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  • Les échecs en manga, une réussite

    Quelle bonne idée d’avoir fait des échecs le sujet d’un manga ! L’idée vient du Français Cédric Biscay et la mise en page de Daitaro Nishihara. Que la série soit le fruit de Monaco et du Japon est singulière. Moins surprenant, Blitz, publié chez Iwa, a eu la bénédiction du Maître international Garry Kasparov, qui apparaît d’ailleurs la série, dès les deux premiers volumes.

    Dans le campus de Shibuya, Tom est un étudiant peu réputé pour son assiduité et son sérieux. Mais il rencontre Harmony, son exact opposée, brillante et amoureuse des échecs. Pour espérer passer du temps avec elle (voire plus si affinités), le garçon peut compter sur le club d’échecs qu’elle suit dans leur école. Elle s’y débrouille très bien, alors que Tom n’y connaît rien. Mais l’étudiant est combatif et déterminé. Il se plonge dans les parties de grands maîtres, dont Kasparov. Évidemment, c’est insuffisant pour briller aux yeux d’Harmony, jusqu’à la découverte par Tom d’un casque de réalité virtuelle puis le déclenchement d’un orage aux conséquences inattendues.

    Pas besoin d’être un ou une experte du célèbre jeu de stratégie pour se plonger avec délice dans les aventures ludico-amoureuses de Tom, Harmony, Laurent, Riko ou Karl. Les personnages de cette saga sont suffisamment bien campés pour susciter l’adhésion générale.

    Une saga qui a reçu l’aval de Garry Kasparov

    La romance annoncée entre Tom et Harmony, si mal assortis au départ, est le prétexte d’une saga qui a reçu l’aval de Garry Kasparov.

    Il ne faut surtout pas rater les pages de postface à la fin de chaque volumes qui éclairent l’histoire : définitions, explication des pièces et des mouvements, focus sur des concepts et analyses de parties. Le lecteur apprend d’ailleurs que les personnages de Blitz jouent de réelles parties, preuve que les auteurs n’ont pas lésiné sur la crédibilité des mangas.

    Évidemment, les amateurs de mangas retrouveront ce qui fait le charme de ce genre : actions, importance de la romance et une large place laissée au fantastique. De vrais atouts pour vulgariser un jeu souvent et injustement taxé d'élitiste. Une vraie réussite que ces échecs en BD.  

    Cédric Biscay, Tsukasa Mori et Daitaro Nishihara, Blitz, éd. Iwa, 10 volumes depuis 2020
    https://blitz.fan
    https://www.shibuya-productions.com

    Voir aussi : "Sans modération"
    "Folles, bizarres, normaux et autres monstres"

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  • La Route 66 des échecs 

    Le succès de la série de Netflix Le Jeu de la Dame a non seulement mis à l’honneur les échecs mais aussi donné un sacré éclairage à ce jeu – ou sport (choisissez le mot qui vous conviendra).

    C’est dans ce contexte qu’est sorti en début d’année la revue trimestrielle Route 64, "ainsi dénommée en hommage à la mythique Route 66 et aux 64 cases du jeu d’échecs", comme l’explique l’éditorial. Le numéro 1 est toujours en vente, par abonnement. Voilà qui devrait ravir les joueurs francophones, réguliers ou profanes, qui ne trouvaient plus de magazine dédié à leur passion.

    Revue née en Vendée, à La Roche-sur-Yon, Route 64 a été conçu comme un magazine hétéroclite, décortiquant tous les aspects de l’univers échiquéens.

    Le menu du 1er numéro de janvier-avril 2021 mérite que l’on s’y arrête. Un premier dossier s’arrête sur les plateformes web dédiées aux échecs (Chess24, Chess.com ou Blitzstream). Elles sont en pleine guerre pour la conquête de nouveaux territoires (l'internet) mais aussi un nouveau public. Un focus particulier est fait sur un tournoi qui fait polémique, PogChamps : "la “Ferme Célébrités’’, le fond du trou de la téléréalité trash !", s’indigne le Maître International Stefan Löffler. Pour autant, force est de constater que "les échecs s’exportent parfaitement en ligne". D’ailleurs, est-il encore dit, "ces derniers mois, le confinement lié à la crise sanitaire a participé à l’essor des échecs en ligne en France et dans le monde."

    Autre enquête, aussi pointue qu’étonnante : celle sur le chessboxing, une singulière épreuve sportive mêlant boxe et échecs. La pratique reste encore confidentielle (400 pratiquants en France), même si elle a été mise sur les fonds-baptismaux rien moins que grâce à Enki Bilal. L’auteur de BD avait été le premier à imaginer ce sport en 1991, pour son album Froid Équateur.

    Le chessboxing, une singulière épreuve sportive mêlant boxe et échecs

    Outre une explication du classement Elo, le magazine spécialisé s’offre une interview de Bernard Werber, joueur amateur mais passionné qui raconte, entre autres, la partie qu’il a joué contre le maître Anatoly Karpov. Le rapport entre la littérature et ce jeu millénaire ? "La construction d’un roman est très échiquéenne, si on regarde bien", confie l'écrivain, non sans malice.

    Un autre dossier est consacré aux passionné·e·s d’échecs qui en ont fait leur métier. Une niche, certes, mais une réalité qui touche environ 1 000 personnes en France – joueurs professionnels, arbitres, animateurs ou consultants pour des sites web spécialisés.

    Dans un pays comme le nôtre, complètement converti aux mangas, Route 64 présente la bande dessinée Blitz. "Deux tomes de Blitz sont déjà parus, le troisième est prévu en février 2021", explique l'un des auteurs. Ce manga, dont l’intrigue tourne autour du fameux plateaux aux 64 cases, a été créé par Cédric Biscay, co-scénarisé par Tsukasa Mori et mis en image par le mangaka Daitarô Nishihara. Blitz raconte la manière dont Tom, un jeune collégien, décide de conquérir une jeune fille, Harmony, grâce aux échecs. L’objectif, dit Cédric Biscay, est "de sortir 3 tomes en une année, il va être respecté, et nous comptons sortir au moins 5 mangas sur Blitz, ce qui permettrait d’ensuite créer une saison d’animation." Une belle ambition, et un projet soutenu par Garry Kasparov.

    Plus réservée aux spécialistes, une table ronde est consacrée à la figure du champion du monde des échecs. Quel est l’avenir des échecs professionnels dans les prochaines années ? Outre la Chine et l’Inde, Jérôme Maufras estime que "sans préjuger du futur, on peut supposer que l’Afrique qui va devenir un géant démographique, va produire des champions d’échecs."

    Le trimestriel est riche de rencontres. Il y a celle du Grand Maître français Fabien Libiszewski et surtout un long entretien avec Maxime "Rikiki" Lagarde, champion de France en titre, "personnage timide dans la vie, mais redoutablement féroce et agressif dans le jeu". Un champion qui ne mâche pas non plus ses mots lorsqu’il parle du développement de ce jeu dans notre pays : "la FFE [Fédération Française des Échecs] ne fait aucun effort pour les jeunes de notre niveau, il y a même eu cette année une baisse des primes avec l’équipe de France".

    Le lecteur pourra également trouver un an article sur un maître-verrier installé sur la côte vendéenne, Wilfried Allyn, le seul artisan français à fabriquer des pièces d’échecs en verre. Il s'arrêtera également  sur ces parties jouées en plein air, et même les pieds dans l’eau. Signalons aussi qu'un portfolio de créations graphiques d’Adèle Fugère est proposé dans le trimestriel, tout comme une incontournable page d’histoire sur le Café de La Régence, Temple parisien des échecs durant deux siècles.

    Et, évidemment, Route 64 ne pouvait pas ne pas évoquer la série de Netflix, Le Jeu de la Dame. Le magazine fait le focus sur cette magistrale création télé à travers un article sur la défaite. Tout un programme. 

    Route 64, janvier-avril 2021, 128 pages, 25 €
    59, rue des Robretières, 85000 La  Roche-sur-Yon
    https://www.route64-lemag.fr

    Voir aussi : "D’échecs en échecs"
    "Machines : 1 – Humains : 0"

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  • La Route 66 des échecs 

    Le succès de la série de Netflix Le Jeu de la Dame a non seulement mis à l’honneur les échecs mais aussi donné un sacré éclairage à ce jeu – ou sport (choisissez le mot qui vous conviendra).

    C’est dans ce contexte qu’est sorti en début d’année la revue trimestrielle Route 64, "ainsi dénommée en hommage à la mythique Route 66 et aux 64 cases du jeu d’échecs", comme l’explique l’éditorial. Le numéro 1 est toujours en vente, par abonnement. Voilà qui devrait ravir les joueurs francophones, réguliers ou profanes, qui ne trouvaient plus de magazine dédié à leur passion.

    Revue née en Vendée, à La Roche-sur-Yon, Route 64 a été conçu comme un magazine hétéroclite, décortiquant tous les aspects de l’univers échiquéens.

    Le menu du 1er numéro de janvier-avril 2021 mérite que l’on s’y arrête. Un premier dossier s’arrête sur les plateformes web dédiées aux échecs (Chess24, Chess.com ou Blitzstream). Elles sont en pleine guerre pour la conquête de nouveaux territoires (l'internet) mais aussi un nouveau public. Un focus particulier est fait sur un tournoi qui fait polémique, PogChamps : "la “Ferme Célébrités’’, le fond du trou de la téléréalité trash !", s’indigne le Maître International Stefan Löffler. Pour autant, force est de constater que "les échecs s’exportent parfaitement en ligne". D’ailleurs, est-il encore dit, "ces derniers mois, le confinement lié à la crise sanitaire a participé à l’essor des échecs en ligne en France et dans le monde."

    Autre enquête, aussi pointue qu’étonnante : celle sur le chessboxing, une singulière épreuve sportive mêlant boxe et échecs. La pratique reste encore confidentielle (400 pratiquants en France), même si elle a été mise sur les fonds-baptismaux rien moins que grâce à Enki Bilal. L’auteur de BD avait été le premier à imaginer ce sport en 1991, pour son album Froid Équateur.

    Le chessboxing, une singulière épreuve sportive mêlant boxe et échecs

    Outre une explication du classement Elo, le magazine spécialisé s’offre une interview de Bernard Werber, joueur amateur mais passionné qui raconte, entre autres, la partie qu’il a joué contre le maître Anatoly Karpov. Le rapport entre la littérature et ce jeu millénaire ? "La construction d’un roman est très échiquéenne, si on regarde bien", confie l'écrivain, non sans malice.

    Un autre dossier est consacré aux passionné·e·s d’échecs qui en ont fait leur métier. Une niche, certes, mais une réalité qui touche environ 1 000 personnes en France – joueurs professionnels, arbitres, animateurs ou consultants pour des sites web spécialisés.

    Dans un pays comme le nôtre, complètement converti aux mangas, Route 64 présente la bande dessinée Blitz. "Deux tomes de Blitz sont déjà parus, le troisième est prévu en février 2021", explique l'un des auteurs. Ce manga, dont l’intrigue tourne autour du fameux plateaux aux 64 cases, a été créé par Cédric Biscay, co-scénarisé par Tsukasa Mori et mis en image par le mangaka Daitarô Nishihara. Blitz raconte la manière dont Tom, un jeune collégien, décide de conquérir une jeune fille, Harmony, grâce aux échecs. L’objectif, dit Cédric Biscay, est "de sortir 3 tomes en une année, il va être respecté, et nous comptons sortir au moins 5 mangas sur Blitz, ce qui permettrait d’ensuite créer une saison d’animation." Une belle ambition, et un projet soutenu par Garry Kasparov.

    Plus réservée aux spécialistes, une table ronde est consacrée à la figure du champion du monde des échecs. Quel est l’avenir des échecs professionnels dans les prochaines années ? Outre la Chine et l’Inde, Jérôme Maufras estime que "sans préjuger du futur, on peut supposer que l’Afrique qui va devenir un géant démographique, va produire des champions d’échecs."

    Le trimestriel est riche de rencontres. Il y a celle du Grand Maître français Fabien Libiszewski et surtout un long entretien avec Maxime "Rikiki" Lagarde, champion de France en titre, "personnage timide dans la vie, mais redoutablement féroce et agressif dans le jeu". Un champion qui ne mâche pas non plus ses mots lorsqu’il parle du développement de ce jeu dans notre pays : "la FFE [Fédération Française des Échecs] ne fait aucun effort pour les jeunes de notre niveau, il y a même eu cette année une baisse des primes avec l’équipe de France".

    Le lecteur pourra également trouver un an article sur un maître-verrier installé sur la côte vendéenne, Wilfried Allyn, le seul artisan français à fabriquer des pièces d’échecs en verre. Il s'arrêtera également  sur ces parties jouées en plein air, et même les pieds dans l’eau. Signalons aussi qu'un portfolio de créations graphiques d’Adèle Fugère est proposé dans le trimestriel, tout comme une incontournable page d’histoire sur le Café de La Régence, Temple parisien des échecs durant deux siècles.

    Et, évidemment, Route 64 ne pouvait pas ne pas évoquer la série de Netflix, Le Jeu de la Dame. Le magazine fait le focus sur cette magistrale création télé à travers un article sur la défaite. Tout un programme. 

    Route 64, janvier-avril 2021, 128 pages, 25 €
    59, rue des Robretières, 85000 La  Roche-sur-Yon
    https://www.route64-lemag.fr

    Voir aussi : "D’échecs en échecs"
    "Machines : 1 – Humains : 0"

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  • D’échecs en échecs

    La mini-série à succès de Netflix, Le Jeu de la dame, avec Anya Taylor-Joy dans le rôle titre, est d’abord l’histoire d’un destin exceptionnel – et inventé, bien que la carrière d’Elisabeth Harmon se soit inspirée de celle de la hongroise Judit Polgár, Grand maître international aux échecs l’âge de à 15 ans, et largement snobée par ses homologues hommes du fait de son sexe.

    Le Jeu de la dame commence dans l’Amérique des années 50. La toute jeune Elisabeth Harmon se retrouve placé en orphelinat suite à une double tragédie : l’abandon de son père et le suicide de sa mère. Dans le milieu austère de cet établissement, la jeune fille rencontre un vieux gardien bourru et découvre avec lui les échecs. Elle prend pour habitude de jouer avec lui des parties en cachette et se dévoile très rapidement comme une joueuse exceptionnelle.

    Devenue adolescente et adoptée, elle découvre un nouveau foyer et une mère de substitution. Contre toute attente, elle renoue avec les échecs et commence à faire parler d’elle. Les tournois s’enchaînent, avec en ligne de mire le numéro 1 mondial soviétique Vasily Borgov.

    Un destin exceptionnel – et inventé

    Le grand intérêt de cette série, hormis l’interprétation de l’excellente Anya Taylor-Joy, est de faire une grande et passionnante série sur les échecs : gambit,  défense sicilienne, roques, attaques. Les créateurs ont fait appel à une sérieuse documentation, ainsi qu’au concours du Grand Maître Gary Kasparov qui a élaboré d’authentiques parties pour rendre la série crédible.

    Le féminisme est bien entendu l’une des clés de lecture du Jeu de la dame, adaptation du roman de Walter Tevis, The Queen's Gambit. Les showrunners ont situé l’intrigue dans les années 50 et 60, dans une Amérique prospère mais aussi puritaine. En se révélant comme une génie des échecs, la personnage principale découvre à la fois l’indépendance et l’ivresse d’une liberté qu’il faudra qu’elle dompte, d’échecs en échecs, dans un milieu exclusivement masculin. Et paradoxalement, ce sont "les hommes de sa vie" - Monsieur Shaibel, Harry Beltik, Townes ou Benny Watts – qui vont l’aider à s’émanciper.

    Une grande, époustouflante et passionnante réussite. 

    Le Jeu de la dame, mini-série américaine de Scott Frank et Allan Scott, avec Anya Taylor-Joy, Marielle Heller, Thomas Brodie-Sangster, Harry Melling et Bill Camp, saison 1, 7 épisodes, 2020
    https://www.netflix.com/fr/title/80234304

    Voir aussi : "Le paradis d'Hollywood"

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  • Machines : 1 – Humains : 0

    Pour George Steiner, les deux faits historiques les plus importants du XXème siècle, ceux que les historiens du futur retiendront, ne seront sans doute pas les guerres ou les crises qui ont traversé cette époque mais deux événements exceptionnels: la conquête de la lune en 1969 et la défaite aux échecs de Gary Kasparov contre une machine en mai 1997.

    Cette réflexion du philosophe franco-américain n'est pas à prendre comme une boutade, ni une provocation ni comme un combat d'arrière-garde contre l'informatique. Celui qui est considéré comme un des plus grands intellectuels européens, considérait d'ailleurs en 2011 que "les machines sont déjà interactives avec le cerveau : "L'ordinateur et le genre humain travaillent ensemble." Steiner considère pourtant comme lourd de sens la défaite du champion du monde et surdoué contre une vulgaire "boîte de métal". 

    La première grande défaite de Kasparov contre un ordinateur, Chess Genius 2.0, s'est déroulée il y a vingt ans, le 31 août 1994. À l'époque, comme le rappelle Pierre Barthélémy dans Le Monde, des ordinateurs ont déjà battu des joueurs d'échecs, dont Kasparov lui-même. Mais il s'agissait de parties rapides, jouées en cinq minutes (les blitz). Pour autant, il paraissait inconcevable que le cerveau exceptionnel d'un grand maître des échecs puisse être battu par une vulgaire machine lors d'une partie classique de plusieurs heures. 

    C'était sans compter Chess Genius en 1994 mais surtout Deep Blue (ou Deeper Blue) en 1996 et 1997.

    Cet ordinateur monstrueux, conçu par des équipes d'IBM, était capable de calculer plusieurs milliards de positions par minutes grâce à des millions d'informations et de paramètres emmagasinés dans sa mémoire. Sa base de données phénoménale et sa puissance de travail faisaient de lui un redoutable adversaire. 

    En 1996 et 1997, une série de plusieurs matchs médiatisés voient la confrontation de l'Ogre de Bakou contre Deep Blue. Au terme du dernier match, joué le 12 mai 1997 à New York, le public stupéfait assiste à la défaite de l'homme contre la machine lors d'une partie restée dans les annales.

    Kasparov a choisi, lors de cette partie mémorable, de jouer des coups inédits (une tactique "antiordinateur" comme le dit Pierre Barthélémy) que l'ordinateur n'a donc pas en mémoire. Or, le sacrifice d'une pièce par Deep Blue perturbe le champion humain. Déstabilisé, ce dernier est mis échec et mat, déjoué par une stratégie que l'ordinateur semble avoir "imaginée"... 

    Cet événement exceptionnel a été commenté à maintes reprises. Commenté et relativisé aussi. Ainsi, en octobre 2012, un journaliste du New York Times attribue le mouvement sophistiqué de Deep Blue à... un bug informatique, bug qui a fait perdre les pédales à Gary Kasparov. Cette explication ne cache cependant pas l'enjeu de ce match historique.

    Vingt ans plus tard, les ordinateurs ont confirmé leurs capacités de calcul. Plus que des adversaires de jeux, ils sont devenus des outils – pour ne pas dire des compagnons et coachs – de tout joueur d'échecs qui se respecte. L'organisation de matchs hommes-machines auraient-ils un sens aujourd'hui ? Il semble que non, répondent plusieurs spécialistes : l'homme n'en gagnerait aucun !

    Cet échec et mat de 1997, que George Steiner commente comme un événement historique de première importance, est aussi une défaite de l'intelligence humaine.

    Au soir de son match perdu de mai 1997, fait remarquer le philosophe, Gary Kasparov notait ceci: "La machine n'a pas calculé, elle a pensé".  

    "L'espèce humaine, échec et mat", Le Monde, 13 septembre 2014
    Interview de George Steiner, Télérama, le 12 décembre 2011
    "La machine est-elle plus forte que l'homme ?", Les-echecs.com

    Photo : Markus Spiske temporausch.com - Pexels