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  • Et si tu faisais une BD sur l’Iran ?

    En 2014, l’auteur de Bons Baisers d’Iran entreprend avec sa compagne un voyage touristique en Iran. À l’époque, le pays commence à s’ouvrir au monde et les tours opérateurs organisent timidement les premiers tours dans un pays au patrimoine historique et artistique exceptionnel (un sujet que le bloggueur avait déjà traité dans cet article "Le globecroqueur en Iran"). C’est ce périple que nous raconte Lenaïc Vilain avec humour dans Bons Baisers d’Iran (éd. Vraoum).

    Au pays des Mollahs, le dessinateur ne cache pas la réalité des obligations et des interdits religieux, à commencer par le port du voile que doit supporter son amie pour se plier aux us et coutumes du pays. L’auteur fait plusieurs apartés au sujet du régime islamique. Il remarque avec justesse que l’Iran a connu son Printemps arabe… en 1979. Mais ce qui intéresse d’abord Lenaïc Vilain ce sont les Iraniens et les Iraniennes : leur manière de vivre dans un pays corseté par la religion, leur manière de s’arranger (non sans hypocrisie) avec les interdits (le voile, l’alcool, la pratique de l’Islam) mais aussi leur vision de l’Iran et des Français ("No, no no ! French : white !" assène un taxi lorsqu’il est question de multiculturalisme en France).

    Au final, le lecteur, comme ces deux voyageurs européens, sort un peu plus éclairé par l’Iran contemporain qui ne se réduit pas à la politique internationale, au djihadisme chiite ou à l’affaire du nucléaire iranien. Revenu à Paris, Lenaïc doit répondre à ses proches à une somme de questions et réagir à une série de commentaires clichés ("Les gens doivent détester les occidentaux", "Vous avez dû être suivis par des espions du régime", "Ils sont sympas les Talibans ?" et cetera.). La réaction de la compagne tombe sous le sens : "Fais un livre".

    Ce livre, le voilà.

    Lenaïc Vilain, Bons Baisers d’Iran, éd. Vraoum, 149 p.
    www.tumblr.com/blog/lenaicvilain
    "Le Globecroqueur en Iran"

  • Ce week-end je coince ma bulle

    Montargis-coince-la-bulle-2016.jpgCe week-end, le bloggeur arpentera les couloirs de la septième éditions du festival de bande-dessinée "Montargis coince la bulle", les 28 et 29 mai.

    Le samedi 28 mai aura lieu la remise des prix. En référence au "Chien de Montargis", un jury sélectionné parmi des professionnels de la culture et du dessin, ainsi que des personnalités locales et régionales, récompensera quatre albums par l’attribution d’un prix et d’un trophée symbolisé par un os. Les trophées et les prix sont remis le samedi à la fin de la première journée, après réunion du jury : le Nonosse d'or (Grand Prix de la Ville de Montargis), le Médor (Prix du meilleur album), le Bobby (Prix du meilleur dessinateur), le Rex (Prix de la jeune création), le Crayon Prix "Esprit Libre", décerné par Le LP Château-Blanc et MCLB. Un prix sera décerné à Bruno Le Floch, remis à Brieuc Le Floch et Brieg Haslé, lors de la quatrième édition du festival pour l’ensemble de sa carrière.

    Le salon réunira plusieurs dizaines d'auteurs invités : Hardoc, Olivier Frasier, Stan Silas, Gregory Charlet, Olivier Boiscommun, Julien Maffre, Michel Plessix, Kris, Thierry Murat, Steve Cuzor, Marzena Sowa, Sylvain Savoia, Christian De Metter, Riff Reb’s, Edith, Etienne Leroux, Jérémie Royer, Mezzo, Olivier Supiot, Lucien Rollin, Maud Bégon, Vanyda, Bertrand Galic, Franck Bonnet, Sandrine Revel, Benjamin Béneteau, Daniel Goossens, Éric Cartier, François Duprat, Amélie Sarn, Olivier Perret "Pero", Baru (Dimanche), Denis Lapière, Céline Wagner, Lénaic Vilain, Aude Samama, Thomas Priou et Arnaud Floc’h. 

    Retrouvez sur ce blog deux chroniques sur Maud Begon, une des auteures invitées : "Fix me" et "Moi, Lou, extralucide". 

    "Montargis coince la bulle", les 28 et 29 mai
    le samedi 28 mai de 10h à 19h et le dimanche 29 mai de 10h à 17h,
    3€ , gratuit pour les moins de 18 ans

    Salle des fêtes de Montargis, Le Pâtis 

  • Moi, Lou, extralucide

    Maud Begon et Carole Martinez développent sur deux volumes, Bouche d’Ombre, le thème du surnaturel à travers le parcours de Lou. Cette pimpante fille découvre au lycée, durant les années 80, qu’elle est dotée de pouvoirs extralucides.

    Le premier volume de Bouche d’Ombre, Lou 1985, suit l'adolescente témoin d'un drame puis visitée par un fantôme qui se révèle particulièrement présent. Comment vivre avec un don supranormal et quelle est la place de nos souvenirs familiaux dans nos propre existences ? Ce sont les questions que Lou devra affronter dans ce premier tome, sur fond d'enquête et de spectre : "On entend d’une bouche en apparence humaine / Sortir des mots pareils à des rugissements, / Et que, dans d’autres lieux et dans d’autres moments, / On croit voir sur un front s’ouvrir des ailes d’anges" (Victor Hugo, Bouche d'ombre, Les Contemplations).

    Le deuxième volume, Lucie 1900, continue de suivre la jeune extralucide et entend expliquer les origines de son don. Lou est étudiante et s'est éprise de Marc, camarade de fac et photographe à ses heures. Un jour qu'il prend en photo sa petite amie, il capture du même coup un ectoplasme. Aiguillée par ses tantes Josette et Jeannette, Lou part à la recherche de ce fantôme mais aussi de son passé familial. Grâce à l'hypnose, ses recherches la transportent à Paris en 1900, durant l'exposition universelle. Lou se retrouve dans la peau de cet esprit, Lucie, qui est aussi son aïeule. Lou/Lucie découvre l'univers fascinant des sciences physiques et de l'occultisme durant la Belle Époque et croise par la même occasion Pierre et Marie Curie. Passé et présent se télescopent dans ce deuxième tome de Bouche d’Ombre, ample et aventureux à souhait, jusqu'au dénouement aussi poignant que surprenant.

    Ces deux bandes dessinées confirment le talent de la dessinatrice de Maud Begon, que j'avais chroniquée pour Je n'ai jamais connu la Guerre ("Fix me"), et séduisent pour son sens de la narration due à la scénariste Carole Martinez.

    Maud Begon et Carole Martinez, Bouche d'Ombre, 1, Lou 1985, éd. Casterman, 2014, 70 p.
    Maud Begon et Carole Martinez, Bouche d'Ombre, 2, Lucie 1900, éd. Casterman, 2015, 90 p.
    "Fix me"
    Maud Begon sera présente au salon "Montargis Coince la Bulle" les 28 et 29 mai 2016
    Le Tumblr de Maud Begon

  • Fix me

    Dans Je n’ai jamais connu la Guerre de Maud Begon et Joseph Safieddine, Darius, homme d’affaire cynique, odieux, roublard, méprisant et séducteur impénitent, fait commerce de rêves à coups d’injonctions chimiques. Et c’est peu dire que cela marche : le business est florissant et la société ne s’en sort pas plus mal. Le fix contrôlé et marchandisé est, a priori, un excellent moyen gérer ses frustrations. Lorsque Cerise, une ancienne petite amie de Darius, lui demande à son tour "d’acheter des souvenirs", ce dernier s’en trouve bouleversé.

    Utopie ou dystopie ? Cette question n’a pas vraiment de sens pour cette bande dessinée de Maud Begon et Joseph Safieddine. 145 pages illustrées servent une pérégrination complexe au pays du souvenir, des rêves, des regrets et de la vanité du temps qui passe. Le lecteur peine à trouver au début de ce roman graphique la logique d’une histoire alternant flash-back, scènes oniriques dignes de Dali et intrigue puisant dans le mouvement cyberpunk.

    C’est à partir de la page 95 que ce qui était une histoire "à la Cronenberg" prend des allures proustiennes : le temps qui passe, les souvenirs authentiques ou les êtres disparus refaisant surface. Les auteurs mettent en scène Darius et Cerise dans un tête-à-tête poignant construit avec subtilité sur 25 pages. Le lecteur pourra s’amuser à déceler les références à La Recherche du Temps perdu : le début du Côté de chez Swann ("Longtemps, je me suis couché de bonne heure"), La Prisonnière, Le Temps retrouvé, Sodome et Gomorrhe… Clins d’œils réels ou involontaires ?

    Je n’ai jamais connu la Guerre est en tout cas est aussi riche par ce qu’elle évoque que par ce qu’elle tait. Le titre de l’ouvrage porte en lui un non-dit et un traumatisme que le lecteur découvre dans ses dernières pages. Un traumatisme qui nous éclaire sur le personnage de Darius dont la cuirasse fêlée dévoile les plaies. La dernière partie du livre est également riche d’interprétations sur le personnage de Cerise, apparue dans la vie de Darius à la manière d’un oasis mais aussi d’une révélation cruelle. Qui est-elle ? Quels sont ses liens avec son ami ? Ce personnage est sans doute la plus belle création de cette bande dessinée. Mystérieuse, complexe et fascinante, Cerise semble ne pas se fixer dans l’histoire mais nager dans un océan de rêves.

    Maud Begon et Joseph Safieddine, Je n’ai jamais connu la Guerre, éd. KSTR, 2013, 145 p.
    Maud Begon sera présente au salon "Montargis Coince la Bulle" les 28 et 29 mai 2016
    Le Tumblr de Maud Begon

    Demain, je vous parlerai de Lou, une autre héroïne de Maud Begon

  • Logique comics

    La logique et les mathématiques : tel est l'objet de Logicomix, une des toutes meilleures bandes dessinées de ces dix dernières années. Le personnage principal ? Rien de moins que Bertrand Russell (1892-1970), philosophe connu pour son Histoire de la Philosophe occidentale (1945), pacifiste, mathématicien et logicien.

    Lorsque Logicomix débute, les auteurs de la bande dessinées, qui se sont eux-mêmes mis en scène et en image, s'interrogent sur la ligne à suivre pour leur ouvrage. Ils choisissent de le faire démarrer en septembre 1939, lorsque Bertrand Russell est sollicité par des isolationnistes de l'Université de Princeton. Dans une atmosphère fiévreuse, le mathématicien et pacifiste depuis la première guerre mondiale, raconte son existence devant des étudiants tour à tour électrisés, passionnés, dubitatifs et conquis.

    Bertrand Russell ne cache rien des cinquante premières années de sa vie : son enfance d'orphelin dans le manoir inquiétant de Penbroke Lodge, sa découverte des mathématiques,son initiation à la logique grâce à George Edward Moore, son ambition de donner une base solide aux sciences et aux mathématiques. Le cœur de Logicomix réside dans les travaux et l'écriture, avec Alfred North Whitehead, des Principia Mathematica, ainsi que la vie amoureuse de Russell depuis sa rencontre et sa relation ambiguë avec Alys Whitebread.

    Grâce à son scénario brillant, qui s'étale sur presque 350 pages, ce roman graphique englobe une masse incroyable de savoirs : mathématiques, logique, philosophie, mythologie, art et littérature. Il est question des ambitions et des doutes de Bertrand Russell mais aussi de ses homologues mathématiciens et logiciens, souvent connus uniquement pour leurs travaux : Georg Cantor, Gottlob Frege, Kurt Gödel, David Hilbert, Henri Poincaré, Alan Turing, John Von Neumann ou Ludwig Wittgenstein. Des notes explicatives en fin de livre éclairent un peu plus les parcours de ces scientifiques.

    Avec un sens de la vulgarisation remarquable, les auteurs de Logicomix, Apóstolos K. Doxiàdis, Christos Papadimitriou, Alecos Papadatos et Annie Di Donna, parviennent à dévoiler au plus néophyte des lecteurs quelques notions de mathématiques et de logique : l'algorithme, la théorie des ensembles (plus complexe qu'il n'y paraît), le théorème d'incomplétude, le paradoxe de Russell ou l'auto-référence. L'auto-référence est d'ailleurs au cœur du concept artistique de Logicomix.

    On peut trouver la facture graphique de Logicomix – très ligne claire – assez peu révolutionnaire. Il n'empêche que ce roman graphique est une réussite prodigieuse, au point d'avoir été salué comme une des meilleurs bandes dessinées de ces dix dernières années et comme l'un des ouvrages majeurs de l'année 2009.

    Apóstolos K. Doxiàdis, Christos Papadimitriou, Alecos Papadatos et Annie Di Donna,
    Logicomix, éd. Vuibert, 2009, 348 p.

  • Binet monte en gamme

    51UsiY2za6L._SX379_BO1,204,203,200_.jpgChristian Binet est connu pour les Bidochon, une série de bandes dessinées sur un couple de beaufs franchouillards, râleurs et paumés dans notre monde moderne.

    Ce n'est que récemment que le dessinateur s'est attelé à une autre saga, bien éloignée des Bidochon, Haut de Gamme. Cette fois, l'auteur des Bidochon s'attaque à un milieu bien différent : celui de la musique classique. Deux volumes sont parus à ce jour.

    Le personnage principal, pianiste concertiste, se trouve au début du premier tome, obligé de proposer des cours particuliers. Épaulé par son compagnon, il abandonne le prestige des salles de spectacles pour enseigner, chez lui, le répertoire de Chopin, Mozart et Bach et tenter de tirer vers le haut des élèves peu doués, voire réfractaires.

    Binet s'attaque au milieu feutré de la musique classique et égratigne, non sans férocité, musiciens du dimanche, artistes contrariés, professeurs au bord de la crise de nerf, apprentis pianistes perdus pour toujours ou enfants contraints de tâter de la gamme pour faire plaisir à leurs parents.

    Par une succession de planches, portant pour titre le nom d'une œuvre classique, l'auteur des Bidochon parvient à rire non plus de ces Français moyens de la classe populaire (les Bidochon) mais ceux sortis d'un milieu plus aisé et plus cultivé – mais non exempt pour autant de bêtises. Cruel et cinglant : la condition humaine n'a pas de CSP.

    Binet, Haut de Gamme, éd. Dargaud

  • Star Wars pris la main dans le pot de confiture

    J'avais évoqué il y a quelques mois les emprunts de Star Wars à la série de bande-dessinées Laureline et Valérian ("Laureline et Valérian, bons pour le service"). Le magazine Marianne s'intéresse dans son hors-série consacrée à la saga de George Lucas (décembre 2015), à cette affaire de similitudes plus que troublantes.

    Dans une interview donnée au journaliste Vincent Bernière, le dessinateur Jean-Claude Mézières revient, avec un mélange d'amusement et de dépit, sur la manière dont les auteurs de Star Wars ont, semble-t-il, allègrement pompé sur les aventures des agents spatio-temporels Laureline et Valérian : "On dirait du Valérian !" se serait-il exclamé en découvrant le premier épisode tournée, Un nouvel Espoir (1977). Un pillage en bonne et due forme que les opus suivants ont confirmé : extraterrestres aux similitudes troublantes, décors de mégalopoles ressemblant comme deux gouttes d'eau, Dark Vador inspiré par les Connaisseurs de L'Empire des Mille Planètes (1971) ou le Faucon Millenium copié sur le vaisseau du couple d'agents spatiaux...

    De simples coïncidences ? Voire. Car Star Wars est bien pris la main dans le pot de confiture lorsqu'il reprend des épisodes de la bande-dessinée : Léia en bikini, otage de Jabba dans Le Retour du Jedi (1983), est une reprise d'une scène similaire avec Laureline (Le Pays sans Étoiles, 1972) et la cryogénisation de Han Solo (L'Empire contre-attaque, 1980) n'est pas sans rappeler la capture de Valérian dans une matière translucide dans L'Empire des Mille Planètes. Vincent Bernière précise que selon Jean-Pierre Dionnet, le rédacteur en chef de Métal Hurlant, tous les réalisateurs américains de science-fiction – Ridley Scott, Steven Spielberg ou George Lucas – ont largement pompé dans ce magazine culte auquel a collaboré Mézières.

    Ce dernier raconte comment il a cherché à contacter George Lucas en 1994, moins pour faire valoir ses droits – qui auraient été légitimes – que pour proposer ses services. Mais le réalisateur, qui commençait à travailler sur la remastérisation des épisodes IV, V et VI, resta muet et jamais l'inspiration des créateurs de Laureline et Valérian ne fut officiellement admise. Au sujet de ces pillages à répétition jamais reconnus, le dessinateur dit, non sans amertume : "Au début, on trouve cela inadmissible et puis on s'habitue... Cela fait des lustres que mes albums se promènent. Il n'est pas difficile d'envoyer quelqu'un en France pour se procurer des albums de science-fiction... Cela dit, quand on emprunte si lourdement quelque chose à quelqu'un, on peut, peut-être, le mentionner."

    Le créateur des agents spatio-temporels a bien tenté de lancer une équipe d'avocats pour défendre ses œuvres, mais c'était contre la série Babylon 5. Et devant la bataille judiciaire qui s'annonçait, l'éditeur Dargaud préféra jeter l'éponge.

    Un autre réalisateur, Luc Besson, s'est indigné de ce qui peut être considéré comme du vol caractérisé de propriété intellectuelle : "Les Américains t'ont assez pillé. Moi, je t'engage", lance-t-il à Mézières. Ce dernier fait partie de l'aventure du Cinquième Élément (1997). Et c'est toujours Luc Besson qui devrait permettre à Laureline et Valérian d'arriver sur grand écran (date de sortie prévue : été 2017). L'affront cinématographique devrait être lavé. Ou presque.

    "On dirait du Valérian !", interview de Jean-Claude Mézières par Vincent Bernière, in Marianne, hors-série Star Wars, décembre 2015
    Pierre Christin et Jean-Claude Mezières, Valérian, Intégrales, tome 1, éd. Dargaud, 2016, 160 p.
    Laureline et Valérian, bons pour le service"
    "Le réveil d'une épopée"

     

  • Kiki

    La plus célèbre modèle de l'histoire de l'art, Alice Prin, alias Kiki de Montparnasse, est l'objet d'une bande dessinée impressionnante. En plus de 400 pages, Catel & Bocquet tracent le destin exceptionnel d'une petite provinciale, née en 1901, devenue une égérie légendaire durant l'entre-deux guerres.

    Ce n'est pas la moindre des qualités dans cet ouvrage que d'avoir reconstitué le Paris des années 1920 et 1930 et de suivre le destin de Kiki et de ses ami(e)s : Modigliani, Soutine, Pablo Picasso, Marie Vassilieff, Jean Cocteau, Foujita, sans compter les omniprésents marchands d'art qui trouvaient dans le Montmartre des années folles, le plus important vivier du monde de l'art, dominé à cette époque par le dadaïsme et le surréalisme.

    Au centre de la vie tumultueuse, extravagante et libre de Kiki, c'est le couple qu'elle forme avec le photographe américain Man Ray qui occupe la majeure partie du livre. Tout le monde a au moins vu ces clichés surréalistes et poétiques de cette muse – femme violoncelle, modèle posant aux côtés de masques africains, mannequin immortalisées avec pour tout vêtement des jeux de lumières. Ces œuvres appartiennent au patrimoine mondial mais ont été, avant cela, des reliques jalousement conservées par Man Ray, en souvenir de son amour et de son attachement pour la belle Kiki.

    Cette biographie illustrée nous permet de faire revivre cette femme exceptionnelle, qui a su partager la gloire des artistes légendaires qu'elle a côtoyés et aimés. Kiki de Montparnasse reprend vie grâce à cette bande dessinée et le lecteur découvre toute la palette de son existence, jamais fade, toujours passionnée, pleine d'excès, jusqu'à ses derniers jours. Laminée par la drogue et l'alcool, oubliée et désargentée lorsqu'elle décède en 1951, seules trois personnes assisteront à son enterrement. Mais pas Man Ray.

    Cette bande dessinée exceptionnelle de qualité (Grand Prix RTL de la Bande Dessinée 2007 et Essentiel Fnac-SNCF 2008), solidement documentée, est enrichie en fin de volume par une chronologie de Kiki de Montparnasse puis par des notices biographiques de quelques-unes de ces célébrités ayant croisées la muse de toute une génération d'artistes exceptionnels : Chaïm Soutine, Modigliani, Fujita, Marie Vassilieff, Picasso, Tristan Tzara, Robert Desnos, André Breton, Marcel Duchamp, Jean Cocteau, Lee Miller, Ernest Hemingway et bien sûr Man Ray. Ce dernier fut le plus grand amour et de Kiki et celui que la belle a le plus inspiré. Preuve s'il en est, l'une des photographies les plus célèbres de l'histoire reste le "violon d'Ingres" qui a immortalisé à jamais une femme unique.

    Catel & Bocquet, Kiki de Montparnasse, éd. Casterman, 2007, 408 p.
    Site officiel de Catel