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Bla Bla Blog - Page 311

  • Cécile Hercule pour avoir Bonne Conscience

    cécile herculeJ’ai plutôt bonne conscience à vous parler de Cécile Hercule. Elle nous revient en 2016, six ans après son premier album La Tête à l’Envers. Celle qui officiait aux côtés de Mickey 3D nous propose un premier single, Bonne Conscience, co-écrit avec Odelaf et disponible sur Muzicenter.

    Rien de tel que la légèreté pour dire des choses graves et sérieuses ! La chanteuse égratigne, avec une voix fragile, cette "bonne conscience" qui nous accompagne sans que nous en ayons vraiment... conscience.

    Dans ce titre, elle prend pour cible des sujets a priori consensuels que sont le développement durable, la lutte contre la pollution, la consommation alternative et l’économie équitable.

    Moi aussi, je suis écolo, moi aussi je recycle, moi aussi je pense à la planète, nous dit en substance l’artiste : "Depuis ce beau jour je trie mes déchets / Emballages et cartons dans la poubelle jaune / Faut regarder l’étiquette ça demande des neurones / Si j’me trompe la gardienne va me détester." Et d’ajouter aussitôt : "Depuis j’ai bonne conscience / Même si j’comprends pas, si tout cela a un sens." Cette manière de raconter quelques tranches de vie d’une bobo parisienne qui se nourrit de baies de goji, d’algues, de petite épeautre et de carottes à 12 euros 50 est savoureuse et se goûte avec plaisir, en plus de donner matière à réfléchir.

    Cécile Hercule se fait sarcastique lorsqu’elle nous met sous le nez la vanité de cette bonne conscience quotidienne : "Quand je vois les efforts que je fais tout le temps / Pour qu’elle fonctionne mieux ma petite planète / Il faudrait que le bio tout le monde s’y mette / À Gaza, en Syrie, en Afghanistan."

    Bien vu et à suivre : un nouvel album de Cécile Hercule devrait sortir au printemps, grâce au financement du site de crowdfunding Ulule. Alternative jusqu’au bout des ongles.

    Cécile Hercule sur Ulule
    Cécile Hercule sur Facebook

    Cécile Hercule, "Bonne conscience"

  • Carmen ou comment fabriquer un opéra

    carmen.JPGRendre l’opéra accessible à tous est la petite ritournelle qui ne mange pas de pain et qui semble faire l’unanimité. Par contre, dès qu’il s’agit de la mettre en application…

    Depuis 2006, sous la houlette de Jacques Attali, La Fabrique Opéra a retroussé ses manches et s’est attelée à un projet qui mérite d’être salué. Le principe ? Monter un opéra de A à Z grâce à l’économie participative, au maillage associatif et à toutes les bonnes volontés. L’objectif est également de populariser un genre n’ayant – hélas ! – pas les faveurs des jeunes générations.

    Ce projet a démarré à Grenoble et entend bien essaimer partout en France et encourager la production d’opéras. En entendant Orléans courant 2016, La Fabrique Opéra Toulouse proposera quatre représentations de Carmen de Georges Bizet au Zénith de Toulouse les 3, 4, 8 et 9 mai 2016.

    Parler d’opéra collaboratif et populaire n’est pas un vain mot. Le concept de La Fabrique Opéra est d’ouvrir la création d’un opéra de A à Z à tous. Puisque le spectacle lyrique est souvent impuissant à faire venir de nouveaux publics, c’est ce nouveau public qui est invité à investir et gérer un domaine considéré – à tort ou à raison – comme élitiste.

    Monter un opéra : ce projet fou est désormais accessible à tous. Ainsi, à Toulouse près de 400 élèves issus de filières professionnelles, répartis sur 10 établissements de la région, sont chargés de créer de toute pièce un spectacle de Carmen : décors, costumes, coiffures, communication, selon leurs domaines de prédilection. La Fabrique Opéra peut s’enorgueillir d’accueillir parmi ses publics 50 % de néophytes et 30 % de moins de 40 ans (et 62 % viennent en famille) : des chiffres qui feraient pâlir les opéras Garnier, Bastille et consort.

    À cela s’ajoute un mode de financement original : 65 % du budget repose sur la billetterie. Le reste vient d’un mécénat très large – grands groupes, fondations, ministère de l’Éducation nationale, associations – mais aussi du crowdfunding. "Le modèle économique de La Fabrique Opéra permet de proposer des places au tarif moyen raisonnable (autour de 37€), soit moitié moins qu’un opéra traditionnel", apprend-on également sur le site de La Fabrique Opéra.

    Côté spectacle maintenant, les créateurs du Carmen qui sera produit à Toulouse, n’entendent pas mégoter sur la qualité. Stéphane Roche, du Capitole, de Toulouse, est chargé de la mise en scène l’opéra de Bizet. Stanislas de Monredon, chef d’orchestre de La Philharmonie de Toulouse, sera à la direction. Giuseppina Piunti endossera le rôle redoutable et sulfureux de Carmen. Elle côtoiera notamment Luca Lombardo (Don José), Julia Kogan (Micaëla) et Yann Toussaint (Escamillo).

    Une jolie distribution pour un projet ambitieux. Rarement l’expression "rendre l’opéra accessible" n’a paru aussi adéquate.

    Carmen de Georges Bizet, Zénith de Toulouse, 3, 4, 8 et 9 mai 2016
    http://www.lafabriqueopera.com

     

  • Mon Précieux

    C’est une tradition historico-religieuse qui a resurgi ces dernières semaines : celle des reliques. Le protagoniste en est Philippe de Villiers, figure politique de la droite catholique traditionaliste – et accessoirement créateur du Puy du Fou. Connu pour son sens de la communication et pour ses coups médiatiques, l’ancien secrétaire d’État à la culture, ex-Président du Conseil Général de Vendée et actuel député européen, a acquis lors d’une vente aux enchères une ancienne bague de Jeanne d’Arc que l’évêque Cauchon lui aurait dérobé peu avant son supplice du bûcher en 1431. Le dimanche 20 mars 2016, un spectacle au Puy du Fou réunissait 3000 personnes venus accueillir le précieux anneau, à coups d’oriflammes, de cavalcades et de haies d’honneur de chevaliers tout droit sortis de la Guerre de Cent ans. 

    On devine la valeur d’un tel objet et, en l’occurrence, le prix payé plutôt rondelet : 380 000 euros, que le député européen a pu débourser, via la Fondation du Puy du Fou, grâce à une souscription publique. Il n’est pas anodin de préciser que cet anneau quitte la Perfide Albion pour rejoindre le pays de la Pucelle.

    Cet objet trouvera-t-il sa place dans un musée, par exemple à l’Historial Jeanne d’Arc de Rouen, à la maison Jeanne d'Arc d'Orléans ou dans sa maison natale de Domrémy dans les Vosges ? Non. La bague légendaire est désormais exposée dans une chapelle au sein du parc d’attraction du Puy du Fou.

    Non sans provocation ni arrière-pensée, Philippe de Villiers transforme ainsi le gigantesque espace ludique créé il y a près de 40 ans en "lieu de mémoire". Qu’on se le dise : le Puy du Fou n’est plus simplement ce gigantesque espace ludique mêlant décor en carton pâte, reconstitutions de villages ou d’arènes et scénettes restituant des épisodes historiques plus ou moins avérés. L'un de principaux parcs d’attraction français, en acquérant un objet estampillé "historique", entend aussi symboliquement s’élever au-dessus de ses concurrents – Eurodisney ou Astérix en premier lieu – pour garantir une forme d’authenticité dans sa démarche de divertissement. Le Puy du Fou n’est pas tout à fait un parc comme les autres, semble nous dire Philippe de Villiers et ses fidèles qui sont aux manettes. Les adversaires de l’ancien candidat à l’élection présidentielle parlent de "privatisation de l’histoire" alors que des voix – en premier lieu à l’extrême-droite – se félicitent du retour de "l’anneau de Jehanne d’Arc en terre de France" (Marine Le Pen).

    "L’anneau de Jehanne d'Arc" ? En sommes-nous si sûrs ? Arrivé au stade de cet article, le bloggeur ne peut s’empêcher de s’interroger justement sur l’authenticité de qu’il convient d’appeler une relique. Les nouveaux propriétaires, Philippe de Villiers et son fils Nicolas, qui a pris la Présidence du Puy du Fou, assurent que les documents en leur possession attestent que le bijou est bien celui qui a appartenu à la Pucelle d’Orléans. 

    Umberto Eco s’était intéressé au phénomène médiéval des reliques, qui avait vu la multiplication d’objets sacrés (fragments de la crèche de Jésus, étoffes tâchées de sang et de cervelle de saint Thomas, une côte de sainte Sophie, des poussières d’ossements, et cetera) destinés à impressionner les croyants autant qu’à développer les pèlerinages et les trafics en tout genre. L’auteur du Nom de la Rose a ironisé sur le nombre incalculable de ces reliques qu’une personne un tantinet sensée ne prendrait pas au sérieux. La bague de Jeanne en fait-elle partie ? Et d’ailleurs, de quelle bague parlons-nous ?

    L’historien normand Michel de Decker raconte pour Paris Normandie que les spécialistes en repèrent deux : la première a été volée à Jeanne d’Arc lors de son arrestation par les Bourguignons à Compiègne en 1430 alors que l’autre aurait été récupéré par l’évêque Cauchon lors de son procès. L’ecclésiastique l’aurait ensuite offert au cardinal de Beaufort avant que l'anneau ne traverse la Manche. Passons sur les ventes et les achats successifs au cours du XXe siècle, jusqu’à son acquisition par le docteur Hasson en 1947 pour 175 livres sterling. En 1952 puis 1956, la bague est exposée à la Turbie (près de Monaco), à Paris puis à Rouen. Les spécialistes se montrent à l’époque prudents sur l’authenticité de l’objet. Ce qui n’empêche pas quelques tractations en 1980 pour que l’anneau retourne en France. Finalement, l’héritier du Dr Hasson choisir de le vendre aux enchères. Le prix de départ de 19 000 euros est vite dépassé et la fondation du Puy du Fou, présidée par Philippe de Villiers, l’achète.

    Nous parlions un peu plus haut de deux bagues. Oliviez Bouzy, directeur scientifique de l’Historial du centre Jeanne d’Arc d’Orléans fait la remarque que les minutes du procès de Rouen décrivent un anneau en laiton. Or, celui qui a été vendu est en argent. Par contre, il porte des inscriptions attestant qu’il s’agirait bien d’un bijou du XVe siècle ("IHS MAR" pour "IHeSus MARia"). S’agit-il bien de celui que l’évêque Cauchon a dérobé à la jeune guerrière ? Pas sûr. Il pourrait s’agir – ce que le Président du Puy du Fou reconnaît – du premier bijou – en argent donc – qui a été volé par les Bourguignons lors de la capture de la Pucelle à Compiègne.

    En 2016, cette affaire d’anneau de Jeanne remet donc au goût du jour la tradition des reliques, objets à l’historicité plus ou moins douteuse, vénérés pour des raisons parfois autres que religieuses. Pour l’heure, Philippe de Villiers s’est mis la bague au doigt et n’entend pas de sitôt voir cet objet hors du commun lui échapper : "Mon Précieux !" comme le dirait Golum dans Le Seigneur des Anneaux.

    "Le seigneur de l’anneau", Le Monde, 22 mars 2016
    "L’anneau de Jeanne fait-il foi ?" Liberté Dimanche (Paris-Normandie), 20 mars 2016

    "Le nom de la rose, souvenir d'un ossuaire / Hommage à Umberto Eco"

  • Peut-on rire de tout ?

    rabelais,café philo,montargis,humour,rire,loiretLe café philosophique de Montargis proposera sa prochaine séance le vendredi 1er avril 2016, à 19 heures, à la Brasserie du Centre commercial de La Chaussée. Cette date a conduit les participants à choisir un sujet de circonstance : "Peut-on rire de tout ?"

    Le rire est un comportement universel capable de transcender les langues et les cultures. Il est si propre à l’homme, comme le dit Rabelais, que le rire est devenu indissociable du monde des arts et de la culture (comédies, caricatures, films comiques, etc.). La question qui sera posée aux participants du café philo est de savoir si des limites peuvent être posées au rire. Pourquoi rions-nous ? En quoi le rire est-il un comportement social ? Y a-t-il des sujets qui se prêtent plus à rire que d’autres ? Le rire peut-il être violent ? Le rire s’oppose-t-il à la raison ? En est-il un frein ?

    Ce sont autant de points qui seront discutés et débattus le vendredi 1er avril, à partir de 19 heures, à la brasserie du Centre Commercial de La Chaussée de Montargis.

    La participation sera libre et gratuite.

    http://cafephilosophique-montargis.hautetfort.com

  • Je vais vous tanner avec Amilly

    Tanneries.jpgAmilly, vous connaissez ? Cette petite ville accolée à Montargis, dans le Loiret, n’a, a priori, rien qui attirerait un touriste de passage : un patrimoine architectural famélique, un centre ville minuscule vite traversé, l’absence de musée digne de ce nom. Dit de manière abrupte, Amilly fait partie de ces cités d’abord résidentielles, enclavée par Montargis, ennuyeuse et peu sexy.

    Et pourtant ! Et pourtant, les apparences sont trompeuses. Depuis plusieurs années, Amilly se distingue en effet par une politique culturelle et artistique ambitieuse (élitiste pour quelques mauvaises langues). La réputation des concerts de musique classique et baroque ont ainsi largement dépassé le cadre régional et il n’est pas rare que les médias nationaux, Diapason et Classica pour ne citer qu’eux, ne se fassent l'écho des représentations musicales dans la modeste église Saint-Martin. Élitiste ? Les Vendredis de l’Orgue, dédiés à cet instrument sur lequel la mairie continue à investir, est gratuit et offre à un large public l’occasion de découvrir le répertoire de Bach, Vivaldi ou Frescobaldi.

    Depuis une quinzaine d’années, Amilly s’est lancé dans une autre aventure : celle de l’art contemporain. Cela s’était concrétisé avec une première galerie, l’AGART (Association Galerie d’ARTistes), implantée dans le bourg de la ville depuis 2001. 2016 marque une rupture avec la fin de cette galerie qui avait entrepris un gros travail d’ouverture de l’art contemporain à destination de tous les publics : gratuité, visites pédagogiques à destination des scolaires grâce à un solide travail de médiation culturelle, expositions de plus de 80 artistes nationaux ou régionaux... et même un café philosophique. L’AGART vient de fermer ses portes, mais c’est pour permettre à l’art contemporain de se déployer dans un espace beaucoup plus important : 1 500 m² d’exposition (3 600 m² de surface totale) dans d’anciennes tanneries réhabilitées grâce au Conseil Régional de la Région Centre.

    L’inauguration officielle aura lieu en septembre 2016 mais une première exposition est déjà visible jusqu’au 13 novembre 2016, au rez-de-chaussée du bâtiment (d’autres salles d’expositions – vides pour l’instant – existent à l’étage).

    "Œuvre aux singuliers" présente des sculptures, des peintures et des installations de Martin Barré, Christian Bonnefoi, Erik Dietman, Norman Dilworth, Jean-Pierre Pincemin, François Rouan, Claude Viallat et Jan Voss. Le rez-de-chaussée du bâtiment monumental frappe par l’ambition affichée. Le spectateur voyage dans une vaste nef au milieu d’œuvres dont une grande partie est issue du mouvement Supports-Surfaces. Le minimalisme des œuvres exposées (les tableaux de Martin Barré, par exemple) fonctionne bien dans cet espace à l’architecture industrielle. Paradoxalement, le spectateur ne se sent pas écrasé par les compositions monumentales en bronze d’Erik Dietman, par les assemblages en bois de Jean-Pierre Pincemin ou par cet animal monstrueux de Jan Voss que l'on croirait tout droit sorti d’un film de science-fiction : la réussite de cette sorte de cathédrale dédiée à l’art contemporain, unique en Région Centre, est de permettre au visiteur de respirer et de se laisser saisir par la démesure audacieuse des œuvres .

    Le bloggeur émet cependant un bémol: l’absence (provisoire?) de cartels de présentation peut nuire à la visite fluide de l’exposition, d’autant plus si les Tanneries visent à conquérir un vaste public, via notamment la médiation culturelle.

    L’ambition du centre est de devenir un lieu emblématique de l’art contemporain, à la fois lieu d’exposition sur deux niveaux mais aussi catalyseur de talents. À partir d’avril, les Tanneries vont en effet devenir un lieu de résidence pour artistes : Jennifer Caubet réalisera sur place une œuvre destinée au parc de sculptures. Ce centre d’art est à suivre, sans nul doute, et avec le plus grand intérêt. J’aurai d’ailleurs sans doute l’occasion de vous tanner avec Amilly.

    "Œuvre aux singuliers", Les Tanneries, 19 mars – 13 novembre 2016,
    du jeudi au samedi de 14 à 19H, ou sur rendez-vous

    Amilly.com
    "Les Simonnet, en pleine(s) forme(s)"

    Merci à Ihssane

  • Roman-feuilleton 3.0 sur un air de tango

    lcntdr-cover-ch1.jpgDans la grande tradition des romans-feuilletons du XIXe siècle, Céline Guarneri propose de renouveler ce genre sur le web grâce à un polar disponible gratuitement sur son site.

    Le Ciel ne te doit rien, dont les premiers chapitres sont en ligne ici, peut être qualifié de roman-feuilleton 3.0 et de "work in progess" dont l’ambition artistique mérite que l’on s’y arrête.

    La démarche de l’auteure est au départ de s’émanciper des moyens de publications classiques, que l’artiste elle-même juge "très décevants". L’Internet offre à cet égard de multiples avantages : universalité, gratuité et facilité d’utilisation.

    Depuis la mi-février, Céline Guarneri propose chaque semaine un chapitre supplémentaire de son polar Le Ciel ne te doit rien. Pour une fois, le bloggueur parlera d’un roman qu’il n’a pas terminé – et pour cause : la publication est en cours et va s’étaler sur plusieurs mois, en attendant une publication à la demande.

    Le roman a pour cadre Lyon, une ville que connaît bien l’auteure et qui, dit-elle, "se prête bien aux enquêtes policières". L’histoire – dont on devine qu’elle naviguera entre Lyon et l’Argentine – commence par un attentat et l’enlèvement non moins mystérieux d’une femme. Tony Hujarova, un capitaine de police désabusé est témoin de l’événement, tout comme Amélie, une femme qu’il a houspillée quelques minutes plus tôt. Au même moment, dans un hôpital psychiatrique, Camille, une jeune patiente atteinte d’une lourde dépression et d’amnésie, défie les psychiatres. Lorsqu’elle croise par hasard Estefan Belén, un danseur de tango, un déclic s’opère chez la jeune femme. La suite, le lecteur le découvrira tout au long des semaines qui verront la mise en ligne des chapitres de ce roman mené tambour battant.

    Dans les premières lignes de cet article, il était question de work in progress. Nous pourrions préciser : "work in progress augmenté". Céline Guarneri se lance en effet dans une aventure artistique inédite qui entend dépasser le strict cadre du roman policier : "Le but... est d'inviter d'autres artistes (photographes, dessinateurs, danseurs) à interagir avec le texte et à créer une autre matière à partir de l'histoire. La co-création sera ainsi au cœur de ce nouveau projet", explique l’auteure. Son pedigree lui offre d’ailleurs de sérieux atouts pour une telle démarche car, non contente d’avoir publié de manière traditionnelle romans, théâtre, contes pour enfants et d’avoir été remarquée pour plusieurs nouvelles (lauréate en 2000 du concours "Lire en fête" pour son texte Les femmes et le XXème siècle et primée pour Le héros en littérature dans le cadre de l'émission littéraire "Vol de Nuit" animée par Patrick Poivre d'Arvor), Céline Guarneri est une artiste dotée de multiples facettes : comédienne, réalisatrice, danseuse de tango (le tango tient d’ailleurs une place importante dans Le Ciel ne te doit rien), journaliste ou community manageuse.

    Umberto Eco avait traité d’œuvre ouverte dans un de ses premiers essais (L'Oeuvre ouverte, 1965). C’est également d’une œuvre ouverte dont il est question ici. Céline Guarneri voit ce roman policier, à la facture classique qui ne décevra pas les amateurs du genre, le premier jalon d’une œuvre totale mêlant musiques, photos (par exemple via une ou plusieurs expositions), danses (le tango, toujours), vidéos (un teaser est en ligne) voire – c’est un souhait affirmé de l’auteure – patrimoine historique à travers des visites de la ville de Lyon. Le texte lui-même est appelé à se transformer au fur et à mesure de la publication sur le web grâce au concours des internautes qui souhaitent le faire évoluer dans un sens ou dans un autre. Céline Guarneri "revendique ainsi une démarche éditoriale qui vise à faire bouger les lignes pour montrer qu'édition traditionnelle et autoédition ne sont pas incompatibles, s'enrichissent et se servent l'une l'autre. Une façon de les réconcilier à travers de nouvelles formes de passerelles et de collaborations".

    Ce roman-feuilleton enrichi, work in progress augmenté, n’attend plus que toi, lecteur et internaute, pour vivre et devenir une œuvre totale.

    Le ciel ne te doit rien, web-Feuilleton de Céline Guarneri
    https://www.celineguarneri.fr
    © Tous droits réservés, 2016
    Photo © Heaven Line

  • Pauvre connasse

    Le blackout de Connasse Princesse des Cœurs a paradoxalement assuré une partie de la couverture médiatique de cette comédie sortie courant 2015 et disponible en DVD. Un billet dans Le Monde avait involontairement mis sous les lumières ce premier film, la critique du quotidien parisien regrettant que le distributeur ait refusé toute avant-première à la presse. Voilà pour la petite histoire au sujet de la promotion de ce film, rétrospectivement un feu de paille.

    Parlons maintenant du film en lui-même, d’autant moins anodin que son actrice principale, Camille Cottin, a été nominée pour le César du meilleur espoir féminin.

    Connasse Princesse des Cœurs suit Camilla, une trentenaire aussi belle qu’insupportable. Prétentieuse, glandeuse et bien décidée à vivre dans le bling-bling, parce qu’elle le vaut bien. A défaut d'héritage ou de rente, la jolie désargentée n’a qu’une option : se marier avec le meilleur parti qui soit. Elle décide de jeter son dévolu sur le Prince Harry. La belle a un atout maître pour y parvenir : l’obstination, jusqu’à l’aveuglement. Elle file à Londres obtenir l’assentiment de son futur jules. Mais encore faudrait-il le rencontrer.

    Avouons-le : le synopsis de cette comédie virevoltante et drôle est moins intéressant que le jeu de Camille Cottin (remarquée par l’Académie des Césars) et surtout par le dispositif mis en œuvre par les réalisatrices Éloïse Lang et Noémie Saglio. Ces dernières étaient aux manettes pour la version télé de Connasse, déjà interprétée par Camille Cottin. Ce programme court, diffusé sur Canal + en 2013, a été déclinée et développée pour le cinéma, ce que certains ont regretté.

    Techniquement, Connasse Princesse des Cœurs est une prouesse : à partir d’un scénario cousu-main – et un rôle en or pour une comédienne – Éloïse Lang et Noémie Saglio ont installé une série de dispositifs de caméras cachés, prenant au piège figurants et personnages secondaires (dont Stéphane Bern) face à une vraie comédienne jouant son rôle de connasse française à la perfection. Camille Cottin se met perpétuellement en danger et brouille, à l’instar du remarquable La Bataille de Solferino (de Justine Triet, 1913), la distinction fiction/réalité, au point d’avoir été arrêtée par les forces de l’ordre en plein tournage pour atteinte à l’ordre public. 

    Le débat sur la pertinence du procédé de caméra-café pour un long-métrage a fait bondir des critiques. Pour autant, cette comédie a une saveur et une fraîcheur tout à fait nouvelle, grâce à la performance de celle qui tient le film sur ces épaules. Et ça, ce n’est pas rien.

    Connasse Princesse des Cœurs de Eloïse Lang et Noémie Saglio
    avec Camille Cottin, 2015, 1h22

     

  • Duel pour violoncelle et piano

    duel,cirade,staïcuAu 38, rue de Montpensier, dans une de ces vieilles ruelles du 1er arrondissement de Paris jouxtant le jardin du Palais Royal, le musée du Louvre et la Comédie française, avait lieu un Duel.

    Il se déroulait dans une des plus anciennes salles de la Capitale, sous les ors et les dorures du Théâtre du Palais Royal. Les protagonistes ? Laurent Cirade et Paul Staïcu, de retour pour Duel 2, leur nouveau spectacle créé après une première tournée triomphale dans 36 pays. Les deux musiciens s’affrontent sur scène pendant pendant près d’une heure vingt à coup de violoncelle, piano, violon, mélodica, percussions et autres instruments parfois les plus insolites – scie, didgeridoo ou fil de pêche... L’objet de ce duel ? Faire rire. Mission réussie.

    Dans un show efficace et millimétré, les deux compères, complices et adversaires le temps d’une représentation, détournent les codes du concert classique - costumes et nœuds de papillon inclus - pour en faire un spectacle comique, insolite et virtuose. Laurent Cirade le violoncelliste, a sévi dans le célèbre groupe comique multi-primé Le Quatuor, après plusieurs années à l’Orchestre National de France. Il est vrai que l’influence de cette formation burlesque est évidente dans Duel 2. L'autre duelliste est Paul Staïcu, compositeur et instrumentiste confirmé, avec à son actif plusieurs "Premiers Prix" en composition et jazz. C’est d’ailleurs dans le jazz que Paul Staïcu a notamment brillé en jouant aux côtés de Michel Portal, Steve Coleman, Winston Marsalis ou François Jeanneau. Excusez du peu.

    Ces deux musiciens, qui ne sont donc pas venus de nulle part, construisent dans Duel 2 une série de numéros enlevés où la musique devient autant une arme (le spectateur apprendra d’ailleurs comment tuer avec un violoncelle !) qu’un jouet que deux grands gosses – surdoués – convoitent jusqu’à s’entre-déchirer - pour le plus grand plaisir des spectateurs.

    Dans cet affrontement (presque) muet des deux musiciens, les scénettes s’enchaînent sans temps mort. Le non-sens et le burlesque sont la règle et nous renvoient au célèbre duo de Charlie Chaplin et Buster Keaton dans Limelight (Les Feux de la Rampe, 1952).

    L’imagination de Laurent Cirade et Paul Staïcu, sans oublier celle de la metteuse en scène Agnès Bourry, décline à l’infini le détournement des instruments et des répertoires de musique. La surprise peut surgir à tout moment : jouer du piano dans un transat, cuisiner puis déguster un violoncelle ou élever au biberon un violon. Le pouvoir de sex-appeal du violoncelle (que l’on connaissait depuis les célèbres clichés de Kiki de Montparnasse par Man Ray) est aussi raconté avec succès, jusqu’à la "naissance" d’un violon bien encombrant.

    Les moments de poésie ne sont pas oubliés : une variation sur le thème de Carmen, au piano, violoncelle et didgeridoo, fait partie de ces moments de grâce, tout comme l’interprétation tendue et inspirée de Walk on the Wild Side de Lou Reed.

    Laurent Cirade et Paul Staïcu multiplient les références au classique, au jazz, à la pop, au rock, au reggae, au contemporain, au RnB, au disco et à la soul pour détourner quelques grands compositeurs et musiciens - et tout cela au service du rire. L’auditeur attentif pourra reconnaître, entre autres, Jean-Sébastien Bach, Wolfgang Amadeus Mozart, les Beatles, Luigi Boccherini, Ludwig van Beethoven, Georges Bizet, Carlos Santana, Ennio Morricone (dans une scène loufoque inspirée des westerns spaghetti), Charlie Chaplin, les Village People, Johann Strauss, Charles Gounod, les Bee Gees, Sergueï Prokofiev, Vladimir Cosma, Johannes Brahms, Lou Reed ou Barry White.

    Nos duellistes font non seulement un magnifique hommage au patrimoine musical mais contribuent aussi à le désacraliser. Tout cela n’est pas sérieux, semblent nous dire les deux artistes sur scène. Mais la musique l’est-elle réellement ?

    Duel, opus 2, avec Laurent Cirade (violoncelle) et Paul Staïcu (piano),
    Théâtre du Palais Royal, du 5 février au 15 avril 2016
    Du mercredi au samedi à 19 heures
    Duel : le site 

    Duel : la page Facebook 
    Théâtre du Palais Royal