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antiquité

  • Pensées pour moi-même

    philosophie,confrérie,marc-aurele,epictete,manuel,classique,antiquité,rome,grèce,stoicismeCe livre rassemble deux livres de deux auteurs très différents : l’un, Marc-Aurèle, empereur romain de 161 à 180, incarna la figure du "philosophe-roi" cher à Platon. Le second, Épictète, ancien esclave syrien affranchi, a exercé comme professeur et philosophe stoïcien. C’est d’ailleurs le stoïcisme qui rassemble ces deux figures importantes de la philosophie.

    Les deux ouvrages compilés dans ce livre sont tous les deux constitués de courts paragraphes - parfois même d’aphorismes pour Marc-Aurèle. Bien que ce dernier n’apporte pas de contribution décisive à cette doctrine, ses Pensées constituent une sorte de vade-mecum du stoïcisme, attitude d’autant plus remarquable de la part d’un empereur désireux d’accorder ses actions en accord avec son âme et avec la raison.

    Le Manuel d’Épictète, lui, entend être, dans sa concision (30 pages environ), « une arme de combat qu’il faut toujours avoir à sa portée » comme le dit Simplicius, un des commentateurs de cet opuscule.    

    Marc-Aurèle, Pensées pour moi-même & Manuel d’Épictète, éd. GF Flammarion, 1964, 218 p.
    http://confrerie2010.canalblog.com/archives/2012/08/31/25006109.html
    https://editions.flammarion.com/pensees-pour-moi-meme/9782080700162

    Voir aussi : "Le Dîner"

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  • Libres et affranchies

    Inguinis, sulfureuse saga historique paru aux éditions Tabou, propose ici une nouvelle plongée dans la Rome du premier siècle avant Jésus-Christ. Mais c’est un univers plus que vivant. Oubliez les manuels d’Histoire ou les péplums policés. Dans Inguinis, les orgies sont vraiment des orgies et les relations entre hommes et femmes, maîtres et esclaves, maris et femmes ou concubines ne s’embarrassent pas de précautions ni de romantisme.

    Chrysanthe est une perceptrice, se voyant bien professeure de rhétorique. Sa condition d’esclave est au service de Nicomède, un artisan sculpteur sans envergure. La jeune femme doit avant tout s’occuper d’Artémis, une gamine de presque sept ans, la fille de Nicomède. Spurius, l’amant de Chrysanthe, lui promet que Nicomède acceptera bientôt de signer son affranchissement. Une signature qui tarde trop pour l’esclave qui décide de prendre les choses en main. Une orgie, à laquelle elle se donne bon gré mal gré, lui en donne l’occasion.

    Histoire mêlant histoire, antiquité et sexe

    Katia Even, auteure de la jolie et érotique bande dessinée de fantasy Le Peuple des Brumes, est aux origines – si l'on peut dire – de cette histoire mêlant histoire, antiquité et sexe. Nicolas Guenet est au crayon et au dessin : un travail pas si évident que cela pour représenter étreintes, corps sculpturaux, orgies, mais aussi décors plus vrais que nature de la Rome du Ier siècle. On peut à ce sujet saluer le gros travail de documentation qui lui a été nécessaire pour dépeindre cette Rome du Ier siècle.

    L’histoire – celle d’un précieux papyrus qui décidera du devenir d’une esclave au fort tempérament – compte finalement moins que les déboires amoureux et sexuels de sa protagoniste. De plus, un complot se trame dans les plus hautes sphères du pouvoir, mais aussi dans les ruelles sombres de Rome qui voient disparaître de jeunes enfants.

    Ce premier tome des Origines d’Inguinis se laisse lire avec curiosité et prouve, avec Katia Even à la barre, que l’érotisme en littérature et dans la BD se conjugue bien au féminin.   

    Katia Even & Nicolas Guenet, Inguinis, Origines, tome 1, Sanguis Mulieris, éd. Tabou, 48 p.
    http://www.tabou-editions.com
    https://katiaeven.net

    Voir aussi : "Mon corps est à moi"
    "Butineuse !"

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  • La plus vieille histoire du monde

    Bla Bla Blog commence une série de chroniques sur les grandes œuvres de la littérature mondiale. Pourquoi ne pas inaugurer ce cycle avec ce qui est sans doute le plus vieux récit de l’histoire de l’humanité. Non, il ne s’agit pas des Poèmes épiques d’Homère (L’Iliade et L’Odyssée) ni la Bible (plus "récente" que ce que l’on pourrait penser). Gigamesh, souvent appelé L’Épopée de Gilgamesh (prononcez "Guilgamesh"), fait partie de ses joyaux littéraire à l’influence énorme, mais qui a bien failli tomber dans l’oubli. Léo Scheer a proposé une version modernisée, traduite non pas en vers, mais en prose, ce qui rend la lecture plus fluide, tout en restant fidèle à l’histoire. Un vrai roman – poétique – avant l’heure, datant tout de même du XVIIIe siècle… avant Jésus-Christ.

    La préface de cette version française, ressortie en 2020 chez Librio (vendue au prix "scandaleux" de deux euros !) rappelle que Gilgamesh a réellement existé. Il a été roi en Mésopotamie en 2600 avant notre ère. Un souverain largement réinterprété dans l’épopée éponyme.

    Gilgamesh règne sur la cité d’Uruk avec une majesté divine ("Humain pour un tiers, aux deux tiers divin"). Il fait régner non seulement l’ordre, mais aussi sa puissance, ses caprices et la peur : "Il est insatiable", n’hésitant pas à mettre dans son lit des adolescentes et à s’en prendre aux habitants de la ville, de jour comme de nuit. Les dieux reçoivent les doléances des sujets de Gilgamesh qui réclament d’être défendus. La solution ? Créer à partir de la glaise un adversaire de Gilgamesh, Enkidu Le Valeureux. Vivant d’abord dans la nature à l’état sauvage, Enkidu part affronter Gilgamesh. Contre toute attente, les deux adversaires deviennent amis et partent à l’aventure. 

    Que Marvel ait adopté ce nom pour un de ses personnages n’est évidemment pas un hasard

    Douze tablettes ont été retrouvées, permettant de retrouver une épopée aux influences considérables. Hélas ou heureusement pour le lecteur contemporain, Gilgamesh se lit très vite, puisque le texte tient sur une soixantaine de pages. L’édition de Librio est deux fois plus longue, car elle inclut une préface, un lexique et un cahier pédagogique. Idéal pour les professeurs de français ou d’histoire !

    Gilgamesh, roi autocrate ou super-héros ? Un peu de tout cela à la fois. Que Marvel ait adopté ce nom pour un de ses personnages (Eternals) n’est évidemment pas un hasard. L’ami et frère de cœur de Gilgamesh, Enkidu, est un héros sans peur et sans reproche qui ne peut rougir face à son souverain. À deux, les voilà – presque – invincibles pour combattre les dangers du monde et ceux de l’au-delà.

    D’un côté, on peut regretter que l’Épopée de Gilgamesh nous soit arrivée incomplète, d’un autre, il est miraculeux que ce qui est sans doute le récit le plus vieux du monde nous soit parvenu dans tout son essence. La lecture de Gilgamesh est prodigieuse en ce qu’elle nous renseigne sur l’influence considérable de cette histoire mésopotamienne, y compris sur des idées et des récits antiques. Ainsi, la naissance divine d’Enkidu grâce à la glaise et ses premières années dans une nature sauvage n’est pas sans rappeler le premier livre de la Genèse. Mieux, le déluge raconté par le ou les auteurs de Gilgamesh précède de plusieurs centaines d’années un autre événement mythologico-religieux, celui de Noé.

    Voilà qui donne toute sa beauté et toute sa pertinence à ce récit antique qui se lit d’une traite. 

    Gilgamesh, éd. Librio / Léo Scheer, 2020, 111 p.
    http://librio.net/Albums_Detail.cfm?id=31894
    https://editions.flammarion.com/gilgamesh/9782290230251

    Voir aussi : "Bla Bla Blog, classique et confrérie"

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  • Des héros à l’infini

    Voilà une BD souriante, intelligente, bien construit, au graphisme moderne et qui devrait intéresser un très marge public. Les Mythes grec en BD de James Davies est proposé par les éditions Larousse. La vénérable institution propose de dépoussiérer l’apprentissage de la mythologie grecque grâce à un album fantaisiste et humoristique, mais sans pour autant trahir l’histoire de ces mythes, héros et légendes qui ont traversé les siècles.

    Après une présentation sur deux planches de la Grèce antique et de la mythologie, l’auteur anglais passe directement dans le vif du sujet avec un récit imaginé du chaos et de la création du monde. Grâce à James Davies, les noms de Gaïa, Cronos ou Atlas ne seront plus un mystère, pas plus que la naissance de la génération suivante de dieux et déesses : Déméter, Hestia, Héra, Hadès, Poséidon et, the last but not the least, Zeus.

    Sans pour autant trahir l’histoire de ces mythes

    S’ensuit une présentation de ces personnages imaginaires mais fondamentaux dans la pensée grecque. Et l'auteur le fait avec pédagogie. Là justement est l’apport des Mythes grec en BD : à côté d’histoires racontées en 6 pages, avec humour et non sans nombreux clins d’œil ("La boîte de Pandore", "Thésée et le Minotaure", "Persée et Méduse", "Orphée et Eurydice", "Le Cheval de Troie" et "Les Douze travaux d’Hercule"), James Davies intercale à chaque fois deux planches explicatives et thématiques, mettant en perspective la mythologie dans la pensée et la société grecque : comment les mythes servaient à expliquer le monde, une galerie des héros expliquée par le centaure Chiron, les créatures fantastiques ou le monde souterrain après la mort.

    Plus intéressant encore, l’auteur parle de l’importance du destin dans l’histoire de ces mythes et met en parallèle la carte géographique de la Grèce avec les lieux de personnages légendaires : le Minotaure en Crête, l’île d’Ithaque où vivait Ulysse et bien entendu la cité de Troie dans l'actuelle Turquie. Pour ce dernier exemple, remarquons aussi que la légende racontée par Homère et l’histoire se rejoignent de manière troublante. 

    James Davies, Les Mythes grec en BD, éd. Larousse Jeunesse, 2021, 61 p.
    https://www.editions-larousse.fr
    http://www.drawjamesdraw.com
    @drawjamesdraw

    Voir aussi : "Les aventuriers de l'Arche perdue"

    James davies,bd,bande dessinée,mythe,mythologie,grèce,antiquité

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  • Nouveaux plans à Troie

    achille,troie,iliade,homère,sexe,érotisme,antiquitéVoici donc le troisième et dernier tome d'Achille de Cosimo Ferri (éd. Tabou), une série historico-érotico-littéraire, qui ne s’embarrasse pas de liberté avec ce patrimoine qu’est l’Iliade d’Homère.

    C’est la lutte finale à Troie. Priam s’inquiète des victoires d’Achille, désespéré après la mort de son ami et amant Patrocle mais qui sent que la guerre de 10 ans peut se terminer avec la victoire des Achéens. Les batailles s’enchaînent (contre Penthésilée la reine des Amazones par exemple), mais aussi les prisonniers et les captives, dont la sémillante Briséis que les Troyens cherchent à récupérer.

    Mais c’est une autre femme qui va dénouer le récit :  Polyxène, la plus jeune fille du roi Priam, qu’Achille rencontre par hasard, et qui tombe dans ses bras. Leurs étreintes éloignent quelque peu le fils de Thétis des champs de bataille alors que les victoires s’enchaînent. L’union de la princesse troyenne et du guerrier grec pourrait bien signifier la fin des hostilités. Mais c’est sans compter le talon d’Achille.

    Le lecteur trouvera dans ce dernier volume les héros du cycle troyen : Achille, bien sûr, mais aussi Priam, la belle Hélène, Pâris, Ménélas, Memnon, le "demi-dieu" et roi des Ethiopiens, Briséis et Cassandre. La Guerre de Troie est revisitée en respectant dans ses grandes lignes le récit et le souffle homérique, mais en y insufflant de l’érotisme, de l’ardeur, des guerriers statufiés et des corps à corps enfiévrés.

    On connaît la fin de l’histoire – le Cheval de Troie, la prise de la ville et la fuite d’Énée. Il reste que Cosimo Ferri a réussi à redonner vie et vigueur - beaucoup de vigueur, même ! - à ses personnages.

    Reste maintenant à savoir si, après cette trilogie troyenne, l’auteur ne s’attaquera pas à l’Odyssée.

    Cosimo Ferri, Achille, tome 3, De Fer et de Chair, éd. Tabou, 2020, 64 p.
    https://www.cosimoferri.com
    https://www.facebook.com/cosimoferriart
    http://www.tabou-editions.com

    Voir aussi : "Plans à Troie"

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  • Toutânkhamon, de l’obscurité à la lumière

    Il y a un peu moins de cent ans de cela, après plusieurs campagnes égyptiennes infructueuses à la recherche de la tombe du pharaon Toutânkhamon (v. 1340 av. JC - 1326 av. JC), l’archéologue Howard Carter convainc le richissime mécène Lord Carnarvon de financer une dernière prospection dans un périmètre qu’il estime n’avoir été jamais fouillé. Son intuition est la bonne puisque le 4 novembre 1922, une première marche est découverte puis dégagée. Elle donne accès à une tombe jamais visitée : celle de Toutânkhamon, fils d’Akhenaton, onzième pharaon de la XVIIIe dynastie. Son court règne est tombée dans l’oubli depuis que Toutânkhamon a été frappé d’une damnatio memoriae prononcée par ses successeurs. Son nom a disparu de la liste des pharaons, ce qui va paradoxalement assurer sa postérité. En tombant sur une sépulture quasi intacte car oubliée des pilleurs, Toutânkhamon passe des ténèbres à la lumière.

    Rarement le terme de "trésor" n’a paru aussi bien indiqué pour une telle découverte. Les organisateurs de l’exposition de La Villette ont véritablement travaillé la mise en scène pour proposer un ensemble d’espaces destinés à rendre toute la richesse, la splendeur et l’attrait historique de cette sépulture. Comme le dit Tarel El Awady, commissaire de l’exposition, "[En 1922], les scientifiques et les universitaires furent étonnés à la fois par l’importance du trésor de Toutânkhamon, mais également par la quantité d’information qu’il recelait, et qui permit une compréhension plus profonde de l’histoire de l’Égypte ancienne. Mais la découverte du tombeau de Toutânkhamon permit surtout de réfuter la croyance solidement installée chez les égyptologues de l’époque selon laquelle « tout avait déjà été découvert dans la Vallée des Rois. »"

    Une découverte presque miraculeuse et entrée dans la légende

    150 objets remarquables, tant pour leur valeur artistique que pour leur apports historiques et scientifiques, sont présentés : le cercueil miniature canope à l’effigie de Toutânkhamon en or, verre coloré et cornaline (mais sans la momie du prestigieux souverain !), la spectaculaire statue de Ka à taille réelle et à l’effigie du pharaon, le lit funéraire en bois doré, une magnifique statue en bois et feuille d’or représentant le roi coiffé de la couronne blanche, des mains incrustées d’or tenant la crosse et le fléau, un somptueux pectoral en or, argent, cornaline, turquoise et lapis-lazuli ou un étonnant modèle de barque solaire en bois. Une statue du dieu Amon protégeant Toutânkhamon, prêtée par Le Louvre, est également exposée. Coffres, bijoux, objets de la vie quotidienne, armes ou statues font pénétrer le visiteur dans une civilisation qui continue de fasciner et de surprendre.

    Mais cette exposition nous fait aussi comprendre l’histoire de cette découverte presque miraculeuse et entrée dans la légende. 3200 ans après sa mort, et alors que ses successeurs ont cherché à effacer les traces de ce pharaon qu’ils estimaient trop lié au règne de son père, le révolutionnaire Akhenaton, Toutânkhamon devient singulièrement une véritable célébrité, pour ne pas dire une icône pop – ce que montre le dernier espace de l’exposition. Passé de l’ombre d’une sépulture à la lumière des médias, le jeune pharaon incarne sans doute plus que n’importe quel souverain la magnificence d’une civilisation que l’on ne finit pas de découvrir.

    Il ne reste plus que quelques semaines pour découvrir l’un des trésors archéologiques les plus spectaculaires qui soit, avant son retour définitif en Égypte.

    Toutânkhamon, Le Trésor du Pharaon
    Du 23 mars au 22 septembre 2019
    Grande Halle de la Villette
    https://expo-toutankhamon.fr

    Voir aussi : "Twilight Zone chez Castel"

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  • Rien de nouveau sous le soleil

    51TS7qGqz3L._SX298_BO1,204,203,200_.jpgVous les connaissez ces ritournelles : "Les temps ont bien changé", "les enfants ne respectent plus rien, pas même l'école", "tout va trop vite de nos jours", "on était bien plus heureux autrefois", "le niveau scolaire baisse", "à cause des étrangers, on n'est plus chez nous"... Ce sont ces discours et ces commentaires courants qui sont évoqués dans le court ouvrage Rien de Nouveau sous le Soleil (Nihil novi sub sole), à travers des textes... vieux de 2000 ans.

    En préface de ce mélange, Michel Marcheteau rappelle en avant-propos que l'insécurité ou la circulation dans les villes, la violence des jeunes gens, les problèmes scolaires (la méthode globale par exemple !), la corruption des hommes politiques, le problème de la Palestine et du Moyen-Orient, les catastrophes naturelles, la dégradation des mœurs, la destruction de la nature ou le... hooliganisme avaient déjà été stigmatisés par de nombreux auteurs latins.

    Rien de Nouveau sous le Soleil présente une sélection de textes (avec leur version originale en latin) de quelques-uns de ces écrivains : Plaute, Cicéron, Quintilien, Tacite, Apulée, Juvénal, Salluste, Ovide,  Tibulle et Sénèque.

    Une manière passionnante de se replonger en douceur dans la langue et la civilisation latine, tout en nous faisant une jolie leçon de relativisme : "Ce petit ouvrage remet ainsi à leur place les enthousiasmes excessifs et les pessimismes exagérés...  Il constitue un antidote à la fois à l’utopie et au catastrophisme qui peuvent nous aveugler sur la réalité de notre époque et le devenir de nos sociétés."  

    Rien de Nouveau sous le Soleil (Nihil novi sub sole), éd. Pocket, 2006, 143 p. 

     

  • Crises de foi

    À l'origine du Royaume, l'imposant et exceptionnel récit d'Emmanuel Carrère, il est question d'une crise de foi de ce dernier. 

    L'auteur de La Moustache (1986) et de L'Adversaire (2000) y dévoile sans fard son passé de chrétien croyant convaincu, d'ancien pratiquant sincère et admirateur des textes sacrés du nouveau Testament, au point de les avoir commentés plusieurs années. Emmanuel Carrère rappelle aussi qu'il a participé à la traduction de l'Évangile de Marc pour La Bible de Bayard (1995). J'écris "passé de chrétien" car Emmanuel Carrère s'étend sur la crise intérieure qu'il a dû surmonter, une "mise à l'épreuve" comme il l'écrit, mêlant fascination pour les textes bibliques et incompréhension du message évangélique, cette histoire de résurrection n'étant pas la moindre des aberrations : "Ces textes... je les trouve toujours magnifiques, je les trouvais déjà délirants... Ils enseignent un dédain de l'expérience, du témoignage des sens...

    À cela, s'ajoutent une angoisse existentielle qui a conduit l'auteur sur le divan d'une psychanalyste mais aussi des expériences personnelles traumatisantes. À ce sujet le lecteur ne pourra qu'être happé par ces vingt pages terrifiantes sur une ancienne nounou croyante et délirante, digne de figurer dans le film La Main sur le Berceau ! Au bout de cette crise personnelle, Emmanuel Carrère choisit de ne pas de tourner le dos à la religion catholique ou à sa foi ; il choisit par contre de la comprendre, de revenir aux racines du christianisme et de se faire homme de raison – et d'agnostique  : "Pas de dolorisme, pas de culpabilité mal placée. Ne pas se flageller. Commencer par être bienveillant avec soi-même. Tout cela est plus cool, et me convient mieux... Ce que j'appelle être chrétien, ce qui m'a fait lui répondre que oui, j'étais chrétien, cela consiste simplement, devant le doute abyssal qui est le sien, à dire : qui sait ? Cela consiste, au sens strict, à être agnostique. À reconnaître qu'on ne sait pas, qu'on ne peut pas savoir." Croyant et agnostique (sic), il choisit, dans Le Royaume, un des ouvrages les plus remarqués de 2014, de se faire historien, exégète mais surtout enquêteur.

    Commence alors une nouvelle partie de ce récit, passionnant comme un roman. L'auteur assume d'ailleurs complètement son statut de romancier, bien utile pour remplir les trous dans cette histoire compliquée et lacunaire du paléochristianisme, ponctué de crises souvent violentes. 

    La trame de son nouveau récit suit les traces de Luc, personnage éminemment important du Nouveau Testament, auteur de l'Évangile qui porte son nom mais surtout des Actes des Apôtres. Ce Macédonien lettré, de culture hellénique et attiré par la culture juive (mais sans doute pas juif lui-même), a suivi dans ses voyages autour de la Méditerranée une figure capitale du Christianisme, Paul. Ce dernier, Emmanuel Carrère en fait l'une des figures principales de son livre. L'ancien bourreau de la jeune secte admiratrice de Jésus, devenu lui-même chrétien suite à une révélation en Syrie (les visions du chemin de Damas, voir en illustration de cet article une peinture du Caravage), s'avère complexe, mystérieux, trouble et complexe dans ses motivations. Pour l'auteur, Paul (anciennement Saul) était certes citoyen roman mais n'était sans doute pas juif comme il le prétend, au contraire des autres piliers du christianisme naissant que sont Pierre ou Jacques, l'un des frères de Jésus. Entre l'ancien persécuteur romain et les ex apôtres, les désaccords vont vite se faire jour, d'abord au bénéfice des prestigieux témoins de Jésus. Emmanuel Carrère explique aussi les accusations d'antisémitisme de Paul qui ne s'est pas gêné pour faire endosser par les autorités juives l'accusation de la mort de Jésus (juif lui aussi, rappelons-le), pourtant exécuté par les autorités romaines (une thèse, contestée, de l'historien Hyam Maccoby).    

    Les désaccords entre Paul d'une part et les deux anciens apôtres vont rapidement dégénérer au point de voir au cours du premier siècle une rupture saillante entre juifs chrétiens (adeptes de Pierre, Jacques mais aussi de Jean de Patmos) et paléochrétiens évangélisés au cours des campagnes de Paul et de ses disciples à travers l'Europe et le Moyen-Orient. Le torchon brûlera pour de bon lors de la diffusion de l'Apocalypse de Jean qui est, dit Emmanuel Carrère, moins un texte eschatologique sur la fin du monde, ou une critique contre Néron (le fameux 666) et les Romains païens qu'une attaque contre... les paléochrétiens pauliniens. 

    Cette hypothèse en croise d'autres dans ce récit riche et bien documenté. À ce sujet, l'auteur revendique son métier et sa liberté d'écrivain. Moins exégète que romancier, il ouvre des voies intéressantes au sujet de tel ou tel personnage ou telle ou telle scène de la Bible : Luc n'aurait-il pas rencontré Marc (appelé également Jean-Marc ou Yohanan Marcus), l'auteur du premier Évangile ? Ce même Marc ne serait-il pas le jeune homme présent sur le Mont des Oliviers que les soldats chassent et qui s'enfuit en courant, nu ? Le deuxième témoin d'Emmaüs, avec Cléophas, ne serait-il pas Philippe, un disciple qui aurait non seulement facilité "l'enquête" de Luc mais qui lui aurait également confié par écrit les paroles brutes de Jésus captées lors des trois ans de son ministère (la source Q) ? D'autre part, Luc, en plus de ce texte capital, ne se serait-il pas fait à la fois historien et romancier pour écrire son Évangile ? Emmanuel Carrère s'y arrête longuement et commente l'œuvre de Luc, l'Helléniste. Il pointe du doigt, ça et là, incohérences, facilités de langages ou trouvailles stylistiques : "Luc parfois se contente de copier Marc [qui a déjà publié son Évangile], mais la plupart du temps … il dramatise, il scénarise, il romance... pour rendre des scènes plus vivantes."

    Au cœur de ce travail littéraire, il y a bien sûr la motivation religieuse et le prosélytisme. Emmanuel Carrère appuie à ce sujet l'importance de cette source Q qui est commun à l'ensemble des Évangiles (à l'exception de celle de Jean, la plus littéraire, la plus ancienne, la plus travaillée mais certainement aussi la moins fidèle à l'histoire). Dans cette source Q, figurent des textes célèbres : des paroles du Sermon sur la Montagne, la parabole du berger et de ses cent brebis, des invitations à la pauvreté, des aphorismes... Ce qui fait dire à l'auteur du Royaume qu'un lecteur, s'il oublie le contexte de cette source, peut être sidéré "par son originalité, sa poésie, son accent d'autorité et d'évidence, et que hors de toute église il prendrait place parmi les grands textes  de sagesse de l'humanité, aux côtés des paroles de Bouddha et de Lao-Tseu." Des paroles sages, qui sont cependant contrebalancées, ajoute l'auteur plus loin, par ce qu'écrit Luc faussement qualifié de "policé" et "trop bien élevé" : "Qui vient à moi sans haïr son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères, ses sœurs et jusqu'à sa propre vie ne peut être mon disciple" ou "Je suis venu jeter le feu sur la terre. Comme je voudrais qu'il soit déjà allumé !" Des paroles que Paul aurait pu dire (si tant est qu'il ne les a pas dites)...

    Emmanuel Carrère se fait exégète mais aussi historien lorsqu'il trace un portrait saisissant du bassin méditerranéen au Ier siècle : la ville de Rome, foisonnante, dangereuse et fascinante, l'occupation romaine dans ses provinces, les luttes d'influence, les roitelets juifs (étonnant Hérode Agrippa Le Jeune !), la société juive chauffée à blanc, les crises religieuses, les brigandages et autres extorsions organisés à grande échelle par les autorités romaines, la cohabitation des religions sur fond de tolérance romaine jusqu'à ce que le christianisme menace de saper les bases de la société romaine. Il s'arrête aussi sur ces personnages historiques qui, à leur manière, ont influer sur le cours de l'Église : quelques disciples et apôtres de Jésus bien entendu, mais aussi l'historien Flavius-Josèphe, les empereurs Néron, Vespasien, Titus ou Domitien ou encore le philosophe stoïcien Sénèque. À côté de ces personnages antiques, Emmanuel Carrère nous parle de personnages ou de faits contemporains, sans craindre anachronismes ou comparaisons inhabituelles dans de tels essais : révolutionnaires communistes ou Philip K. Dick en premier lieu.

    On ressort du Royaume soufflé par ce voyage vers les sources d'une religion vieille de deux mille ans. L'érudition, la passion, la liberté de ton d'Emmanuel Carrère font de ce récit à la fois autobiographique et historique un ouvrage important, accessible à tous quelque soit leur conviction religieuse et qui se lit d'une seule traite, comme un roman. Un roman qui remue et qui ne fait pas l'impasse sur de longues digressions tour à tour enflammées, révoltées, comiques, voire triviales. On pense ainsi à ces dix pages savoureuses sur l'intérêt de l'auteur pour les vidéos pornos sur Internet, ce qui fait dire à la femme de l'auteur, malicieuse et complice : "Quand même, il a bon dos, saint Luc!"

    Emmanuel Carrère, Le Royaume, éd. P.O.L., 2014, 630 p.