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  • Liza by Lucile

    On peut élever une statue à La Boîte à Pépites, un éditeur qui a courageusement choisi de mettre à l’honneur des compositrices oubliées – un euphémisme, hélas ! Pour cet album consacré à Liza Lehmann (1862-1918), née anglaise d’un père allemand, Lucile Richardot, la mezzo-soprano française réclamée dans le monde entier, vient donner de sa voix et de sa sensibilité pour sortir de l’ombre 24 chansons. La diva est accompagnée par Anne de Fornel au piano. L’enregistrement contient également des interprétations  du baryton Edwin Crossley-Mercer, de la soprano Marie-Laure Garnier et de la violoniste Manon Galy.  

    Chanteuse renommée à son époque, soutenue par Clara Schumann en personne, Liza Lehmann doit son passage à la composition à un problème de santé puis à un mariage qui la pousse à se retirer de la scène lyrique alors qu’elle n’a que 34 ans. C’est la composition qui a maintenant ses faveurs, avec en particulier la musique de chambre (Trois Valses de Sentiment, Album Of  Ten Pianoforte Sketches, Good Night, Babette!, pour ne citer que ces opus). Mais c’est avec la mélodie qu’elle perce réellement.

    Sa "première composition sérieuse" est In A Persian Garden, un cycle de 22 mélodies pour quatre voix et piano qui lui assure un incontestable succès. Ce cycle est salué à son époque comme la meilleure pièce jamais écrite par une compositrice. L’album contient deux morceaux de cet opus, Ah! Moon of my Delight et Ah! Not a Drop. Il y a du néoromantisme dans ces deux extraits, plus occidentaux qu’orientalisants – ce qui contredit le titre de l’œuvre.

    Hormis ces deux extraits d’In A Persian Garden et la charmante mélodie You And I sur un texte de Mary Atnold Childs (1897), l’enregistrement propose des airs du XXe siècle.

    Compositrice prolifique, Liza Lehman a écrit en tout plus de 350 mélodies, un genre particulièrement prisé en Angleterre. On imagine le choix cornélien de devoir choisir 24 pièces, témoignant de l’inspiration et du travail d’une compositrice sensible et engagée car l’artiste a défendu toute sa vie l’égalité entre hommes et femmes, à une époque où ce combat semblait perdu d’avance.

    Le tact de Lucile Richardot sert des mélodies au romantisme certain inspiré des lieder du XIXe siècle (The Beautiful Lady), sur des textes brillants (The Lake Isle Of Innisfree de W.B. Yeats). Le classicisme de la compositrice anglais ne l’empêche pas d’affirmer sa personnalité (Dusk In The Valley). Londonienne d’origine, Liza Lehmann rend hommage à la campagne (A Bird In The Sky) et aux traditions en s’inspirant des traditions folkloriques, à l’exemple d’un extraits de ses chants folkloriques bretons (I Dreamt My Love Was Singing).

    Une compositrice sensible et engagée

    Lucile Richardot excelle dans cette découverte de ce patrimoine musical anglais qui sait toucher aux cœurs (Echoes). William Shakespeare n’est pas absent dans l’album. Edwin Crossley-Mercer interprète avec Lucile Richardot un extrait du Marchand de Venise (le somptueux How Sweet The Moonlight Sleeps Upon This Bank). Restons au XVIe siècle avec Ben Johnson, un contemporain de Shakespeare, dont la compositrice anglais a mis en musique un de ses poèmes, The Lily Of A Day, aux paroles qui résonnent plus que jamais en 2025 :  "Ce n'est pas en croissant comme un arbre / En masse, que l’homme devient meilleur… / En de petites proportions, nous voyons de véritables beautés ; / En de courtes mesures, la vie peut être parfaite".

    On saluera le travail mélodique sur un texte d’Evelyn Young, In The Watches Of The Night, ou encore sur la chanson The Guardian Angel, écrit par Edith Nesbit. Beaucoup de femmes sont du reste mises à l’honneur dans ce très bel album, que ce soit Constance Morgan (Evensong), Marguerite Radclyffe Hall (le délicat The Silver Rose), Ethel Clifford (l’onirique By The Lake) ou Christina Rossetti (le funèbre When I Am Dead, My Dearest, composé quelques semaines avant le décès de Liza Lehmann).

    L’originalité de la compositrice étincelle également dans l’enlevé Good Morning, Brother Sunshine! écrit par J.W. Foley ou dans l'extrait du cycle à succès The Daisy-Chain datant de 1901 (Il No One Ever Marries Me). L’auditeur pourra être subjugué par ce singulier song tiré d’un superbe texte – traduit de l’azéri – de Mirza Shafi, Oh, Tell Me, Nightingale ("Ô dis-moi, Rossignol, doux oiseau, / Pourquoi ta voix ne se fait plus entendre, / Emplissant nos âmes de ravissement"). Lucile Richardot sert encore le mélange de puissance évocatrice et de subtilité lorsqu’elle interprète un poème amoureux de Robert Browing (Love, If You Knew The Light), lorsqu’elle déclame un amour avec tendresse et romantisme (Thoughts Have Wings) ou lorsqu’elle se fait onirique (When The Shadows Fall Tonight).

    Pour beaucoup, Liza Lehmann sort enfin de l’ombre. Grâce à La Boîte à Pépites, donc. Gros Big up pour cette maison, infatigable dans son projet artistique !     

    Liza Lehmann, Songs, La Boîte à Pépites, Lucile Richardot et Anne de Fornel, 2025
    https://citedescompositrices.com/la-boite-a-pepites-label
    https://www.opera-comique.com/fr/lucile-richardot

    Voir aussi : "Rita Strohl en robe de chambre"

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  • Lorsque la Russie s’enlise contre un plus petit qu’elle

    Un dictateur russe, sûr de son génie tactique, se lance dans une opération militaire en s’en prenant à un pays frontalier vingt fois plus petit. Il est certain qu’en quelques jours il mettra au pas son voisin grâce à son armée pléthorique et surarmée, histoire d'annexer un pays et de s'étendre un peu plus. Mais c’est sans compter l’esprit de résistance du pays attaqué.

    Vous pensez que l’on parle de la guerre russo-ukrainienne toujours en cours depuis février 2022 ?

    Et bien, raté.

    Il s’agit de la Guerre d’Hiver déclenchée en novembre 1939 menée par une Russie aussi stupide qu’hautaine contre son voisin finlandais. Ca vous rappelle quelque chose, non ? Contre toute attente, une mobilisation générale a lieu, envoyant des citoyens sur un large front glacé par un hiver particulièrement rigoureux. Mal préparés, sous-estimant leur adversaire et affaiblie par les purges dans l’armée quelques années plus tôt, la Russie - appelée URSS - se casse les dents. Et, par dessus le marché, la Finlande peut compter sur le sniper le plus doué de l’histoire et qui personnifie comme personne l’esprit de résistance du Petit Poucet finnois contre l’ogre russe.

    Dans Les Guerriers de l’hiver (éd. Michel Lafon), Olivier Norek choisit de s’attacher à un groupe d’amis de la petite ville de Rautjärvi, non loin de la frontière russe. Parmi ces jeunes appelés finnois, l’attention se porte sur Simo Häyhä, bientôt surnommé "La Mort Blanche" par des soldats russes surpris et terrifiés par les talents de sniper du jeune homme. 

    Une Russie aussi aveuglée par l’Ukraine qu’elle ne l’a été avec la Finlande il y a 75 ans

    Olivier Norek, habitué aux thrillers robustes (Code 93, Territoires, Surtensions, Surface) surprend avec ce roman historique sur un épisode oublié des années 40.

    Il est vrai que ce que l’on a appelé la Guerre d’Hiver a été oublié du fait de l’événement monstrueux qu’était La Seconde Guerre Mondiale et qui n’en était qu’à ses débuts. Et pourtant, en Finlande, ce conflit contre la Russie, qui a duré de novembre 1939 à mars 1940 fait figure de moment majeure pour cette nation. Une vraie guerre patriotique aux yeux des Finlandais et voulue par Staline qui voyait dans l’invasion de la Pologne par Hitler l’occasion de s’étendre. Le dirigeant nazi saura se souvenir des difficultés de l’URSS à mettre au pas une nation de quelques millions d’habitants. À peine enclenchée, grâce à un faux attentat (classique !), le dictateur russe est persuadé que l’Armée Rouge ira jusqu’à Helsinki sans problème. C'est l'humiliation pour lui !

    Finalement, les enjeux de cette guerre sont moins importants que la vie au plus près du front. L’auteur français consacre des pages hallucinées sur les tueries comme sur l’apprentissage de l’art de la guerre par d’anciens ouvriers ou paysans contre un ennemi surpris par la résistance finnoise comme par l’hiver. Olivier Norek fait aussi et surtout de cette page d’Histoire une illustration de notre actualité, avec une Russie aussi aveuglée par l’Ukraine qu’elle ne l’a été avec la Finlande il y a 75 ans.  

    Olivier Norek, Les Guerriers de l’hiver, éd. Michel Lafon, 2024, 448 p.
    http://michel-lafon.fr/livre/3056-Les_guerriers_de_l_Hiver.html
    https://www.facebook.com/oliviernorek
    https://www.instagram.com/norekolivier

    Voir aussi : "Les quatre fantastiques"
    "Sanglantes eighties"

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