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prélude

  • Un bon rafraîchissement pour les Suites de Bach 

    Les célébrissimes Suites pour violoncelle de Bach trouvent avec Henri Demarquette un nouveau souffle qui ne dépaysera pas les amateurs de classique. Dans le livret de l’album proposé par les éditions Evidence, Erik Orsenna rappelle que ces Suites sont un des quelques miracles qui font l’histoire de l’art. Œuvres copiées par la soprano et seconde épouse de Bach, Anna Magdalena Bach, les Suites furent "perdues" pendant plusieurs siècles avant d’être découvertes au XXe siècle par Pablo Casals. Depuis, elles sont devenues incontournables.  

    Certes, on reconnaîtra instantanément les premières notes du "Prélude" de la Suite n°1 BWV 1007. Par contre, le violoncelliste français choisit de la mener tambour battant (moins de deux minutes), avant de s’engager avec entrain dans la "Courante". Oui, assurément, mine de rien il souffle un vent de fraîcheur dans ces suites pour violoncelle qui font partie de ce qui s’est fait de meilleur en matière musicale. Pas moins.

    L’envoûtement indéniable dans l’incroyable "Sarabande". L’archer d’Henri Demarquette caresse les cordes avec amour, avant les deux "Minuets" et une "Gigue" enjouée. Il faut avouer que des Suites pour violoncelle, on ne connaît que la première. Pire, le premier mouvement. Voilà l’autre intérêt de s’arrêter à cette intégrale, avec par exemple une étonnante Suite n°2 BWV 1008 plus en tension, à l’instar de la "Prélude" que l’on dirait douloureuse, contrebalancée par une "Allemande", vivante et consolatrice. Henri Demarquette s’en empare avec une indéniable virtuosité. Virtuosité encore avec cette "Courante" à la belle densité. On est captivés par la "Sarabande" de cette deuxième Suite. Elle se déploie avec élégance mais aussi ce je ne sais quoi de mélancolie, comme si l’on était au bord d’un gouffre métaphysique. À qui parlait Bach lorsqu’il composait ce mouvement ? Qu’importe.

    L’auditeur se laissera vite embarqué par cet enregistrement à la fraîcheur indéniable. Arrêtons-nous deux secondes sur la suite "Minuets I & II". Ces menuets rappellent que Bach clôt avec génie la période baroque et une élégance hors-pair. Le rythme est au cœur de cette partie irrésistible et d’une belle fraîcheur. La "Gigue" qui vient conclure la deuxième suite a un souffle plus singulier encore. Bach y voit une manière de revenir aux traditions musicales de son pays, avec cet enthousiasme que retranscrit Henri Demarquette. 

    Mine de rien il souffle un vent de fraîcheur dans ces suites pour violoncelle

    La Suite n°3 BWV 1009 commence par un "Prélude" rutilant et impressionnant dans sa célérité, demandant au violoncelliste une virtuosité impeccable qui rend la modernité à cette entrée en matière. Suit une "Allemande" plus complexe mais aussi plus alerte. Autant certainement que la "Courante" de cette troisième Suite, avant la somptueuse et mélancolique "Sarabande".

    L’auditeur sera surpris d’entendre ces "Bourrées I & II" d’une singulière modernité. Captivantes, elles sont sans nulle doute, avec la "Sarabande", l’une des pièces maîtresses de cette Suite n°3. Elles viennent appuyer la conclusion donnée par une délicieuse "Gigue". Henri Demarquette s’en empare avec un plaisir intact et une solide maîtrise, indispensable pour qui veut s’emparer de ces œuvres de Bach.  

    Dans son double album, le deuxième disque est consacré aux Suites N° 4, 5 et 6. Véritable marathon musical donc pour s’approprier ce qui est un des joyaux du répertoire classique occidental. Le magique dans l’histoire est que le compositeur allemand parvient à surprendre son auditeur en dépit de la structure identique : prélude, allemande, courante et sarabande. Après s’être joué du rythme dans le "Prélude" de la Suite n°4, Bach choisit de construire son "Allemande" comme une onde nonchalante mais néanmoins enjouée. Moins vive cependant que sa Courante" à la fois joyeuse et espiègle. On remarquera dans cette quatrième Suite pour violoncelle sa durée sensiblement plus longue que pour les précédentes. Ce que confirment les deux Suites suivantes. La "Sarabande" de la quatrième ne déroge pas à cette remarque. Elle se déploie tel un adagio poignant. Les "Bourrées I & II" viennent apporter de la fraîcheur et de la vitalité, avant une "Gigue" dans le plus pur style du Kantor de Leipzig.

    L’ouverture ("Prélude") de la cinquième Suite BWV 1011 cueille à froid l’auditeur : lente, sombre pour ne pas dire funèbre, avant de se déployer dans toutes ses couleurs. Pour l’"Allemande", Henri Demarquette utilise toute la palette de son instrument, avec un mélange de virtuosité et de fraîcheur. Après une "Courante" menée efficacement, l’auditeur trouvera la "Sarabande" de la cinquième Suite poignante dans sa singulière pureté. Bach surprend avec le choix de la gavotte pour l’avant-dernière partie. Il s’agit de danses traditionnelles. Le compositeur allemande s’approprie ces rythmes populaires pour en faire des œuvres d’art passionnantes et touchantes. Comme pour les autres Suites, une "Gigue" vient conclure la cinquième avec une grâce indéniable.

    Terminons avec la Sixième et dernière Suite BWV 1012. L’auditeur y trouvera une légèreté que n’avait certes pas la précédente œuvre. La virtuosité est indispensable pour qui veut bien s’emparer de passages à la fois dangereux et fascinants ("Prélude"). L’"Allemande" qui la suit est le plus long morceau de l’album. Lent, nostalgique, mélancolique, cette partie séduit par sa simplicité. Après une "Courante" à la jolie prestance, place à une "Sarabande". Là encore, Bach prouve qu’il est à jamais indissociable de cette danse. Cette sarabande se déplie avec onctuosité. Le violoncelle lui donne des allures de chant humain amoureux.

    On a souvent vanté, à juste titre, les vertus pédagogiques de ces Suites. Il faut ici les écouter – et c’est toute la qualité de l’enregistrement d’Henri Demarquette – comme de vraies créations musicales où l’âme de Jean-Sébastien Bach se livre, à l’instar de cette superbe sarabande. Une nouvelle fois, c’est la gavotte ("Gavottes I & II") qui est au cœur de l’avant-dernière partie des Suites pour violoncelle de Bach. Bach magnifie la gavotte comme jamais. Henri Demarquette est impeccable ici dans l’interprétation majuscule, avant la "Gigue" toute en nuances de la sixième Suite, rafraîchissante comme tout le reste du double album.  

    Jean-Sébastien Bach, Suites pour violoncelle, Henri Demarquette, Evidence, 2024
    https://henridemarquette.fr
    https://evidenceclassics.bandcamp.com/album/bach-the-complete-cello-suites
    https://www.facebook.com/evidenceclassics/?locale=fr_FR
    https://www.facebook.com/HenriDemarquetteOfficiel/?locale=fr_FR

    Voir aussi : "Brahms doublement suisse (et même triplement)"

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  • Yves, Ariana et Caroline 

    C’est une création majestueuse qui nous est proposée, via la pianiste Caroline Fauchet. Yves Levêque la dirige, ainsi que l'Orchestre Colonne, pour son Concerto en do mineur, surnommé "Ariana". Cette œuvre, enregistrée en création mondiale en novembre 2022 à la Salle Colonne, a remporté les premiers prix aux concours internationaux "World Classical Music Awards", "World Grand Prix Music Contest", "Royale Music Compétition", "Royal Sound Music Compétition", "Franz Schubert International Music Compétition" et le "World Online Music Competition". N’en jetez plus ! Voilà qui est en tout cas un indice que nous avons à faire à une œuvre contemporaine qui a toutes les chances de rester dans les annales. Ajoutons aussi qu’au départ de ce concerto, il y a une série télévisée pour lequel Yves Levêque avait composé en 2019 un court générique.  

    Ariana s’inscrit dans une veine néo-romantique, marchant avec audace sur les pas de Rachmaninov. Le premier mouvement "Allegro molto moderato" est d’une puissance incroyable, servie par le jeu virtuose de Caroline Fauchet. Le souffle slave est indéniable dans ce qui s’apparente au portrait musical d’une Ariana rêvée. Est-elle russe, slave, orientale ou française ? L’auditeur pourra s’en faire son idée. 

    On s’attendait pour cette création néo-classique à un deuxième mouvement adagio ? On l’a.

    On s’attendait pour cette création néo-classique à un deuxième mouvement adagio ? On l’a, et c’est même un "Adagio Sostenudo". Ce mouvement s’étire avec grâce et une suavité toute mélancolique, servi par une pianiste décidément au diapason. Les cordes vibrent comme jamais, comme aux grandes heures compositeurs russes romantiques. C’est une respiration aux teintes orientales que nous propose Yves Levêque et l’Orchestre Colonne.

    Un "Allegro Scherzando" vient compléter le concerto pour piano. Très "musique française" – on pense à Ravel et Saint-Saëns – Yves Levêque propose une partie comme apaisée, mais non sans couleurs. Le piano de Caroline Fauchet se fait plus subtile encore. L’œuvre devient également ici contemporaine, avec ces rythmes mystérieux, et presque primaires. L’auditeur notera par ailleurs l’équilibre dans la composition de cet allegro tout aussi puissant que le premier mouvement. Les cordes font là aussi merveille, sans que jamais le piano de Caroline Fauchet s’efface ou ne soit au contraire écrasé par l’ensemble Colonne. Il prend même le lead dans la toute dernière partie du mouvement, avec une grâce mêlée de joie de vivre et de lyrisme, concluant avec conviction ce que le compositeur nomme "une fresque musicale tonale".

    C’est une œuvre classique qui vient compléter l’album, comme pour rappeler l’une des influences d’Yves Levêque. Honneur donc à César Franck, avec une œuvre tardive, son Prélude, Choral et Fugue composé en 1884 et que Caroline Fauchet, de nouveau, interprète avec passion.  Le premier Prélude Moderato se déploie sur une délicate ligne mélodique romantique. Le Prélude est suivi d’un Choral à la solennité évidente, pour ne pas dire au mysticisme. Le style classique français est à l’honneur dans ce sens de l’équilibre et de la retenue. La surprise vient sans doute pour l’auditeur de la Fugue. César Franck suit ici les pas de Jean-Sébastien Bach, tout en y ajoutant sa modernité et les derniers échos du mouvement romantique. Vraiment éclatant.   

    Yves Levèque, Ariana Concerto en do mineur, César Franck, Prélude, Choral et Fugue, FWV21,
    Caroline Fauchet (piano), Orchestre Colonne, IndéSens Calliope Records, 2024
    https://yves-leveque.com
    https://www.caroline-fauchet.com 
    https://www.lapetitemaisonalourmarin.com

    Voir aussi : "Franck par Lazar"
    "Winter is coming"

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  • Franck par Lazar

    César Franck : voilà un compositeur discret, pour ne pas dire oublié, et dont la popularité semble beaucoup se limiter au "Panis angelicus". Dommage. On doit remercier le pianiste français Ingmar Lazar pour ce choix d’œuvres pour piano, à commence par la délicate première sonate commençant par un "Larghuetto-Allegro moderato" tout en finesse.

    Avec César Franck, on est au cœur de cette musique française de la deuxième moitié du XIXe siècle. Alors que la musique allemande et romantique domine et que le modernisme s'annonce, la France reste dans une facture classique, avec parfois une fausse candeur ("Adagio, andante moderato"), mais sans jamais vendre au diable son élégance, ni ses influences romantiques (le troisième mouvement de la Sonate n°1, "Rondo, allegro vicace").

    L’auditeur trouvera ce puissant, subtil et ambitieux "Grand Caprice" (1843), aux arabesques sonores incroyables et demandant à l’interprète – ici, Ingmar Lazar – une virtuosité implacable.

    Puissant, subtil et ambitieux 

    L’album proposé par Hänssler et Ingmar Lazar propose un premier "Prélude, aria et fugue" en trois parties, avec toujours cette facture romantique au classicisme très "musique française". On se croirait dans les salons bourgeois du début de la IIIe République, car l’œuvre a été écrite entre 1886 et 1887. César Franck se déploie avec tact et brillance les trois mouvements.

    L’auditeur s’arrêtera sans doute avec plaisir sur le lent, tourmenté et aux accents nostalgiques et douloureux "Aria" ("lento"), avant un "Final" enlevé, pour ne pas dire agité ("allegro molto ed agitato").    

    L’album d’Ingmar Lazar se termine par un dernier "Prélude, choral et fugue". Écrite en 1884, l’œuvre se place d’emblée, à travers son titre, sur les pas de Jean-Sébastien Bach, avec un "Prélude" moderato au romantisme bouillonnant. Le "Choral, "poco più lento" se déploie avec une grâce indéniable, servi par un pianiste magnétique.

    Avec le dernier mouvement, "Fugue", nous voilà chez Bach. Mais un Bach catapulté en pleine deuxième mouvement du XIXe siècle, avec cette touche française propre à César Franck.    

    Et si l’on concluait en disant que l’album propose là l’une des plus séduisantes découvertes du compositeur français ? 

    César Franck, Piano Works, Ingmar Lazar, Hänssler, 2023
    https://www.facebook.com/ingmarlazarpiano
    https://www.ingmar-lazar.com
    https://haensslerprofil.de/shop/soloinstr-ohne-orchester/cesar-franck-piano-works

    Voir aussi : "Histoires de roux et de rousses"

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