cela permet d’avoir des sons et des rythmes singuliers que la puissance des cuivres décuple.    

    Le collectif rhodanien ne démérite pas dans sa créativité et dans son refus de la facilité (le formidable et sérieux Earthquake), sans jamais abandonner ses rythmes irrésistibles. Cela donne des morceaux d’une grande efficacité (Ratio ou Kyushu).

    Cet album franchement emballant se termine avec Spiritual Healing, véritable à hymne à l’intelligence (humaine), à la culture et à la spiritualité. Bref, à la vie. 

    LGMX, Opening, Mediatone, 2024
    https://www.lgmx.fr 
    https://www.facebook.com/LGMXtechnofanfare
    https://www.instagram.com/_lgmx_

    Voir aussi : "3 est un chiffre impair"

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  • Quelques tangos avec Patricia Bonner

    Patricia Bonner est de retour avec Chronicles of Time, un nouvel album qui lui tient à cœur. La chanteuse a en effet choisi un projet musical qui allie jazz et tango. Pas la peine de dire que cet opus s’avère irrésistible. Saluons aussi le choix de Patricia Bonner de ne pas se contenter de reprises de standards. Elle a en effet choisi de retravailler avec Jean-Michel Proust pour des titre inédits.

    Dis te souviens-tu ? chante la jazzwoman dans un morceau au parfum doux-amer de nostalgie. On est dans l’esprit du tango, sans doute la plus belle danse qui soit, alliant sensualité, amour et tristesse, le tout enveloppé dans la grâce et je ne sais quoi d’effronterie. On aime cette manière dont Patricia Bonner, avec le soutien de Jean-Michel Proust, se fond avec bonheur dans une ce répertoire renouvelé. Il y a cette déclaration d’un amour presque insolent ("No sientes que soy infeliz ?", Palabras). Elle se fait poétique et romantique, toujours en espagnol, dans Soy et Verano.  

    Retour à la chanson française avec Je m’aime. Cette fois, c’est Gilberto Gil qui semble s’être penché au-dessus de l’épaule de Bonner et Proust. Certains parlerons de jazz easy-listening. Préférons plutôt parler d’un titre à la facture sixty, souriant et invitant à l’amour dans la plus romantique des villes. Au jeu des références, on s’amusera à retrouver Michel Legrand dans le virevoltant et romantique La chanson des troubadours ("Dans l’tourbillon de la vie, de l’amour / Y’a celui qui aimera pour toujours / Qui fera de ses nuits, de ses jours / Son soleil à lui, ses plus beaux jours") et même dans le titre anglais, sixties et sexy, Foolish Dream.

    Sixties et sexy

    Patricia Bonner sait tout faire : crooneuse en anglais (Memories, le formidable et jazzy Anita), jazzwoman semblant évoluer avec légèreté dans un caveau de Saint-Germain-des-Prés (Da Capo) ou avec le même plaisir dans un club new-yorkais (It’s A Good Day, No Rush), sachant être plus grave et engagée (Stay On Line, sur un rythme militaire).

    Le tango n’est jamais très loin. Dans It’s A Spring, la chanteuse le marie avec l’anglais, ce qui lui donne une légèreté singulière et un air de comédie musicale.

    Smooth à souhait, Cette larme à l’instant entend bien laisser une place au choix à la chanson jazz. La tristesse se fait paradoxalement séduisante car elle invite à vivre et à retenir ses larmes ("Est-ce la rosée du matin / Sur ma joue qui fait que d’un coup / Je me sens bien"). La liberté, "les yeux d’un enfant", les voyages, les rêves et un "baisé volé sur la joue" : Patricia Bonner préfère chanter la vie, l’amour et "le retour du printemps".

    Album jazz coloré et souriant, ces "chroniques d’un temps" entendent faire du jazz la meilleure musique feel-good qui soit.

    Patricia Bonner, Chronicles of Time : Tango, Jazz & Beyond, Teranga Production, 2024
    https://www.patriciabonner.com
    https://www.bs-artist.com/pages/communication

    https://www.facebook.com/ILikePatriciaBonner

    Voir aussi : "Pas de réserve pour Paris Orly"
    "Histoires de tangos par Lucienne Renaudin Vary"
    "Chaud, fort et bon"

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  • Dumas, le fils

    Soyons précis. Des trois Dumas, c’est le deuxième qui est le plus connu. Alexandre Dumas, dit Père, est devenu pour toujours l’auteur des Trois Mousquetaires, du Comte de Monte-Cristo ou de La Reine Margot. Les qualificatifs le concernant sont bien entendu d’autant plus élogieux qu’il reste moderne.

    Qu’en est-il des deux autres Dumas. Thérèse Charles-Vallin, autrice du Troisième Dumas (éd. de la Bisquine) passe rapidement sur l’ancêtre, lui aussi nommé Alexandre, plus précisément Thomas Alexandre Davy de La Pailleterie. Général métissé, il a eu pour père un noble normand qui épousa une femme noire de Saint-Domingue. Le militaire, le "premier Dumas", donc, donne naissance au plus célèbre d’entre eux, le fameux Alexandre Dumas Père.

    Arrêtons-nous tout de suite sur cette naissance car c’est là qu’il faut chercher un des points communs des trois Dumas : une paternité mal assumée qui est au cœur de l’essai de Thérèse Charles-Vallin. Pour autant, les liens pères-fils restent très forts. Le créateur de Monte-Cristo a une fascination pour le brillant Général increvable et qui eut pour seul "tort" d’être métis. "À l’âge de quatre ans, [Il] voulait aller au ciel pour y trouver Dieu et le tuer afin de venger la mort de son général de Pierre".

    Singulièrement, Alexandre Dumas Fils ne fut reconnut lui aussi que tardivement, après une enfance difficile, trois femmes se disputant sa garde jusqu’à ce qu’il soit définitivement reconnu à l’âge de sept ans. La suite c’est un long chemin personnel et artistique jusqu’au triomphe d’Alexandre Dumas Fils.

    Féminisme

    Thérèse Charles-Vallin suit chronologiquement la carrière exceptionnelle d’un écrivain qui aurait pu se faire écraser par une paternité exceptionnelle, d’autant plus que son enfance augurait mal de la suite – un père absent, des femmes ne s’entendant pas, le rejet et les humiliations à l’école en raison de sa naissance et de ses racines antillaises. Lorsque le père se rapproche du fils, ce dernier ne pourrait que se sentir écrasé par un écrivain adulé et à la force de travail exceptionnelle : "Un véritable bourreau de travail qui peut rédiger 200 pages d’un excellent texte en une nuit". Finalement, les relations entre le père et le fils vont devenir excellentes, comme le prouvent les multiples extraits de leur correspondance, le père soutenant et appuyant le fils et le fils marquant son amour pour un père jusqu’à ses derniers jours.

    L’essai de Thérèse Charles-Vallin est passionnant en ce qu’il donne à voir un artiste s’émancipant d’un père autant admiré et reconnu que "frivole et jouisseur" mais qui finira ruiné. C’est son fils qui l’accueillera chez lui dans ses derniers jours et le veillera jusqu’à sa mort. L’auteure propose sans doute là les plus belles et émouvantes pages de son essai.

    D’Alexandre Dumas Fils, le grand public a avant tout retenu son chef d’œuvre, La Dame aux camélias. Le roman a été écrit en 1847, dans une rage que son père n’aurait pas renié. Le troisième Dumas n’a jamais caché que cette histoire d’amour et de mort lui a été inspiré par sa propre relation avec une jeune femme dont il était épris, Alphonsine Plessis et qui mourut à l’âge de 23 ans, après une vie des plus agitée.

    Dumas Fils est surtout un homme de théâtre et c’est bien naturellement qu’il se lance dans  l’adaptation sur scène de sa Dame aux camélias, avant qu’elle ne devienne ensuite une œuvre lyrique, La Traviata.

    Le Troisième Dumas est aussi passionnant par son tableau du XIXe siècle, ses fièvres politiques, le retour de l’Empire, la guerre de 1870 puis la jeune IIIe République. Dans cet essai, traversent des personnages historiques, que ce soit Victor Hugo, Émile Zola ou Sarah Bernhardt. Thérèse Charles-Vallin souligne la clairvoyance de Dumas Fils qui s’est lancé dans le féminisme et le soutien de l’égalité de droits entre hommes et femmes, une attitude à la fois rare et remarquable pour un homme du XIXe siècle, très souvent cantonné, à tort, dans celui d’artiste bourgeois.

    Finalement, Alexandre Dumas Fils est resté dans les manuels d’histoire autant que de littérature en dépit de l’ascendance de Dumas Père. Mieux, au contraire de ce dernier, il réussit à se faire élire à l’Académie Française. 

    Thérèse Charles-Vallin, Le Troisième Dumas, éd. de la Bisquine, 2024, 214 p.
    https://www.editions-labisquine.com/le-troisieme-dumas.html
    https://www.facebook.com/p/Therese-Charles-Vallin-100063155264919

    Voir aussi : "Thérésia versus Robespierre"

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  • Bowie, Paganini, Scarlatti et compagnie

    Il est absolument impossible d’être insensible au formidable dernier album d’Alexander Boldachev. Il s’agit du second volume de son projet musical Pop Meets Classical. Comme son nom l’indique, il s’agit d’une rencontre entre deux genres souvent considérés comme irréconciliables. D’un côté une musique populaire et souvent commerciale et de l’autre le classique, trop boudé et à tort considéré comme élitiste.

    Alexander Boldachev propose de les faire se rejoindre grâce à la harpe, son instrument fétiche. Son premier volume avait permis de mettre dans un même album Scorpions et Debussy, Red Hot Chili Peppers et Bach ou Nirvana et Rossini. Culotté. Voilà que le harpiste helvético-russe récidive avec un second volume pas moins audacieux et séduisant ! Simplement séduisant ? Non, enthousiasmant ! Au menu de ce programme, les Beatles, Sting, David Bowie, Queen et Michael Jackson mais aussi Scarlatti, Paganini, Brahms et Piazzolla. 

    C’est peu de dire que ces revisites sont des redécouvertes habillées d’un classicisme qui semble sans âge. Yesterday des Beatles a ainsi une facture Renaissance. Pour Shape of My Heart de Sting, Alexander Boldachev insuffle à ce titre mélancolique des percussions. L’auditeur reconnaîtra le fameux Space Oddity, moins interstellaire que mystérieux et onirique – au passage, le harpiste n’oublie pas le fameux compte à rebours. 

    Simplement séduisant ? Non, enthousiasmant !

    Plus que pour cette adaptation de David Bowie, on sera en droit de préférer la version originale du fameux Bohemian Rhapsody, moins rock-baroque que romantique.

    Parlons maintenant de la version harpe d’Earth Song de Michael Jackson. C’est là que l’on constate le génie de composition du "Roi de la Pop". Alexander Boldachev respecte les lignes mélodiques de ce morceau vieux déjà de 30 ans mais toujours actuel dans son message.

    Les compositeurs plus anciens ne sont pas en reste dans ce très joli album, prouvant que le harpiste connaît ses classiques. À côté de la délicate Sonate K466 de Dominico Scarlatti, véritable appel à l’amour, il y a ce véritable tube de Paganini, le Caprice n°24. Mais la vraie bonne idée de cet enregistrement c’est d’avoir ressorti le Recuerdos de la Alhambra de Francisco Tárrega que Mike Oldfield avait adapté au synthétiseur dans les années 80 pour la BO du film La déchirure (Étude).

    Outre le très bel Intermezzo n°2 de Brahms, on trouvera Astor Piazzolla et son Libertango. Alexander Boldachev respecte à la lettre le rythme et l’esprit de ce tango entré dans l’histoire de la musique et de cette danse.  

    Alexander Boldachev, Pop Meets Classical vol 2, Indésens Calliope, 2024
    https://indesenscalliope.com/boutique/pop-meets-classical-vol-2
    https://www.bs-artist.com/pages/communication

    https://alexanderboldachev.com

    Voir aussi : "Haydnissimo !"
    "Guitare et classique by Roxane Elfasci"

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  • À Beethoven, l’humanité reconnaissante

    Peu connu mais archidoué, virtuose et romantique (son look sur la pochette d’album finit de nous convaincre), le pianiste Nikolay Khozyainov revient cet année avec un nouvel opus, Monument to Beethoven (Rondeau Production). Pourquoi, d’ailleurs, cette expression ? Il faut revenir aux années 1830-1840, soit quelques années après la mort du compositeur allemand. Franz Liszt entreprend de rendre hommage à son illustre aîné en faisant bâtir une statue à Bonn. Robert Schumann, Félix Mendelssohn et bien entendu Liszt sont sollicités pour composer des œuvres directement inspirés du répertoire de Beethoven, et en particulier de l’Allegretto de sa Symphonie n°7.

    Ce sont ces morceaux créés ad hoc que Nikolay Khozyainov a choisit d’enregistrer, en commençant par l’Allegretto originel, ici transcrit au piano par Liszt. C’est à un Everest que s’attaque le pianiste, dont la virtuosité n’écrase jamais la puissance dramatique ni la densité. Les respirations sont les bienvenues et viennent insuffler ce souffle que l’on appellera plus tard romantisme. Beethoven a fait de cette marche funèbre un mouvement allegretto, comme pour se jouer de la mort et donner à ce deuxième mouvement le pouvoir de la vie. Nikolay Khozyainov la rend dans un mélange d’ardeur, de passion et de gravité.

    Suit Robert Schumann avec ses Études en forme de variations sur un thème de Beethoven. 15 variations, rarement de plus d’une minute 30, s’approprient le thème principal de l’Allegretto de la 7e de Beethoven en variant les tempos, du Moderato au Prestissimo, en passant par le Passionato.

    Nikolay Khozyainov s’empare de cette œuvre rare de Schumann en prouvant le panel de son jeu, y compris des variations les plus sombres (Ohne Titel n°5) ou les plus techniques (Presto n°6). Schumann fait œuvre d’une grande liberté dans son appropriation du thème original (A11. Legato teneramente), ne s’empêchant pas des revisites franchement épatantes (B4. Ohne Titel) et transformant la marche funèbres en chants populaires (B5. Cantando), voire d’une singulière modernité (B7. Ohne Titel). Ces études se terminent de la plus belle des manière, avec la variation la plus longue de l’opus, tout en pudeur et en légèreté. Bref, un bel hommage à Beethoven. 

    Un bel hommage à Beethoven

    Plus courtes, les Variations sérieuses de Felix Mendelssohn Bartholdy prennent à la fois plus de liberté et plus de gravité avec l’Allegretto de Beethoven. Le Thema et les Variations balancent entre la luxuriance et romantisme fou.

    Beethoven est de retour avec une transcription par Liszt du lied An die ferne Geliebte ("À ma bien aimée"). L’histoire retient qu’il s’agit du premier cycle de lieder de l’histoire de la musique. Il est difficile de rester insensible à ce court morceau dont le pianiste rend toute la profondeur et toute la justesse sentimentale.

    La Fantaisie, op. 17 de Robert Schumann a ceci de particulier qu’elle fait partie des œuvres majeures du compositeur allemand. Cet opus autonome, en trois parties, n’a figuré que tardivement dans le programme hommage à Beethoven – en réalité les deux derniers mouvements – pour la souscription destinée à la construction de son monument à Bonn. La Fantaisie est au départ une déclaration à Clara Wieck, future Clara Schumann. Nikolay Khozyainov s’en empare avec délectation. Il y a du Beethoven dans la puissance évocatrice du 2e mouvement et la richesse de l’opus devient un envol du romantisme dans le dernier mouvement.

    Nikolay Khozyainov ne pouvait terminer ce Monument à Beethoven autrement que par une création, car il est lui-même compositeur. Avec son morceau Petals of Piece. Son hommage au compositeur allemand est aussi un chant de paix que lui avait commandé l’ONU en novembre 2022. dans cette œuvre contemporaine et post-romantique, c’est avec gravité que l’instrumentiste russe lance ses "Pétales de la Paix". Plus que jamais d’actualité pour cet artiste résolument engagé pour le pacifisme. 

    Nikolay Khozyainov, Monument à Beethoven, Rondeau Production, 2024
    https://www.nikolaykhozyainov.com
    https://www.bs-artist.com/pages/communication

    https://www.rondeau.de

    Voir aussi : "Beethoven, Intégrale, Première"

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