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écosse

  • Mon royaume pour un tombeau

    Vraie petite surprise et vraie pépite, le dernier Stephen Frears, The Lost King, est à découvrir en ce moment sur Canal+. Une découverte merveilleuse qui va vous donner l’envie, en plus, de lire ou relire Shakespeare, et en particulier Richard III – mais si, vous savez, la fameuse citation : "Un cheval, un cheval ! Mon Royaume pour un cheval" !

    Comment bâtir un film sur une intrigue aussi mince qu’une fraîche passionnée, à la fois candide et malade (elle souffre du du syndrome de fatigue chronique) partie à la recherche du mal-aimé Richard III, jeune roi d’Angleterre de 1783 à 1485 ? Stephen Frears s’empare du sujet, grâce au jeu de l’excellente Sally Hawkins, occasion pour lui de parler de l’histoire d’une double réhabilitation – celle d’un roi à la sinistre et sans doute injuste réputation, mais aussi et surtout d’une femme elle aussi rejetée, se découvrant l’âme d’une historienne, scientifique et archéologue. Nous sommes en 2012 et l’historiographie anglaise et shakespearienne est sur le point d’être mise à mal grâce à l’enquête d’une modeste employée.

    Exemplaire !

    À Édimbourg, en Écosse, Philippa Langley, divorcée, mère de deux adolescents mais cohabitant vaille que vaille avec son ex, ne peut que constater que l’entreprise où elle travaille la considère comme perdue. Sa maladie qui la laisse régulièrement épuisée n’est pas pour rien dans sa mise au placard.

    Un soir, elle accompagne un de ses garçons à une représentation de Richard III. La sortie scolaire se transforme en révélation pour elle : Shakespeare a largement brodé sur le roi du XVe siècle, et Philippa a l’intuition que la mauvaise réputation de Richard III est injustifiée. Après s’être documentée sur le souverain anglais, elle rallie une modeste association ricardienne, persuadée comme elle que Richard III mériterait d’être réhabilité.

    Le corps du roi ayant été jetée dans la rivière Soar, après sa défaite lors de la bataille de Bosworth (1485), aucune sépulture n’existe pour lui. Mais Philippa, après avoir consulté des sources, est persuadée que le roi a bel et bien été enterré. Les pas de l’historienne la mènent à Leicester où pourrait bien se trouver ses restes. Elle tente de convaincre les autorités locales, a priori peu convaincue par cette femme timide mais aussi particulièrement opiniâtre.

    Stephen Frears suit les pas d’une mal-aimée et rejetée à la recherche d’un autre proscrit, apparaissant sous la forme d’un fantôme, d’abord muet, si bien que l’enquête historique se transforme en introspection pour Philippa Langley. Le réalisateur britannique ne trahit pas sa fibre sociale, lorsqu’il confronte la modeste et passionnée historienne avec l’establishment universitaire, et c’est sans doute là qu’il fait le plus mouche.

    Comédie dramatique, The Lost King se termine par la victoire finale d’une de ces innombrables femmes déconsidérées et traitées avec un  mélange de mépris et de dédain. Exemplaire !

    The Lost King, comédie dramatique de Stephen Frears,
    avec Sally Hawkins, Steve Coogan, Harry Lloyd, Mark Addy et Lee Ingleby, 2023, 109 mn, Canal+,

    https://www.canalplus.com/cinema/the-lost-king/h/21946302_40099
    https://www.bbc.co.uk/bbcfilm/films/the-lost-king

    Voir aussi : "Aimez-vous Tamara Drewe ?"

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  • Abaji, le chaman bleu 

    C’est à un voyage dépaysant que je vous convie, par un musicien hors-norme. Il s’appelle Abaji, est né au Liban d’une famille arménienne et vit en France depuis plus de 40 ans. Sa musique bouscule les frontières entre Orient et Occident, comme le prouve son dernier album, Blue Shaman.

    "J'ai enregistré le disque Blue Shaman à Glasgow avec Donald Shaw et Michael McGoldrick. Une rencontre shamanique entre mon âme méditerranéenne et leur tradition celte !" explique le musicien virtuose. Blue Shaman est son 8e album.  Pour cet opus, Abaji, à l’œuvre originale sans égal, s’est en effet adjoint les concours de l’accordéoniste écossais Donald Shaw et du flûtiste et joueur de cornemuse Michael McGodrick.

    L’auditeur devine que cette musique vient de loin et est volontairement teintée de mysticisme, à l’instar de "Ararat" et surtout de "Blue Shaman" qui donne son nom à l’album.

    Les couleurs de l’Orient et de son cher Liban sont bien entendu présentes, à l’exemple de "Valley Of Sand" ou de "Nâtir" qui ouvre l’opus. Ce véritable cri du cœur mêle sons orientaux et mélancoliques et chanson française : "Un lit de soie trop grand pour moi / En moi une peine au fond m’entraîne… / J’attends que tu viennes effacer ma peine".

    Rencontre shamanique

    "Nuit turquoise", tout aussi méditatif, peut se lire comme un voyage aux confins de l’Europe oriental, sur les rives de la mer de Marmara, avec une flûte solaire et un accordéon chaleureux.

    Avec "Northbound Caravan", nous sommes en plein désert, chez des bédouins, avec ce violon gémissant. On voit presque les chameaux déambuler, la démarche lente et lourde. "Hot Desert To Cold Sea" est encore un voyage au milieu des dunes, avec cependant des accents celtes et bretons singuliers qui vous feraient presque transporter en quelques instants du Sahel aux côtes finistériennes.

    En effet, le musicien nourri à différentes cultures ne s’interdit pas de piocher un peu partout ses influences, lorsqu’il s’aventure par exemple sur les terres balkaniques ("Balkanik Tango") ou celtes ("Share To Share"), avec une voix inimitable allant chercher une douleur enfouie aux tréfonds, avec toujours ces accents orientaux. Là, il faut aussi absolument parler de "Celtic Blue" : a-t-on déjà entendu une telle fusion entre sons celtiques et orientaux, avec une flûte comme sortie des brumes et la voix éraillée d’Abaji ?

    Il convient encore de s’arrêter sur "Dance For Me", un titre à la pop-folk anglaise mâtinée de français : "Lignes noires sur la feuille / Des courbes au bout des doigts / Et en clin d’œil / Ces lignes bougent pour moi." Il y a aussi "Hilm n°2" derrière laquelle se dessine l’influence de Bob Dylan dans une folk arabe, avec cet indispensable harmonica. Abaji n’oublie pas le métissage jusque dans le choix  des langues – l’arabe, le français et l’anglais – pour ce portrait délicat et consolateur d’une femme. On peut saluer un autre clin d’œil au chanteur folk américain nobelisé avec le titre "Bowing In The Wind" : loin d’être une revisite du chef d’œuvre de Bob Dylan, ce morceau d’Abaji est une pérégrination dans un désert, courbés (c’est le sens du mot "bowing"), sous un soleil ardent et au milieu d’un vent brûlant.

    Inépuisable source d’inspiration, l’Orient est bien entendu omniprésent dans ce magnétique album, à l’instar d’"Ustad" ou du facétieux "For A Cloud", véritable concerto pour voix et flûte.

    Mais Abaji sait également se faire doux et tendre lorsqu’il trace le très beau portrait de cette femme dans le titre "Sehher" : "D’la magie noire / D’la couleur de tes yeux / J’ai beau chercher des beaux / Y’en a pas un de plus beau."

    Abaj, Blue Shaman, Absilone, 2021
    https://www.facebook.com/ABAJIMUSIC
    https://absilone.ffm.to/blueshaman.opr

    Voir aussi : "Dhafer Youssef, la world music des sphères"

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  • Sur les pas d’Harry Potter, de Game of Thrones ou d’Outlander

    La Grande-Bretagne et l’Irlande ont su tirer leur épingle du jeu grâce à la télévision et le cinéma. Le tournage des sagas que sont Harry Potter, Outlander, Game of Thrones ou Star Wars ont eu un effet indéniable collatéral sur le tourisme d’outre-manche. Certains professionnels ont réussi à surfer sur l’engouement des séries et des sagas à grand spectacle en proposant des voyages clé en main pour un public de fans bien destinés à marcher sur les traces d’Harry Potter, de Jon Stark ou des derniers Jedis.

    Prenez Brittany Ferries. La compagnie de ferries propose plusieurs formules pour des vacances originales et hors des sentiers battus : la visite des studios de la Warner près de Londres, là où ont été tournés la majorité des épisodes du petit sorcier de Poudlard ; un circuit en Écosse pour suivre les pas de Claire et Jaimie, les héros d’Outlander ; une excursion plus vraie que nature pour visiter le domaine des Winterfell, les Îles de Fer ou la Forêt Hantée de Game of Thrones ; et enfin un pèlerinage en Irlande pour découvrir le Wild Atlantic Way, cette longue route côtière qui longe la façade Atlantique, le lieu de tournage du dernier Star Wars.

    Et voilà comment les professionnels du tourisme arrivent à tirer profit du petit et du grand écran. 

    http://www.brittany-ferries.fr

  • Haddock et Loch Lomond

    C'est de whisky dont il sera question dans cet article. De whisky mais aussi de bande dessinée. 

    Boisson longtemps confinée dans des cercles de connaisseurs, plus ou moins snobs, jamais le whisky ne s'est aussi bien porté qu'aujourd'hui. Alors que vingt ans plus tôt les distilleries peinaient à rester rentable, elles sont aujourd'hui confrontées à une révolution culturelle autant qu'à une vraie crise de croissance : difficulté à satisfaire la demande mondiale (+ 3 % par an), consommateurs de plus en plus ouverts aux whiskies autres que le sacro-saint blend ou le single malt écossais (boissons venues du Japon, des États-Unis, d'Australie ou de France), rachats de distilleries par de grands groupes (Diageo ou Pernod Ricard). La France se classait en 2013 premier pays consommateur au monde devant le Royaume-Uni et les États-Unis avec deux litres par personne et par an ! Il est aussi à noter que le premier pays producteur au monde de ce divin breuvage est... l'Inde ! Ce qui n'est pas forcément gage de qualité, les tords-boyaux y faisant florès.

    Arrêtons-nous un instant sur Loch Lomond, une marque qui n'est certes pas la plus réputée dans ce milieu. 

    Loch Lomond. Le nom frappera les oreilles des tintinophiles car il s'agit de la marque de whisky préférée du Capitaine Haddock. Buveur invétéré, c'est en état fortement alcoolisé que le lecteur et Tintin font sa connaissance dans Le Crabe aux Pinces d'Or (1953). Le whisky trône déjà en bonne place sur la table du Capitaine Haddock, sans pour autant que la marque de ce breuvage n'apparaisse. La mention de Loch Lomond n'apparaît qu'en 1966, dans L'Île Noire : le célèbre journaliste trouve refuge sur un train de fret transportant des citernes de whisky. La version moderne de cet album, qui a été publié dans une première édition en 1943, mentionne pour la première fois le Loch Lomond. Les spécialistes ont noté justement que Hergé avait choisi un autre distillateur dans la première version de sa bande dessinée, puisque la fameuse citerne mentionnait la marque Johnny Walker.

    Le whisky est présent tout au long des aventures de Haddock, transportant sa boisson préférée à l'autre bout du monde (L’Étoile mystérieuse, 1946), voire jusque sur la lune (On a marché sur la Lune, 1954). 

    Mais la contribution la plus importante de Loch Lomond dans une aventure de Tintin se retrouve dans le dernier album terminé par Hergé, Tintin et les Picaros (1976). Cette boisson est même un des éléments importants de l'intrigue qui emmène Tintin et Haddock en Amérique du Sud. Alors que le capitaine se trouve du jour au lendemain allergique à toute boisson alcoolisée – et à son whisky préféré – nos deux héros doivent résoudre l'alcoolisme désastreux dont sont victimes les rebelles du Général Alcazar, les Picaros. Ce mal a été provoqué par son adversaire, le Général Tapioca, qui a fait parachuter en pleine forêt tropicale, où se cachent les rebelles, des caisses de whisky Loch Lomond. Une manière diablement efficace pour rendre inoffensif les guérilleros d'Alcazar. La solution à ce problème d’ébriété généralisée viendra du professeur Tournesol. 

    Il y a un mystère dans l'omniprésence de cette marque de whisky, qui n'est certes pas la plus connue ni la plus réputée dans l'univers du whisky. Pourquoi ce choix d'Hergé ? Il est bon de préciser que l'actuelle distillerie Loch Lomond a été créée en 1965 (la marque existait depuis 1814, nous apprend le site Internet du groupe Loch Lomond), soit un an avant son apparition officielle dans L'Île Noire version 1966. Ce choix de l'auteur belge est d'autant plus surprenant que Loch Lomond ne paraît pas en adéquation avec un personnage aussi tempétueux et caractériel que Haddock. Avouons qu'il aurait été moins surprenant que le goût du capitaine au long cours se porte sur une marque plus typée, un whisky tourbé par exemple (Talisker, Laphroaig ou Lagavulin). Le Guide des Whiskies du Monde décrit la version single malt classique de Loch Lomond comme "assez jeune... à l'arôme léger et frais, sans grande influence de bois". Le blend Signature de Loch Lomond accrédite le caractère léger et passe-partout d'un whisky plutôt fruité et facile d'accès. Subtilité, notes fruitées légères, accents floraux sont les caractéristiques de ces whiskies très "féminins", que ce soit en blend ou en single malt. Le capitaine Haddock aurait-il réellement jeté son dévolu sur la distillerie Loch Lomond ? En tout cas, il en a fait une jolie promotion, rendant cette marque légendaire.

    Loch Lomond Group
    Charles McClean, Whiskies du Monde, éd. Prisma, 2010, 352 p.
    Hergé, L'Île Noire, éd. Casterman, 1943, 1966
    Hergé, Le Crabe aux Pinces d'Or, éd. Casterman, 1953
    Hergé, Tintin et les Picaros, éd. Casterman, 1976
    Tintin Wiki
    Le whisky est à consommer avec modération