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clemence poesy

  • Voilà l’homme

    On a souvent reproché aux séries françaises leur manque de sérieux, leurs facilités et leur manque d’ambition scénaristique. Tel n’est pas Sambre, la mini-série en six épisodes retraçant l’histoire d’un violeur en série qui a sévi dans le nord de la France et jusqu’en Belgique, de 1988 à 2018. Oui, il aura fallu trente ans avant que la police n’arrive à interpeller le coupable, un homme au-dessus de tout soupçon.

    La Sambre est une rivière, affluent de la Meuse, et coule au nord de la France et en Belgique. En novembre 1988, on loin de Maubeuge, dans une paisible commune, une jeune femme se réveille au petit matin inconsciente au bord du cours d’eau.

    Choquée, incapable d’expliquer ce qui s’est réellement passée, elle dépose une main courante à la police. Quelques jours plus tard, une jeune fille déclare une agression sexuelle. Pourtant, rien ne se passe. L’enquête est quasi inexistante, jusqu’à ce qu’une magistrate s’y intéresse quelques années plus tard.

    En vain. Les femmes et adolescentes victimes se multiplient et les années passent. En 2018, un commissaire se penche sur le dossier que tout le monde semble avoir oublié. 

    Par ce miroir tendu en direction des hommes, la série de France TV parvient à faire mouche

    La série passionnante proposée par France Télévision, disponible en replay, est inspirée du fait divers devenu emblématique des affaires judiciaires au long cours et des égarements de la justice et de la police. De ce point de vue, Sambre est édifiante : enquêteurs dépassés, procédures menées à la "va-comme-je-te-pousse", lorsqu’elles ne sont carrément pas "oubliées", victimes déconsidérées (la fameuse scène de l’adolescente auditionnée est de ce point de vue choquante) et hypothèses de profileurs sèchement démenties par la réalité.

    Si l’on parle de ce dernier point, comment ne pas parler de l’identité du criminel ? Dino Scala – devenu Enzo Salina pour les besoins de la fiction – n’est pas ce marginal tordu et solitaire comme le suppose une enquêtrice dans le quatrième épisode mais un "bon père de famille", père, grand-père, salarié dans la même entreprise et considéré comme un citoyen généreux dans la ville où il habite.

    Jean-Xavier de Lestrade a pris le parti-pris des victimes (excellente Alix Poisson !) et des femmes pour sa série, en mettant aussi en avant ces figures féminines combatives qui ont contribué à faire avancer l’enquête : une juge (Pauline Parigot), une maire (Noémie Lvovsky), une scientifique (Clémence Poésy). Ce sera finalement un commissaire taciturne et opiniâtre (l’excellent Olivier Gourmet) qui mettra la mains sur le violeur en série, jugé et condamné l’an dernier.  

    Fait divers sordide ayant compté plusieurs dizaines de victimes sur trente ans, Sambre est aussi une fiction sociale s’interrogeant sur les violences faites aux femmes et sur la violence masculine, qu’elle soit frontale – ces viols – ou sournoise – les conflits dans la sphère familiale. Avec souvent les regards des hommes mêlant dédains, mépris et même agacements. Par ce miroir tendu en direction des hommes, la série de France TV parvient à faire mouche.   

    Sambre, mini-série policière française de Jean-Xavier de Lestrade,
    avec Alix Poisson, Olivier Gourmet, Julien Frison, Jonathan Turnbull, Noémie Lvovsky, Pauline Parigot, et Clémence Poésy, France TV, 2023

    https://www.france.tv/france-2/sambre

    Voir aussi : "Wonder boy"

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  • Sur le divan

    Dans l’univers des séries télé, En thérapie fait figure de véritable phénomène, tant pour son idée de base que pour son exigence.

    Avant qu’En thérapie ne débarque en France, avec l’adaptation d’Éric Toledano et Olivier Nakache, la création israélienne (BeTipul) avait été adapté aux États-Unis sous le nom d’In Treatment, avec Gabriel Byrne dans le rôle du psychanalyste.

    Là où les showrunners et scénaristes français ont été malins et intelligents est qu’ils n’ont pas collé aux versions précédentes de l’institution télé. Leur version d'En thérapie prend pour fil conducteur les attentats de 2015, traumatisme collectif faisant voler en éclats la psyché de personnages, que le praticien, joué par le formidable Frédéric Pierrot, devra mettre à jour. Alors que lui-même va devoir affronter ses propres démons.

    Leur version d'En thérapie prend pour fil conducteur les attentats de 2015

    Cinq patients se succèdent sur son divan. Il y a Ariane, la chirurgienne (Mélanie Thierry), devant jongler autant avec les victimes du Bataclan qu’avec les incertitudes de sa vie de couple. Il y a Adel, le policier de la BRI (Reda Kateb), policier à la solide carcasse mais cachant des failles et des secrets. Véritable révélation de la série, Céleste Brunnquell joue le rôle de Camille, une nageuse douée qu’un banal accident de la route conduit chez le psy. Il y a enfin le couple composé de Léonora et Damien, en plein questionnements et déchirements.

    Les créateurs français d’En thérapie ont adopté une construction carrée : les patients se succèdent au même rythme dans des épisodes relativement courts (35 minutes). Un cinquième épisode ponctue les quatre séances de psychanalyse. Il s’agit cette fois d’une "consultation informelle" entre le Dr Philippe Dayan et son ex Esther (Carole Bouquet). Le téléspectateur sera sans doute moins sensible à ce choix, bien qu’il se montre assez pertinent.

    Arte vient de terminer la diffusion de la première saison, mais les 35 épisodes sont en ligne sur le site d’Arte. Ils sont absolument à découvrir, d’autant plus que la rigueur et la qualité de la chaîne franco-allemande n’est plus à démontrer.

    Les scénarios des 35 épisodes de cette première saison sont signés David Elkaïm, Vincent Poymiro, Pauline Guéna, Alexandre Manneville, Nacim Mehtar, Éric Toledano et Olivier Nakache. Il fallait bien sûr le préciser.

    En thérapie, série française d’Éric Toledano et Olivier Nakache,
    avec Frédéric Pierrot, Mélanie Thierry, Reda Kateb, Céleste Brunnquell,
    Clémence Poésy, Pio Marmaï et Carole Bouquet, saison 1, 35 épisodes, Arte

    https://www.arte.tv/fr/videos/RC-020578/en-therapie/
     
    Voir aussi : "Assane Lupin, gentleman cambrioleur"

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  • Naissance de Marcel Marceau

    En raison de la crise sanitaire et du grand confinement de ce printemps, Résistance de Jonathan Jakubowicz est passé totalement inaperçu, récoltant un peu plus de 7 000 dollars de recettes sur le continent américain et moins de 300 000 dollars dans le monde. Des chiffres exceptionnellement bas.

    Malgré tout, ce film historique se situant en pleine seconde guerre mondiale, dans la France occupée, mérite que l’on s’y arrête. D’abord pour la prestation de ses deux acteurs principaux, Jesse Eisenberg et Clémence Poésy, ensuite, ensuite parce que le long-métrage de Jonathan Jakubowicz s’intéresse à une personnalité exceptionnelle, dans la période de sa vie la moins connue : Marcel Marceau. Canal+ propose de le découvrir en ce moment.

    Celui qui deviendra le Mime Marceau se nomme dans l’état-civil Marcel Mangel. Né dans une famille strasbourgeoise d’origine juive, l’adolescent n’a pour préoccupation qu’une passion : le spectacle. Déjà doué pour le mime, il voit cependant très vite la guerre le rattraper et la menace allemande entrer dans sa vie. Avec son frère et son cousin, résistants, il décide de s’engager avec eux – mais aussi pour les beaux yeux d'une jeune femme, Emma. Leur combat est le sauvetage d’enfants juifs orphelins. Sachant leur existence condamnée, le groupe de résistance les cache, avant de décider de les faire fuir en Suisse. Le jeune homme prend un pseudo pour ce combat : Marcel Marceau. À Lyon, où les résistants on trouvé refuge, l’officier Klaus Barbie, "le boucher de Lyon" (un surnom qui prendra tout son sens dans une scène effrayante), a vent de cette opération et se lance sur la trace de Marcel, d’Emma et des enfants.

    Biopic à la facture classique, Résistance est à voir. Le premier intérêt est la découverte d'un pan méconnu de la vie du Mime Marceau. Un nom qui date de cette période et qui prend tout son sens. Jesse Eisenberg campe le plus grand mime de l’histoire avec justesse, ce qui n’a rien d’évident pour une telle figure qui a contribué à révolutionner l’histoire du spectacle. On prend tout autant plaisir à retrouver Clémence Poésy, si rare et pourtant si impeccable dans ce drame historique à l'histoire passionnante.

    Les critiques sur le choix de l’anglais pour un film se déroulant en France n’a a mon avis ni réelle pertinence ni grand intérêt (regardez un peu les classiques indiscutable que sont La Liste de Schindler ou Le Pianiste…). Résistance (un titre trop général qui ne reflète pas le choix artistique du réalisateur et scénariste) reste un bon film sur cette période, et qui se regarde à la fois comme un honorable long-métrage historique, un vrai film à suspense et comme un magnifique hommage à Marcel Marceau. 

    Résistance, biopic de Jonathan Jakubowicz, avec Jesse Eisenberg, Ed Harris, Édgar Ramírez,
    Clémence Poésy et Matthias Schweighöfer,
    France, États-Unis, Allemagne et Royaume-Uni, 2020, 120 mn,
    en ce moment sur Canal+

    https://www.canalplus.com

    Voir aussi : "La bête doit mourir"

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  • Bien mieux qu'une thèse sur les frigos au cinéma

    L’‎Œil du frigo nous régale de ses chroniques sur les frigos au cinéma. Celle qu'il nous propsoe cette semaine sur le mémorable 127 heures de Danny Boyle a ceci de particulier qu'elle résume à elle seule tout l'intérêt de parler de ces appareils d'électroménager présents sur les grands écrans, dans des scènes a priori anodine. Focus sur 127 heures donc, un drame tiré d'un fait réel : à ne surtout pas copier comme l'écrit Philippe, notre œil du frigo.  

    Nous voici prêt pour un long moment cinématographique : 127 H de Dany Boyle, ou comment tout savoir sur le Blue John Canyon en Utah !

    Sur une musique tonitruante, Never Hear Surf Music Again Free Blood, le beau James Franco s’apprête à partir en expédition. Comme on fait tous, il ouvre son frigo et remplit son sac. Le frigo reste pratiquement tout le temps du générique dans le champ et raconte finalement toute l'histoire. Je dis ça au cas où les spectateurs fainéants de la rétine ne voudraient pas se taper 127 heures de film. Dans ce frigo, la main droite de James cherche et attrape nourriture, boissons énergétiques et laisse tomber les bières Coors. On sent qu'on ne part pas en pique-nique. C'est du sérieux. Mais c'est surtout le travelling qui est impressionnant : pourquoi montrer cette main en travelling se saisissant des objets vitaux pour partir en randonnée ? Il faut quand même remercier le caméraman qui s'est frappé un déplacement de gauche à droite et de droite à gauche pour servir les idées de Dany Boyle.

    Un chicken burrito de la marque Patio, me direz-vous, c'est pas spécialement fun quand on part à l'aventure. On pense tout de suite qu'il va se faire un feu de camp, se faire griller son poulet et l'enrober dans des galettes de maïs. Mais le frigo livre tout fait, tout frais, y a plus qu'à se régaler. Bon, le ketchup dans la porte reste à sa place : c'est déjà ça. Évidemment, la boisson énergétique est emballée aussi avec un sac blanc dont on ne saura rien. Un homme face à son frigo et l'histoire est lancée. Je ne peux pas disserter davantage sans tout révéler du film mais Dany a bien fait ses courses et le frigo cinématographique est bien achalandé.

    Je ne vous proposerai aucune recette avec ce qu'il y a au fond de ce frigo, Peut-être tout au plus une salade de fruits avec une tomate, mais je ne suis pas sûr que cela serve le propos du film. Car si Dany a placé un frigo en tout début de l'histoire, ce n'est pas pour coincer cette scène en plein milieu du film dans le canyon. Le récit se situe entre la pomme et le ketchup. Le plan dans le frigo semble ruisseler sur les victuailles pour nous expliquer le film. Si je devais faire une thèse sur les frigos dans le cinéma (histoire d'écrire cinq cents pages et la présenter dans un amphi) je choisirais forcément cette scène. Je sais, je suis comme ça : parfois je fais des vrais choix, douloureux voire cinglants. Je passe sous silence l'univers du placard adjacent pour ne pas vous trop raconter ce film.

    Un film qui traite d'un cercueil de pierre et du renoncement, on est loin de Burried de Rodrigo Cortes (qui n'a aucun frigo), mais quand même : "uUn homme enterré vivant doit s'en sortir..." Si j'avais envoyé ce pitch à une société de production, j'aurais perdu toute crédibilité... Ah oui ! c'est vrai : J'en ai pas ! Ne renoncer à rien, pas même à un Chicken Buritto et l'humanité en sort grandie. Un petit rappel : cette histoire est une histoire vraie, mais c'est interdit de copier !

    ODF

    127 heures, drame américain de Danny Boyle
    avec James Franco, Clémence Poésy et Kate Mara,
    2010, 94 mn

    Voir aussi : "L’‎Œil du Frigo débarque sur Bla Bla Blog"
    "127H Frigo"
     

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