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contemporain - Page 7

  • Thibault Jehanne revisite Frits Thaulow

    thaulow,thibault jehanne,normandie,impressionnisme,caen,contemporainThibault Jehanne propose sa vidéo Éclipse dans le cadre de l'exposition Frits Thaulow, Paysagiste par nature (Musée des beaux-arts de Caen, 16 avril-26 septembre 2016). Cette œuvre d’un artiste contemporain normand propose un jeu de l’eau, de la lumière et du blanc, en référence au peintre impressionniste Frits Thaulow, à l'honneur pour le festival Normandie Impressionniste.

    Thibault Jehanne a choisi de travailler sur le thème des routes submersibles en Manche, filmées au petit matin. Éclipse vient offrir un clin d’œil et un hommage appuyé au travail de Frits Thaulow, le peintre de la lumière, de la neige, du blanc et de l’obscurité.

    Thibault Jehanne, Éclipse, au Musée des beaux-arts de Caen,
    jusqu’au 26 septembre 2016

    dans le cadre de l’exposition Frits Thaulow, Paysagiste par nature
    http://thibaultjehanne.fr
    "Frits Thaulow, un bobo chez les impressionnistes"

  • Moteur, silence, ça pousse

    Portrait.jpgJ'avais parlé il y a plusieurs mois du couple de sculpteurs Marthe et Jean-Marie Simonnet ("Les Simonnet en pleine(s) forme(s)"). Le vendredi 8 avril, à 21h40, le couple de sculpteurs seront dans dans l’émission Silence ça pousse sur France 5, pour un reportage sur leurs sculptures en herbe et résine.

    Silence ça pousse, France 5, vendredi 8 avril 2015
    "Les Simonnet en pleine(s) forme(s)"

  • Je vais vous tanner avec Amilly

    Tanneries.jpgAmilly, vous connaissez ? Cette petite ville accolée à Montargis, dans le Loiret, n’a, a priori, rien qui attirerait un touriste de passage : un patrimoine architectural famélique, un centre ville minuscule vite traversé, l’absence de musée digne de ce nom. Dit de manière abrupte, Amilly fait partie de ces cités d’abord résidentielles, enclavée par Montargis, ennuyeuse et peu sexy.

    Et pourtant ! Et pourtant, les apparences sont trompeuses. Depuis plusieurs années, Amilly se distingue en effet par une politique culturelle et artistique ambitieuse (élitiste pour quelques mauvaises langues). La réputation des concerts de musique classique et baroque ont ainsi largement dépassé le cadre régional et il n’est pas rare que les médias nationaux, Diapason et Classica pour ne citer qu’eux, ne se fassent l'écho des représentations musicales dans la modeste église Saint-Martin. Élitiste ? Les Vendredis de l’Orgue, dédiés à cet instrument sur lequel la mairie continue à investir, est gratuit et offre à un large public l’occasion de découvrir le répertoire de Bach, Vivaldi ou Frescobaldi.

    Depuis une quinzaine d’années, Amilly s’est lancé dans une autre aventure : celle de l’art contemporain. Cela s’était concrétisé avec une première galerie, l’AGART (Association Galerie d’ARTistes), implantée dans le bourg de la ville depuis 2001. 2016 marque une rupture avec la fin de cette galerie qui avait entrepris un gros travail d’ouverture de l’art contemporain à destination de tous les publics : gratuité, visites pédagogiques à destination des scolaires grâce à un solide travail de médiation culturelle, expositions de plus de 80 artistes nationaux ou régionaux... et même un café philosophique. L’AGART vient de fermer ses portes, mais c’est pour permettre à l’art contemporain de se déployer dans un espace beaucoup plus important : 1 500 m² d’exposition (3 600 m² de surface totale) dans d’anciennes tanneries réhabilitées grâce au Conseil Régional de la Région Centre.

    L’inauguration officielle aura lieu en septembre 2016 mais une première exposition est déjà visible jusqu’au 13 novembre 2016, au rez-de-chaussée du bâtiment (d’autres salles d’expositions – vides pour l’instant – existent à l’étage).

    "Œuvre aux singuliers" présente des sculptures, des peintures et des installations de Martin Barré, Christian Bonnefoi, Erik Dietman, Norman Dilworth, Jean-Pierre Pincemin, François Rouan, Claude Viallat et Jan Voss. Le rez-de-chaussée du bâtiment monumental frappe par l’ambition affichée. Le spectateur voyage dans une vaste nef au milieu d’œuvres dont une grande partie est issue du mouvement Supports-Surfaces. Le minimalisme des œuvres exposées (les tableaux de Martin Barré, par exemple) fonctionne bien dans cet espace à l’architecture industrielle. Paradoxalement, le spectateur ne se sent pas écrasé par les compositions monumentales en bronze d’Erik Dietman, par les assemblages en bois de Jean-Pierre Pincemin ou par cet animal monstrueux de Jan Voss que l'on croirait tout droit sorti d’un film de science-fiction : la réussite de cette sorte de cathédrale dédiée à l’art contemporain, unique en Région Centre, est de permettre au visiteur de respirer et de se laisser saisir par la démesure audacieuse des œuvres .

    Le bloggeur émet cependant un bémol: l’absence (provisoire?) de cartels de présentation peut nuire à la visite fluide de l’exposition, d’autant plus si les Tanneries visent à conquérir un vaste public, via notamment la médiation culturelle.

    L’ambition du centre est de devenir un lieu emblématique de l’art contemporain, à la fois lieu d’exposition sur deux niveaux mais aussi catalyseur de talents. À partir d’avril, les Tanneries vont en effet devenir un lieu de résidence pour artistes : Jennifer Caubet réalisera sur place une œuvre destinée au parc de sculptures. Ce centre d’art est à suivre, sans nul doute, et avec le plus grand intérêt. J’aurai d’ailleurs sans doute l’occasion de vous tanner avec Amilly.

    "Œuvre aux singuliers", Les Tanneries, 19 mars – 13 novembre 2016,
    du jeudi au samedi de 14 à 19H, ou sur rendez-vous

    Amilly.com
    "Les Simonnet, en pleine(s) forme(s)"

    Merci à Ihssane

  • Pierre Boulez : Mort d'un géant

    Le décès ce 5 janvier de Pierre Boulez (né en 1925) marque la fin d'une période exceptionnelle dans l'histoire de la musique. J'avais consacré l'an dernier un article sur Pierre Boulez, à l'occasion de ses 90 ans.

    C'est peu de dire que le compositeur a durablement marqué le XXe siècle. De fait, il a révolutionné comme jamais le langage musical et faisant découvrir à la France l'école de Vienne (Arnold Schoenberg, Alban Berg et Anton Webern) et s'évertuant à bousculer les codes du classicisme.

    Compositeur mais aussi chef d'orchestre, Pierre Boulez a également durablement changé la vie institutionnelle musicale française. 

    Je vous propose de redécouvrir cet article : "Boulez, le maître au marteau".

    "Boulez, le maître au marteau"
    Pierre Boulez, Intégrale, 13 CD, Deutsche Grammophon, juin 2013

  • Barbara Hannigan est Lulu

    Pour jouer Lulu, rôle phare de l'opéra le plus célèbre du XXe siècle, combien de sopranos auraient le coffre de s'y frotter ? Or, non content d'avoir relevé le gant pour la Monnaie de Bruxelles en 2012, Barbara Hannigan mérite de voir son interprétation devenir une référence légendaire. 

    Lulu, l'opéra dodécaphonique en trois actes d'Alban Berg (le dodécaphonisme étant cette technique inventée par Arnold Schoenberg donnant une importance comparable aux douze notes de la gamme chromatique, rejetant de fait toute tonalité), écrit en 1935 et resté inachevé par le compositeur (le troisième acte a été terminé par Friedrich Cerha), conte le destin de Lulu. Celle que l'on nomme et surnomme également Eva, Mignon, Nelly ou Lilith est une beauté légendaire, une femme fatale, "un ange exterminateur" et la "la putain la plus raffinée qui ait jamais ruiné un homme" comme le dit un de ses amants et victimes.

    La cruauté de l'amour est au centre de cet opéra, non exempt d'humour noir. Un prologue en anglais présente au spectateur (symboliquement représenté sur scène) cette "vraie bête, sauvage et belle [que l'on ne verra] qu'ici". Lulu, jouée avec ardeur et juste démesure par une Barbara Hannigan complètement habitée par son rôle, passe d'homme en homme tout au long de ces plus de trois heures de spectacle. 

    Séduite par un artiste (interprété par Tom Randle, peintre devenu photographe dans cette version de 2012), Lulu provoque une crise cardiaque mortelle de son mari qui la surprend. Le photographe devient son mari et se suicide de jalousie en apprenant la vie amoureuse tumultueuse de sa femme. Le Dr Schön (Dietrich Henschel), directeur d'un journal, est témoin de cette mort et craint pour sa réputation, alors qu'il s'apprête à se fiancer. Puis, c'est lui-même qui tombe dans les bras de Lulu à la fin d'acte I, sous les yeux complices et jaloux et son fils Alwa (Charles Workman) – qui pense par ailleurs que cette femme ferait un très beau sujet d'opéra ! Dans l'acte II, le Dr Schön est devenu le nouveau mari de Lulu mais sombre lui aussi dans la jalousie ("Voilà donc le soir de ma vie : la peste à domicile", auquel la belle répond : "Tu as sacrifié tes vieux jours, tu as reçu ma jeunesse en échange" ). Il constate que sa femme séduit la comtesse Gräfin Geschwitz (Natasha Petrinsky), sorte de double positif de Lulu : "Elle ne peut pas vivre d'amour car sa vie est amour". Schön perd tout contrôle de lui-même, s'enflammant pour son épouse tout en la suppliant de se suicider pour le bien de tous : "Sans le savoir tu transformes en criminels les gens qui t'entourent". Mais Lulu refuse, prend le revolver que lui tend son mari et le tue. Arrêtée, la criminelle parvient à s'enfuir grâce au fils de Schön. Le couple se retrouve à Paris. Devenu proxénète (acte III), Alwa est entretenu par Lulu. La prostituée terminera sa triste carrière de séductrice sous la lame de Jack L’Éventreur (Dietrich Henschel, de nouveau). Son amie fidèle et sacrifiée, la comtesse Geschwitz ne parvient pas à la défendre et est tuée elle aussi par le serial-killer.

    Drame terrible, l'opéra dodécaphonique et expressionniste de Berg, dirigé par Paul Daniel, prend l'allure d'un spectacle rock et sexy grâce à la mise en scène de Krzysztof Warlikowski. L'inventivité est omniprésente dans cette version contemporaine : un décor monstrueux composé d'un escalier encadré de toboggans surréalistes, une cage de verre omniprésente, des animaux empaillés, les costumes à l'avenant, l'omniprésence du travestissement, les projections vidéo, des scènes de ballet, des figurants par dizaines peuplant la scène. Le baroque, l'inventivité, la démesure revendiquée et la folie servent les chanteurs, Barbara Hannigan en premier lieu. 

    Parler d'interprétation exceptionnelle à son sujet n'est pas exagérée. La soprano canadienne se donne corps et âme dans Lulu. Elle incarne ce personnage jusqu'à la démesure, se faisant tour à tour séductrice, romantique, danseuse, junkie, prostituée, bourreau et victime sacrifiée sur l'autel du plaisir. Alwa chante au cours du deuxième acte un hymne à cette femme condamnant chaque homme qu'elle séduit : "Je vois ton corps comme une musique. Ces chevilles un grazioso. Ces rondeurs un cantabile. Ces genoux un misterioso. Et le puissant andante de la volupté.Un aria qui pourrait tout autant s'adresser à Barbara Hannigan, une Lulu pour l'éternité.

    Alban Berg, Lulu, dirigé par Paul Daniel, mise en scène de Krzysztof Warlikowski, avec Barbara Hannigan, Dietrich Henscheln, Charles Workman, Natascha Petrinsky, Pavlo Hunka, Tom Randle, Ivan Ludlow, Rosalba Torres Guerrero et Claude Bardouil, Bel Air Classiques, 2014
    http://www.barbarahannigan.com 

  • Les Simonnet, en pleine(s) forme(s)

    simonnetLes Simonnet (Marthe et Jean-Marc de leurs prénoms) ont élu domicile dans le Gâtinais où ils poursuivent avec opiniâtreté une démarche artistique à la fois exigeante, originale et ouverte au public – ouverture qui n'est pas le fort, loin de là, de beaucoup d'artistes contemporains. 

    Le travail des Simonnet repose sur des créations autour de modules basiques aux formes douces, harmonieuses, mathématiquement et techniquement maîtrisées.

    Le cercle, le cylindre ou le tore constituent la base élémentaire de modules reproductibles et déclinables à l'infini, jusqu'à former des constructions parfois monumentales. Les jeux de combinaisons de ces modules – qui sont conçus en un moulage polyester travaillé par les artistes dans leur atelier – donne naissance à des constructions si naturelles et si évidentes, qu'elles en deviendraient presque vivantes : "Elles auront leur originalité propre tout en étant ontologiquement reliées entre elles par une structure, une ossature qui les innerve. Ce pourra être une surface courbe, une division, une ramification, un gonflement, un soulèvement... La multiplication des modules de base, si ceux-ci sont bien pensés, n’aboutit pas à une monotone répétition de type industrielle, mais au contraire, génère une grande variété de formes" expliquent les deux artistes.

    simonnetC'est en dehors de toutes les modes, et avec une liberté constante, que les Simonnet offrent au public la possibilité de "jouer" avec leurs créations. Il peut se les approprier sans parti pris. La manipulation, l'éphémère, la combinaison illimitée et l'imagination laissée aux spectateurs explique pourquoi leurs créations sont difficilement définissables : œuvres d'art, objets architecturaux, mobiliers urbains ou jeux pour enfants ? Sans doute tout cela à la fois, et sans doute plus encore. "Si longtemps présentée comme individuelle pour des raisons plus mercantiles que créatives, la création devient objectivée, raisonnée ludique et potentiellement collective", explique Jean-Marc Simonnet sur leur site Internet.

    Preuve que les Simonnet ont réussi à convaincre largement, leurs étranges et apaisantes formes modulaires que l'on croirait parfois sorties d'un voyage dans le temps, ont convaincu de nombreuses institutions et clients français ou étrangers : le Centre Pompidou-Metz, le Couvent des Minimes de Perpignan, la galerie Jérôme Sohier à Bruxelles, la galerie Twenty First à New York, le Pavilion of Art and Design de Londres ou le Pavillon des Arts et du Design au Jardin des Tuileries. En ce moment, et jusqu'au 31 octobre, les Simonnet exposent à Perpignan, à la galerie L'Extension

    Les Simonnet poursuivent indéfiniment leur travail et prouvent leur grande forme comme leur foi dans leur approche des formes modulaires : "Le monde qui nous entoure n’est-il pas le résultat d’une infinité de combinaisons ?"

    http://lessimonnet.fr
    lessim@club-internet.fr
    "Les Simonnet, exposition-vente",Galerie L’Extension, à Perpignan,
    du 17 septembre au 31 octobre 2015

     

  • La royauté espagnole dans une mauvaise posture

    "La Bête et le Souverain" : en France, ce scandale sur fond d'art, de politique et de morale est resté relativement discret. En Espagne, par contre, cette affaire a ému jusqu'au plus haut sommet de l'État, alors que le roi Felipe VI tente de redorer l'image d'une royauté bien mal en point.

    De quoi s'agit-il ? D'une sculpture de l'artiste autrichienne Ines Doujak intitulée Not Dressed for Conquering / Haute couture. Derrière ce titre ésotérique se cache une création plastique en papier mâché représentant l'ancien roi d'Espagne Juan Carlos vomissant un bouquet de fleurs et sodomisé par la syndicaliste bolivienne Somitila Barrios de Chungara, elle-même prise par un chien-loup. N'en jetez plus !

    L'artiste a eu beau expliquer que son œuvre entendait traiter du néo-colonialisme espagnol, du traitement de la politique par l'humour grinçant et qu'elle s'inscrivait dans la grande "tradition parodique, des figures de carnaval et des caricatures iconoclastes", cette sculpture a ému et profondément divisé le pays. Un vrai crime de lèse-majesté (ou de "baise majesté" ?) !

    Bartomeu Mari, le responsable du musée d'art contemporain de Barcelone (le Macba) l'a d'abord interdite, comme d'ailleurs l'exposition "La Bête et le Souverain" ("La Bestia i el Sobira") où elle devait être présentée. Mais devant une lever de boucliers venue du monde entier et des accusations de censure, le directeur du Macba a changé son fusil d'épaule en maintenant cette manifestation et en présentant ses excuses. Au risque d'être accusé, par certaines mauvaise langues, d'avoir dû baisser son pantalon ! Quelques jours plus tard, il annonce sans surprise sa démission.

    Aux accusateurs voyant dans cette création une insulte faite à une nation, les défenseurs disent ceci : "L'œuvre n'est pas censée insulter une personne privée, mais reformuler de façon critique une représentation collective du pouvoir souverain". 

    Pas sûr que la royauté espagnole apprécie la nuance !

    "La Bestia y el Soberano", Macba, Barcelone, jusqu'au 30 août 2015
    Macba, Barcelona

  • Boulez, le maître au marteau

    Le 26 mars 2015 marque l'anniversaire d'une des plus grandes figures de la musique actuelle. Pierre Boulez, né le 26 mars 1925, sera mis à l'honneur à la toute nouvelle Philharmonie de Paris, après une intégrale publiée il y a deux ans.

    La musique contemporaine est oubliée dans notre paysage sonore. On a paré le contemporain de tous les maux : un répertoire intellectuelle et " inécoutable" ; une musique réservée à une élite ; un genre dont les ruptures révolutionnaires successives ont été menées jusqu'à la sclérose. Les critiques sur Pierre Boulez ont été à l'aune de ces feux nourris, souvent avec mauvaise foi, parfois non sans raison. Le journal Le Monde rappelle dans son édition du 23 mars 2015 que les fréquentations de Boulez avec l'Etat et les gouvernements successifs lui ont permis "de créer ses propres institutions, à l'instar de l'Ircam" (Institut de Recherche et de Coordination Acoustique/Musique).

    Pierre Boulez a en tout cas marqué le XXe siècle et le début du XXIe siècle. Né dans l'entre-deux guerres, c'est auprès de l'autre grande figure musicale, Olivier Messiaen, qu'il se forme en harmonie. L'élève est doué. Très doué. Pour autant, la rupture entre les deux hommes survient vite, Boulez revendiquant la rupture perpétuelle et reprochant à son professeur son académisme. Rapidement, le jeune musicien trouve ses modèles : Schoenberg, Varèse, Berg mais aussi Stravinsky, "le néo-classique", comme il le dit lui-même. 

    A ce sujet une anecdote existe : en 1955, le jeune Boulez aborde le mythique auteur du Sacre du Printemps pour lui signaler une erreur de mesure sur sa partition de Noces (1914-1917). Le Maître écoute et, docile, reconnaît l’erreur du jeune homme et la corrige immédiatement au crayon. Tout Boulez est là : le talent, la rigueur et l'audace. 

    C'est au "marteau" que Pierre Boulez impose son empreinte, dès 1955, avec, justement, Le Marteau sans Maître. Cette œuvre pour voix et six instruments, s'appuie sur des textes de René Char et constitue une pièce maîtresse dans la discographie de l'ancien élève de Messiaen. Elle marque profondément les esprits et installe durablement le compositeur au centre de la vie musicale de son époque. 

    La carrière de Boulez navigue entre des créations pointues et sans cesse retravaillées (Pli selon Pli, Éclats/Multiples, Structures, Incises, Anthèmes, Répons), un engagement dans la vie musicale de son pays (ses rapports étroits avec l'Etat subventionneur ont été commentés et critiqués à de multiples reprises), le soutien au répertoire contemporain (à travers l'Ircam, nous l'avons dit), la pédagogie et l'orchestration.

    Sur ce dernier point, il n'est sans doute pas assez dit que Pierre Boulez reste un de nos meilleurs chefs d'orchestre. S'appuyant sur une technique pointue et une oreille absolue, ses versions de Mahler, Berg et, bien entendu Stravinsky, frappent par leur précision, leur respect et - n’en déplaisent à, ceux qui accusent le Maître d’être (trop) "analytique" - leurs couleurs !

    Il a été assez dit que Boulez était un technicien hors pair de la composition contemporaine ; redisons, en ce jour anniversaire, qu'il est aussi un magicien du son.     

    "Pierre Boulez", exposition jusqu'au 28 juin 2015 à la Philharmonie de Paris
    Pierre Boulez, Intégrale, 13 CD, 
    Deutsche Grammophon, juin 2013
    "Entretien avec Pierre Boulez : Les années d'apprentissages (1942-1946)", par François Meïmoun