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  • Des papillons dans l’estomac

    Les papillons. Voilà quel est le thème et le titre du dernier album de la pianiste franco-arménienne Varduhi Yeritsyan.

    Commençons tout de suite par dire qu’il y a bien plus que ces lépidoptères dans la première œuvre proposée dans cet opus, puisque Varduhi Yeritsyan s’attaque à Carnaval, l’un des joyaux pour piano de Robert Schumann. Scènes naturelles, rêveries poétiques et séquences bucoliques se succèdent dans une de ces créations assez incroyables de la musique classique. .

    Œuvre romantique et même bucolique, cette série de pièces pour piano intéresse les musicologues en raison de sa composition et de ses deux séries de notes – la-mi bémol-do-si donnant dans la notation allemande ASCH et la bémol-do-si pour AsCH – revenant invariablement. Ces séries font référence à la cité d'Asch (devenue Aš, en République tchèque), ville natale de Ernestine von Fricke qui était la fiancée de Robert Schumann à la date de composition en 1834. Ces lettres renvoient également au nom du compositeur. Voilà pour la partie musicologique de ce Carnaval.

    Un Carnaval qui prend des allures de délicieuse promenade, grâce au toucher de Varduhi Yeritsyan. L’insouciance autant que la légèreté sont de mise dans ces pièces qui se nomment "Pierrot", "Arlequin", "Coquette", "Promenade", "Pantalon et Colombine" ou encore… "Papillon".

    Nous y voilà. Moins léger qu’il n’y paraît, moins banal, ce Carnaval virevolte et étincelle, par la grâce d’une composition ambitieuse et brillante où la virtuosité n’écrase jamais l’œuvre. Dans le livre de présentation, Varduhi Yeritsyan parle moins de cette première fiancée que d’une jeune élève que Robert Schumann enseigne, une certaine Clara Wieck. Elle deviendra sa femme quelques années plus tard. "C’est bien elle la muse du compositeur de neuf ans son aîné, celle à qui il pense quand il écrit, celle à qui il envoie ses partitions sitôt publiées" est-il écrit dans le livret Le romantisme est bien là, et jusqu’à ces deux autres suites derrière lesquelles on peut sans aucun doute lire des messages : "Reconnaissance", "Aveu".

    Ça papillonne, ça virevolte, ça s’épanouit

    Avant de parler d’une autre œuvre de Robert Schumann présente dans ce bel album, parlons d’autres papillons qui virevoltent dans l’album. Il y a ces courtes pièces pour piano de Jules Massenet à la modernité évidente mais qui sert surtout un certain naturalisme. Aux Papillons noirs, vient se joindre ces Papillons blancs, tout en impressionnisme et en légèreté. Citons aussi cette autre courte pièce, sobrement intitulée Papillon (évidemment !). Le compositeur norvégien Edvard Grieg a composé un joli divertissement à la facture classique. Il y a de la légèreté et de la grâce dans ce séduisant opus 43.

    Mais faisons un retour vers Robert Schumann avec ses Variations ABEGG op. 1 et la bien nommée Papillons, op. 2, une œuvre de jeunesse donc, composée entre 1829 et 1830. Ce que l’on a appelé les Variations sur le nom "Abegg" renvoie, à l’instar de son Carnaval, au travail de composition et de musicologie faisant correspondre des notes à des lettres. Cette fois, ce sont les lettres ABEGG qui forment la trame de ces variations à la facture romantique. Pas de papillons donc, ici, mais une évidente légèreté et simplicité qui renvoie à cet lépidoptère aimé de nos campagnes. De nombreux spécialistes voient dans le nom de ces variations une référence à une amie de Robert Schumann, Pauline von Abegg. Varduhi Yeritsyan se promène dans ces six variations avec un plaisir non dissimulé. La technique et la virtuosité ne prennent pas le pas sur la noblesse de cette composition qui annonçait déjà le futur grand maître qu’allait être Schumann.

    La suite Papillons op. 2 de Robert Schumann fait partie, avec Carnaval et Variations QABEGG des toutes premières œuvres du musicien allemand. Si l’on s’intéresse à l’histoire de cette pièce, on sera surpris de voir qu’il ne s’agit pas a proprement parlé d’une pièce bucolique, mais plutôt d’une mise en musique autour d’un bal mondain. Ça papillonne, ça virevolte, ça s’épanouit dans cette œuvre où la jeunesse, l’insouciance (pensons aux Variations n°11 et 12) et la grâce sont omniprésentes. Varduhi Yeritsyan et Robert Schumann nous entraînent avec eux dans cette soirée mondaine et cette comédie humaine où la séduction et l’amour ne sont jamais très loin. Du romantisme, encore et toujours. 

    Varduhi Yeritsyan, Papillons, Indesens Calliope Records, 2024
    https://indesenscalliope.com
    https://www.facebook.com/VarduhiYeritsyanPianiste

    Voir aussi : "Basson, toi mon ami"

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  • No Dames, no drames

    C’est une anthologie à la fois étonnante et engagée que propose le contralto Théophile Alexandre, accompagné du Quatuor Zaïde. Charlotte Maclet, Leslie Boulin Raulet, Sarah Chenaf et Juliette Salmona sont évidemment au cœur d’un album singulièrement titré  No(s) Dames.

    Le propos de l’opus est de s’intéresser aux grandes héroïnes de l’art lyrique pour qui "dames" rimaient surtout avec "drames". Parmi ces femmes fatales, figurent Carmen (Bizet), Salomé (Strauss), La Reine de la Nuit (La Flûte enchantée de Mozart), Manon (Massenet), Eurydice (Orfeo Ed Euridice, Gluck), Violetta (La Traviata de Verdi) ou Dalila (Saint-Saëns).

    La principale singularité de l’opus est de "réunir 23 icônes opératiques de 17 compositeurs différents, dans un cadavre exquis musical reliant ces arias les unes aux autres, dérangeant leurs clichés de madones, de putains ou de sorcières, et dessinant en creux le portrait d’une seule et même idole masculine : la Dame, telle que fantasmée et imposée aux femmes par les hommes depuis des siècles, par-delà les cultures ou les continents."

    L’auditeur pourra trouver quelques grands tubes du répertoire classique, baroque et lyrique :  La Sonnambula de Bellini ("Ah! non credea", acte 2), La Force du Destin et La Traviata de Verdi, Bellini (Norma, I Capuleti E I Montecchi) ou le bouleversant "L'ho perduta" des Noces de Figaro de Mozart.

    Le chef d’œuvre qu’est "Youkali"

    La chanson de Solveig de Peer Gynt de Grieg sonnera doucement aux oreilles françaises qui retrouveront bien entendu la mélodie qui a inspiré "Lost Song" de Serge Gainsbourg.

    Théophile Alexandre s’épanouit avec panache dans des airs baroques, que ce soit l’Orfeo Ed Euridice de Gluck ("Odio, furor, dispetto", Armida d’Haydn ou Alcina d’Haendel ("Ah! Mio Cor"). On frissonne au son de Cavalli, "Dell' antro magico" (Il Giasone), avec cette expressivité servie par la voix puissante et tourmentée de Théophile Alexandre.

    Le quatuor à cordes féminin Zaïde s’attaque en instrumental à d'autres morceaux du répertoire classique :  le "Barcarolle" des Contes d'Hoffmann, le prélude d'I Masnadieri de Verdi, un autre prélude, celui de Samson et Dalila de Saint-Saëns et "La Reine de la Nuit" de La Flûte enchantée.

    Il faut aussi s’arrêter sur ces titres que sont l’étonnant extrait de La Pucelle d'Orléans ("Adieu, forêts") de Tchaïkovski, le tango "Yo soy María" tiré de María De Buenos Aires de Piazzolla, sans oublier, bien entendu, l’aria de l’opéra Zaïde de Mozart ("Tiger, Wetze nur die Klauen!").

    Dans cet album, il faut enfin ne pas passer à côté de ce chef d’œuvre qu’est "Youkali", le bouleversant tango tiré de l’opéra Marie-Galante de Kurt Weil.

    Un énorme vent de liberté souffle sur l’album de Théophile Alexandre & Quatuor Zaïde, avec le projet que, pour une fois, "drame" ne rime plus avec "dame".

    Théophile Alexandre & Quatuor Zaïde, No(s) Dames, 2022
    http://www.theophilealexandre.com
    https://www.quatuorzaide.com

    Voir aussi : "Emoción à tous les étages"

    Photo © Julien Benhamou

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