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  • Contredanses à Versailles (et ailleurs)

    Nous avions découvert la Compagnie Outre Mesure dans un programme consacré à la musique de la Renaissance. Revoilà l’ensemble vendéen dans un programme plus tardif puisqu’il s’intéresse à la musique versaillaise. Tel est l’objet de ces Tourbillons de l’amour. À la fin du XVIIe siècle, la tradition ancienne de la "belle danse", des prestations successives de couples solistes, est concurrencée par les "contredanses" venues d’Angleterre où viennent se produire ensemble autant de danseurs et danseuses qu’il est possible.

    Une vraie guerre culturelle, oubliée depuis, qui n’était pas anecdotique dans un régime monarchique où la cour royale avait une importance considérable. Il est rappelé dans le livret que Louis XIV lui-même – le danseur le plus doué du Royaume, disait-on, non sans flagornerie – partit au pays de la Perfide Albion se former à ces contredanses, avant de les faire importer à Versailles. Raoul-Auger Feuillet publie un ouvrage en 1706 de ces contredanses, en dédiant cet ouvrage à la jeune duchesse du Maine, passionnée par ce nouveau divertissement.

    "Danses badines", peu sérieuses, pas convenables pour les dames : les critiques fusent pour un art venu, rappelons-le, d’Angleterre (longways, country dances), mais qui a été mis au goût français. L’album de la Compagnie Outre Mesure propose dans ce double album, à la fois ambitieux et passionnant, de s’intéresser à cette musique du XVIIe siècle.

    Nous voilà plongés dans une époque dont l’art musical reste souvent limité à Lully et au baroque versaillais. Remercions Outre Mesure d’ouvrir grand le patrimoine de cette période. Il y a de l’authenticité et de la fraîcheur dans cet opus sur instruments d’époque (Vienne, Le Prince George), parfois dans une simplicité touchante (La Coquette), voire légère (La Pantomine ou Le Pistolet, sur le disque 2). Même si l’esprit Renaissance demeure (Jeanne qui saute), le XVIIIe siècle des Lumières frappe déjà à la porte (Le Menuet du Chevalier). Le supplément d’âme de ce projet musical vient sans doute de la voix de Gwinnevire Quennel, interprète notamment de La Fanatique, à écouter comme un air traditionnel, également ode au plaisir et à la légèreté.      

    Longways et country dances

    On lorgne bien entendu du côté de l’Angleterre et des country dances avec La Buffecotte, Excuses my (disque 2) et surtout Le Carillon d’Oxfort (sic), deux airs enjoués et rythmés. On comprend aussi la curiosité et l’attrait de Louis XIV et de ses contemporains pour cette tradition d’outre Manche. Il ne faudrait pour autant pas faire de ces Tourbillons d’Amour un recueil uniquement reclus à Versailles. En vérité, ces contredanses sont à la fois modernes pour l’époque (La Nouvelle Figure), ne tournant pas le dos aux traditions (Le Menuet de la Reine, La Valantine, La Gasconne dans le disque 2), aristocratiques (La Chasse) mais aussi populaires (La bourrée de basque ou La Bergère, un charmant air que l’on dirait destinée à une belle amoureuse que l’on s’apprête à inviter à danser).

    Arrêtons-nous sur Podain. Gwinnevire Quennel interprète cette délicate chanson qui est un dialogue entre une fille amoureuse et sa mère, l’alertant sur les dangers de l’amour et les malheurs du mariage. Poignant. Bien plus léger sont Les Galeries de l’Amour ou encore L’Amoureuse, un instrumental bien entendu destiné à la danse, que ce soit à Versailles ou dans les campagnes du Royaume.  

    Raoul-Auger Feuillet, en proposant ce recueil, a entendu contenter le roi et bousculer les danses traditionnelles en France, et c’est du côté de l’étranger qu’il est parti chercher son inspiration. Avec le recul, cette approche a revivifié l’art de la danse, n’en déplaise aux critiques de l’époque. On appréciera particulièrement ces mélodies aux accents archaïques (Le Libourlaire, La Bacchante, Les Manches Vertes) et ayant pour objectif d’inviter à la danse, aux fêtes populaires (L’Épiphanie) et aux plaisirs en général (La bonne amitié, La Chaîne, La Fée, toujours sur le disque 2). Non sans parfois de petits bijoux, à l’instar du délicat air La Jalousie ou du chant d’amour La Matelotte sur les "amans malheureux" (sic).

    La contredanse Le Tourbillon de l’Amour donne son nom à l’album. On saluera l’interprétation toute en couleur et en chaleur, menée par un ensemble homogène dirigé de main de maître par Robin Joly. Du bel ouvrage. Et assurément un événement musicologique... et historiographique. 

    Raoul-Auger Feuillet, Les Tourbillons d’Amour, Compagnie Outre Mesure,
    Label COM, coll. Tempérament baroque, 2024

    https://www.compagnie-outre-mesure.com

    Voir aussi : "La Pléiade avec Outre Mesure"

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  • Kontinental 25

    cramés,cinéma,long-métrage,montargis,roumanie,roumain,radu jude,eszter tompa,gabriel spahiu,adonis tantaLes Cramés de la Bobine présentent à l'Alticiné de Montargis le film Kontinental 25. Il sera visible le jeudi 6 novembre et dimanche 9 novembre à 18 heures et lundi 10 novembre à 14 heures. Soirée débat le mardi 11 novembre à 20h30.

    Orsolya est huissière de justice à Cluj, en Transylvanie. Elle doit un jour expulser un sans-abri qui vit dans le sous-sol d’un immeuble du centre-ville transformé en hôtel de luxe. Un événement inattendu la met brusquement face à ses contradictions.

    Ours d’argent du meilleur scénario à la Berlinale 2025.

    Kontinental 25, drame roumain de Radu Jude 
    avec Eszter Tompa, Gabriel Spahiu, Adonis Tanța, 2025, 99 mn
    https://www.cramesdelabobine.org/spip.php?rubrique1619
    https://www.instagram.com/xenix_filmdistribution

    Voir aussi : "Les glaneurs et la glaneuse"

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  • Les glaneurs et la glaneuse

    Les Cramés de la Bobine présentent à l'Alticiné de Montargis le film Les glaneurs et la glaneuse. Il sera visible les mercredi 5 novembre à 18 heures et lundi 10 novembre à 16 heures. Soirée débat le dimanche 9 novembre à 20h30.

    On ne peut plus regarder comme avant ceux qui soulèvent les couvercles des poubelles…

    Un peu partout en France, Agnès a rencontré des glaneurs et des glaneuses, récupéreurs, ramasseurs et trouvailleurs. Par nécessité, hasard ou choix, ils sont en contact avec les restes des autres. Leur univers est surprenant. On est loin des glaneuses d’autrefois qui ramassaient les épis de blé après la moisson. Patates, pommes et autres nourritures jetées, objets sans maître et pendule sans aiguilles, c’est la glanure de notre temps. Mais Agnès est aussi la glaneuse du titre et son documentaire est subjectif. La curiosité n’a pas d’âge. Le filmage est aussi glanage.

    Prix du cinéma européen du meilleur documentaire 2000.

    Les glaneurs et la glaneuse, documentaire français d’Agnès Varda, 2000, 82 mn
    https://www.cramesdelabobine.org/spip.php?rubrique1615
    https://www.kdiffusion.com

    Voir aussi : "Ciudad Sin Sueño"

         

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  • Soleils

    Voilà un album qui vient vous cueillir à froid et qui est à placer parmi les belles surprises du moment. Le compositeur libano-français Wassim Soubra propose, avec Il vento, un voyage se jouant des frontières, entre classique, contemporain et world music.

    Accompagné de Julie Sevilla-Fraysse au violon, de Khaled El Jaramani à l’oud et Henri Tournier à la flûte, Wassim Soubra, également au piano, ouvre grand un univers musical allant de l’Orient à l’Occident.  

    Il y a du soleil dans cet album de huit titres instrumentaux (Réfractions), du soleil mais aussi des images. C’est en vérité un beau "film" que nous propose le compositeur dont l’influence de Georges Delerue paraît tomber sous le sens (Fluctuations, Alizé). Le son de l’oud de Khaled El Jaramani vient apporter ce souffle et cette lumière méditerranéenne (Azur, Anima), rappelant les origines moyen-orientales de Wassim Soubra qui a quitté son pays en 1974, alors qu’éclatait la guerre civile.

    Une vraie bande originale de film !

    Le musicien connaît très bien le classicisme, que ce soit Bach ou Debussy dont il s’inspire pour ses compositions subtiles et aux riches couleurs (Le pêcheur solitaire). On saluera tout autant le travail de mélodiste de Wassim Soubra (Alizé, Le pêcheur solitaire) qui s’est entouré de musiciens apportant leurs couleurs et leurs sensibilités. On pense à la flûte magique d’Henri Tournier et le violoncelle néo-romantique de Julie Sevilla-Fraysse.

    Aucune fausse note dans ces huit titres dominés par la nostalgie (Anima) mais aussi la volonté de faire se rejoindre des cultures que l’on pense à tort comme irréconciliables. Wassim Soubra prouve le contraire. L’auditeur ou l’auditrice verra dans cet opus un livre d’images… musicales, que ce soit cette délicate rose d’un jardin du sud (La rose), les éclats de lumières du soleil méditerranéen (Réfractions), le ciel d’été (Azur) ou encore le vent (Il vento). Une vraie bande originale de film !  

    Une vraie et belle révélation que cet album incroyable, à écouter les jours de spleen.  

    Wassim Soubra, Il Vento, 2025
    https://www.instagram.com/wassim_soubra
    https://bfan.link/alize-1

    Voir aussi : "Melting-Pop"

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  • Des femmes sans influence

    Jolie découverte que ce roman américain de Jane Smiley, sorti en 2022 et publié en France l’an dernier chez Rivages, sous le titre Un métier dangereux.

    Ce métier dangereux  c’est d'abord celui pratiqué par Eliza Ripple à Monterey en Californie. Nous sommes en 1851. Eliza est prostituée depuis la mort de son mari. Or, paradoxalement, elle vit cette "reconversion" dans un bordel tenu par Madame Parks comme une chance. Son mariage se passait mal. Après avoir été séparé de ses parents, elle était malmenée par son époux, si bien que sa nouvelle vie apparaît en comparaison, et paradoxalement, bien plus douce. Elle rencontre Jean, prostituée comme elle, mais cette fois dans un établissement réservé aux femmes. Les deux femmes deviennent amies au moment où un premier meurtre de prostituée a lieu. Puis un second… Eliza et Jean mènent l’enquête. 

    Les atouts de ce policier

    Ce roman vraiment intéressant même thriller et réflexion sociale, le tout avec deux héroïnes prostituées, très courageuses pour ne rien gâter. Voilà les atouts principaux de ce policier étonnant qui prend le temps de s'écouler, avec singulièrement peu de violences - si l'on excepte la découverte de corps. On est dans un western finalement assez méditatif, tout en restant très réaliste. 

    Jane Smiley ne cache pas que pour ce roman, elle s’est solidement documentée afin de rendre le récit le plus réaliste possible. C’est simple : on se croirait dans la Californie précédant de dix ans la Guerre de Sécession. C’est une Amérique déchirée qui cohabite tant bien que mal, violente et impitoyable envers les gens de couleur et les femmes – car le "métier dangereux", ici, est en réalité celui de "femme".

    Les meurtres sont les enjeux de ce roman qui se termine avec la résolution des crimes, bien sûr. Mais là n’est pas l’essentiel. Ce qui intéresse l’autrice américaine ce sont ces deux héroïnes attachantes et plus particulièrement la condition féminine. La prostitution semble être paradoxalement moins un problème qu’une solution, si l’on pense à la nouvelle liberté dont jouit Eliza. Lorsque Jane Smiley parle des clients de la jeune prostituée, elle le fait avec détachement, sans vulgarité, sans cacher que le danger est quotidien.

    Un métier dangereux refuse les scènes d’action et même l’enquête pointilleuse pour s’attacher aux personnages, à leurs habitudes, aux longues ballades mais aussi aux réflexions sur la place de ces dames dans la société américaine. Souvent cantonnée à des rôles secondaires dans les westerns, la figure de la prostituée devient un personnage particulièrement révélatrice.  

    Jane Smiley, Un métier dangereux, éd. Rivages Poche, 2024, 333 p.
    https://www.payot-rivages.fr/rivages/livre/un-m%C3%A9tier-dangereux-9782743662387

    Voir aussi : "Du froid à la lumière"

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