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jean-michel jarre

  • Xenakis, l'étranger

    Le lecteur attentif remarquera peut-être que cette chronique consacrée à Iannis Xenakis (1922-2001), l’un des plus grands compositeurs du XXe siècle, est classée à la fois dans la rubrique "Musique" et dans les rubrique "Série et TV" et "Sciences". Nulle doute que si une rubrique "Architecture" existait – mais peut-être sera-ce le cas un jour – elle y figurerait aussi. 

    Arte propose en replay Xenakis Révolution, un passionnant documentaire sur Xenakis que l’on peut qualifier comme un "créateur insaisissable", compositeur de musique concrète, pionnier de la musique électronique mais aussi architecte (il a collaboré avec Le Corbusier sur des bâtiments majeurs). Il a aussi été reconnu comme mathématicien, ingénieur mais aussi inventeur de spectacles de son et lumière dès la fin des années 60.

    Le documentaire s’appuie sur des archives vraiment intéressantes mais aussi sur des témoignages : sa fille Mâkhi, les compositeurs Pascal Dusapin et George Aperghis, le chef d’orchestre Michel Tabachnik, l’architecte Antoine Grumbach mais aussi des musiciens tels qu’Adelaïde Ferrière, Emmanuel Jacquet et Rodolphe Théry du Trio Xenakis, sans oublier la présence de Jean-Michel Jarre qui insiste dans le film sur la place de Xenakis dans la musique électronique.

    Mais un autre Xenakis est dévoilé dans le film de Stéphane Ghez : celui d’un homme engagé, résistant grec durant la seconde guerre mondiale puis la guerre civile dans son pays. Cette expérience violente va marquer le créateur toute sa vie, comme en témoigne le compositeur Pascal Dusapin et cet étonnant parallèle entre la musique cosmique et le sifflement des balles (Diamorphose, 1957).  Xenakis est contraint à 27 ans d’exil. Il devient ironiquement un étranger (xenos, en grec), gracié tardivement et qui a trouvé en France une nouvelle patrie.

    Le témoignage capital de la fille du musicien, Mâkhi Xenakis, permet de rendre compte d’un homme aux multiples facettes, décidé à entrer dans la musique tardivement (il a plus de trente ans). Olivier Messiaen est un des rares compositeurs à témoigner son soutien à cet artiste "hors du commun".

    Des partitions de Xenakis sont dévoilées par sa fille : des documents étonnants, cabalistiques, sans portées musicales mais avec des papiers millimétrés pour créer un nouveau langage musical ("Une architecture musicale qui bouge dans le temps").

    Le nom de sa dernière œuvre ? Omega, bien sûr

    Musicien et compositeur, Xenakis est présenté comme un architecte novateur, qui s’est par ailleurs appuyé sur ses propre plans pour écrire des œuvres se nourrissant et se répondant mutuellement. C’est Anastenaria en 1953 mais aussi Metastasis, qu’il a travaillé en même temps qu'il dessinait le Couvent dominicain de la Tourette près de Lyon. Les partitions font écho aux plans : les glissandi des violons s'inspirent des courbes des constructions (le pavillon Phillips pour l’ex universelle de Bruxelles de 1958). Le son, la lumière et l’espace se répondent mutuellement : "La musique est une architecture en mouvement", comme il est dit dans le documentaire.

    Le film balaie en moins d’une heure une carrière et une œuvre importante qui a changé profondément l’histoire de la musique moderne et l’art en général : son apport dans la musique concrète lorsqu’il entre au GRM (Groupe de Recherches Muisicales) de Pierre Schaeffer, la musique granulaire ("Le grain est l’atome de la musique"), la musique  stochastique (Pitoprata), et la musique électronique grâce aux premiers ordinateurs, ce qui fait dire à un témoin que Xenakis construisait "le" son au lieu de construire "avec" le son.

    Compositeur novateur, Iannis Xenakis critiquait la musique sérielle (Nomos Alpha, 1965-1966) pour préférer l’utilisation des sciences aux possibilités infinies (statistiques, physique des gaz, hasard, théorie des jeux). Pour autant, celui qui a été résistant communiste, architecte, ingénieur, mathématicien puis musicien ne tourne pas le dos aux traditions, à commencer par les siennes, à l’instar de la mythologie gréco-romaine (Polytope de Mycènes).

    Xenakis s’est aussi révélé comme un scénographe novateur avec l’invention de dispositifs dans les salles de concerts : l’auditeur se retrouve au milieu de l’orchestre. Il expérimente le son spatialisé, ce qui est aussi une démarche très "gauchiste", comme le révèle, amusé, Michel Tabachnik mais aussi Xenakis lui-même lors d’une interview télé vers 1968.

    Le Polytope de Mycène dans les anciens thermes de Cluny à Paris en 1972 mêle partitions lumineuses, premiers lasers, flashs, musique électronique, architecture et sculptures visuelles. C’était un "shoot d’émotion" témoigne Jean-Michel  qui se souviendra plus tard de ces sons immersifs, des lasers, des ordinateurs et de cette réalité virtuelle mise en lumière sur des sons électroniques (cette fameuse "proto-techno").

    Pascal Dusapin voit dans "l’art xenakien" une musique essentielle, humaine et profondément inscrite dans les traditions grecques avec une modernité incroyable, tant musicalement que scénaristiquement, avec ce Polytope de Mycène qui consacre définitivement l’ancien banni de son pays d’origine, devenu un artiste universellement réputé. Universel : le mot n’est pas galvaudé pour ce génie. Le nom de sa dernière œuvre ? Omega, bien sûr. 

    Xenakis Révolution, Le bâtisseur du son, documentaire de Stéphane Ghez, Arte, 55 mn, 2022
    https://www.iannis-xenakis.org
    https://www.arte.tv/fr/videos/103998-000-A/xenakis-revolution

    Voir aussi : "Concertant et déconcertant"

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  • Like in Broadway with Carini

    Voilà un disque absolument parfait pour les fêtes de fin d’année : Yves Carini propose en ce moment son album de reprise The Way You Are, au parfum délicieux et hors du temps : celui des comédies musicales, des grands orchestres et des crooners romantiques.

    Pour son projet musical, constitué de neuf reprises et de deux inédits ("Sous les Mains d’Elsa" et le public "Savoir faire"), Yves Carini s’est entouré des meilleurs arrangeurs, notamment Jorge Calandrelli, producteur, arrangeur qui cumule six Grammy Awards, avec à son crédit tous les albums de Tony Bennett. À ses côtés, on retrouve aussi Randy Waldman, arrangeur et pianiste de Barbra Streisand et qui a travaillé notamment avec Frank Sinatra. Avec de telles collaborations, The Way You Are ne pouvait que se parer de couleurs jazz et crooner. "L’album s’écoute comme un  spectacle de Broadway", confie à ce sujet le musicien frenchy.

    L’auditeur trouvera dans cet album des reprises tombant sous le sens, à l’exemple du fameux "Hymne à l’amour" d’Édith Piaf, du succès international "Eye In The Sky" des The Alan Parsons Project ou encore du tube intersidéral "Just The Way You Are" qu’avaient chanté Billy Joel, Barry White ou Bruno Mars.  

    L’incroyable reprise de "Saint Claude" de Christine and The Queens

    La première surprise vient de la reprise du désormais classique "Un homme heureux", une revisite dont nous avions déjà parlé sur Bla Bla Blog. Yves Carini abandonne la ballade murmurée, timide et plaintive de William Sheller pour un titre alliant recherche amoureuse, mélancolie et espoir. Il faut entendre comment Yves Carini choisit de chanter le droit au bonheur et à l’amour sur un rythme jazzy, avec la guitare brillante de Larry Koonse qu’il faut absolument mentionner ici.

    L’auditeur français découvrira sans doute le standard de jazz italien "Estate", composé par Bruno Martino et popularisé par Joao Gilberto. Avec cette reprise d’Yves Carini, nous voilà dans La Dolce Vita. Il n’y a qu’à fermer les yeux pour se retrouver dans le film de Federico Fellini, avec Marcello Mastroianni et Anita Ekberg, une nuit à Rome. Quoi de plus romantique ?

    On est toujours dans l’amour avec la version singulière de "Love Me Like You Do" d'Ellie Goulding. Le crooner français fait même une version française et romantique ("Aime-moi comme tu es") de ce  titre qui a illustré la bande originale de Cinquante Nuances de Grey !

    Yves Carini sait surprendre son public avec l’incroyable reprise de "Saint Claude" de Christine and The Queens. Le musicien reprend une scène grise et cruelle vécue à Nantes par la chanteuse pop française pour en faire l’histoire d’une rencontre envoûtante. Il colore le tube de Christine and The Queens d’un rythme jazz audacieux, au point d’en faire un standard digne de Broadway. Qui l'eût cru ?

    Après cette revisite ébouriffante et désarçonnante qui ne laissera personne indifférent, Yves Carini propose une reprise aussi classique qu’élégante des "Mots bleus", dans une mélancolie très smooth.

    Yves Carini, The Way You Are, Yesansa, 2021
    https://yvescarini.com
    https://www.facebook.com/yvescarini

    Voir aussi : "Retour vers le futur"
    "Thomas Dutronc, c’est si bon"
    "Lady Gaga et Tony Bennett, joue contre joue"

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  • Les horizons de Falaises

    Pour bien commencer l'année parlons de Falaises. J'étais impatient de découvrir le dernier opus de ce groupe parisien, créé il y a seulement deux ans. Ils viennent de sortir They Are Here : huit titres pour ce long EP, qui pourrait tout autant être catalogué comme un album, certes un peu court.

    Falaises c’est la pop la plus cool qui soit : moderne, électro, mélodique, d’une solide densité rythmique mais qui sait aussi jouer avec avec le contemplatif et l’onirisme. Un vaste horizon musical, passionnant et envoûtant.

    Avec Boy, dans deux versions ouvrant et clôturant le disque, on entre dans un univers jarrien électro. Les synthétiseurs marchent à plein régime, proposant de belles envolées servies par la voix aérienne d’Alice Maury.

    Pour la pop que propose Inherent Vice, on abandonne cette fois des machines à la Jean-Michel Jarre pour un titre aux accents plus Cranberry. En digne héritière de la regrettée Dolores O'Riordan, la chanteuse de Falaises nous amène vers une new wave dopée aux machines et aux ordinateurs, mais avec ce supplément d'âme grâce à sa voix sucrée et assurée (Daylight Dreamer).

    Facile, Falaises? Trop simple. A côté de rock plutôt rugueux comme le titre qui donne son nom à l'EP, les quatre Parisiens osent des morceaux expérimentaux (Twilight Splendor), voire planants (Drinkin Hell). Avec Hush on tient une perle sophistiquée et à la pop enlevée aux réverbérations oniriques, prête à vous faire bondir, voire tomber raide dingue amoureux.

    Falaises, They Are Here, Antipodes Music / Differ-Ant, 2018
    http://smarturl.it/theyarehere
    https://www.facebook.com/Falaisesmusic

    Voir aussi : "Brol d'elle"

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