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  • Schopenhauer révélé

    schopenhauer,philosophe,allemagne,goethePour qui n’est pas familier de Schopenhauer, l’essai synthétique d’Ugo Batini est parfait pour découvrir le philosophe le plus lu au XIXe siècle. L’auteur du Monde comme Volonté et comme Représentation (1819), ouvrage majeur s’il en est, s’est pourtant fait connaître sur le tard. Il a 60 ans lorsqu’une revue anglaise s’intéresse à cet "iconoclaste dans la philosophie allemande." C’est le point de départ d’une notoriété qui ne s’arrêtera plus, jusqu’à son décès sept ans plus tard en 1860. Arthur Schopenhauer, "philosophe autant qu’artiste", a laissé l’image tenace et largement galvaudée d’un intellectuel aigri, pessimiste et vouant un mépris pour les hommes (il leur préfère largement ses chiens, dit-on).

    Cette légende, Ugo Batini entend la démystifier grâce à son essai, mêlant la biographie et et l’essai de philosophie. Et l’on découvre un homme prenant chair, dans une époque troublée. Né à Dantzig l’année précédant la Révolution française, Arthur Schopenhauer vit dans une Europe abîmée par les guerres napoléoniennes. Issu d’une famille de la petite bourgeoisie allemande, le jeune homme sera toute sa vie hantée par un père qu’il a toujours vénéré et une mère intellectuelle, tenant un salon réputé. Elle sera aussi la célébrité de la famille grâce à des succès éditoriaux.

    En suivant ses parents en voyage à Toulon puis à travers l’Allemagne, et en touchant au commerce et à la médecine, Arthur Schopenhauer bâtit peu à peu un système philosophique, inédit par ses influences comme par ses concepts : "[Il] développe une véritable Natur-philosophie, qui cherche à expliciter la totalité des phénomènes de la nature sans les réduire à la simple opposition de la matière et de l’esprit."

    Ugo Batini parle des influences de philosophes et de courants de pensée : Platon, le scepticisme (Gottlob Ernst Schulze) et Kant, qu’il étudie avec passion, avant d’en critiquer les idées. Schopenhauer met en jeu la question de l’intuition et de l’expérience, contre l’idéalisme sous toutes ses formes (critique, subjectif ou absolu).

    Une influence inattendue : celle du bouddhisme

    En pleine guerre napoléonienne, Arthur Schopenhauer rencontre Goethe, qui salue en lui "un homme remarque et plein d’intérêt." Ensemble, ils travaillent sur un Traité des Couleurs, en 1810, qui marque à la fois une rupture entre ces deux génies et qui constitue aussi le ferment du Monde comme Volonté et comme Représentation : "Schopenhauer a besoin pour établir son système de rapatrier les couleurs dans l’œil alors que le tempérament réaliste de Goethe ne pouvait l’empêcher de les laisser aux mains de la nature."

    Le lecteur trouvera dans cet essai biographique un chapitre passionnant sur une influence inattendue : celle du bouddhisme. Au début du XIXe siècle, les sciences orientales sont en pleine renaissance, et le philosophe allemand y trouve une puissante inspiration : "[Il] n’en retient spécifiquement que trois éléments : sa conception non-individuelle des âmes ou métempsychose (…), l’appréhension purement négative de la délivrance… [et] l’idée un peu réductrice d’une religion athée." La référence au brahmanisme est au cœur du Monde comme Volonté et comme Représentation.

    Son essai majeur est publié en 1819, ne suscitant que peu de réactions, jusqu’à la parution de cet article anglais élogieux, trente ans plus tard. Ugo Batini consacre les cent dernières pages de son essai à expliquer la portée de son système de pensée. Le lecteur est pris par la main pour découvrir les concepts développés par le philosophe : la conscience meilleure ("un négatif de la conscience empirique"), la contemplation esthétique (car Schopenhauer peut être vu autant comme un philosophe que comme un artiste), l’irréalité du monde (cette "fragilité de la représentation"), l’"intrication intime du sujet et de l’objet" et la place centrale de la volonté. Ugo Batini avance pas à pas pour nous faire saisir les concepts novateurs - et parfois complexes - de Schopenhauer. "Ainsi, le monde entier nous apparaît bien comme une représentation, mais il se trouve qu’au sein de toutes nos représentations il en existe une singulière dont nous saisissons la face cachée : le corps."

    "Quelle est la clef de l’énigme de l’essence du monde" ? Quel est le lien entre corps et volonté ? Peut-il y avoir une métaphysique de la nature ? Quid de l’art et de l’expérience esthétique ? Ce sont autant de questions qu’aborde ce Schopenhauer.

    Hugo Batini réussit à faire du philosophe non plus ce vieillard acariâtre mais un homme sachant parler de la nature, de la compassion, de l’amour et des arts. Un Schopenhauer enfin révélé.

    BC

    Ugo Batini, Schopenhauer, éd. Cerf, coll. Qui es-tu ?, 2020, 200 p.
    https://www.editionsducerf.fr/librairie/livre/18941/schopenhauer
    https://www.schopenhauer.fr

    Voir aussi : "Dante, voyage au bout de l'enfer"

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  • June and the Jones et la quadrature du cercle

    C’est avec bonheur que je vous propose de découvrir le trio June and the Jones. On va enfin s'attarder sur ce groupe français et voir ce que cette fratrie inattendue a dans le ventre. Leur nouvel EP, Square The Circle, entend entend résoudre une quadrature du cercle, comme son titre : trouver sa place et l’amour, sans perdre des yeux la famille, dans un monde en perte de repères.

    June and the Jones a fait le choix d'une pop à la fois joyeuse, dansante et psychédélique (Dancing On The Moon). La voix fluette de la chanteuse Alice est parfaite pour les six titres de ce mini album extrêmement sophistiqué : mélodies efficaces (Brother), son seventies et rythmiques irrésistibles (Square The Circle). Le tout avec le choix d'une production ambitieuse et jamais facile (le formidable titre eighties, In My Head).

    June and the Jones ne s'interdit pas de mettre son EP sous acide, à l'instar du titre passionné You Got The Hold On Me. Cold Eyes atterrit pour une pop plus apaisée, pour ne pas dire plus sérieuse, mais toujours avec cette appétence pour une pop à forte densité, soutenue par des synthétiseurs planants.

    Le dernier titre, Brother, clôt en beauté et en délicatesse cet EP qui est celui d'une jeunesse violemment heureuse.

    June and the Jones, Square The Circle, EP, 2020
    https://www.facebook.com/juneandthejones
    https://www.instagram.com/juneandthejones

    Voir aussi : "Branchée"

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  • La femme est-elle un homme comme les autres?

    café philo,féminismeLe café philosophique de Montargis proposera une séance exceptionnelle au Hanger de Châlette-sur-Loing le vendredi 6 mars à 19 heures, dans le cadre d'une représentation des Monologues du Vagin. Cette pièce de théâtre emblématique sera proposée par la Compagnie Je Est Un Autre.

    Le café philosophique de Montargis proposera avant cette représentation une séance autour du droit des femmes. Le débat portera sur cette question : "La femme est-elle un homme comme les autres ?"

    La question de la place de la femme dans la société et de l'égalité homme-femme sont des sujets toujours brûlant, spécialement depuis les mouvements #MeToo ou Balance Ton Porc. Le café philosophique de Montargis proposera de débattre autour de la question de l’égalité hommes-femmes et du sexe. Comment définir un homme et une femme ? Quels rôles leur attribue-t-on ? Ces rôles sont-ils interchangeables ? Une égalité du genre doit-elle conduire à une indifférenciation des rôles ? Quid du féminisme ?

    Ce sont autant de points qui seront discutés et débattus le vendredi 6 mars, à partir de 19 heures au Hanger de Châlette-sur-Loing.

    La participation sera libre et gratuite.

    Café philo "La femme est-elle un homme comme les autres ?"
    Hanger de Châlette-sur-Loing (Loiret)
    Vendredi 6 mars, 19 H
    http://cafephilosophique-montargis.hautetfort.com

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  • Philippe Katerine pas terne

    Il est enfin temps de parler de celui que la respectable académie des Victoires de la musique a décidé de récompenser comme artiste de l'année. Ni plus ni moins. Que de chemin parcouru depuis ses débuts dans les années 90 pour celui qui était ce musicien au style british et comme téléporté d'un épisode du Prisonnier. L'artiste vendéen proposait une pop déjà inventive mais lorgnant sutout du côté de l'easy listening sixties.

    Une autre époque : car, depuis, le chanteur signe d'ébouriffants albums aussi inventifs que désarçonnant. Pour son dernier opus, Confessions – une référence à ses origines catholiques et bocagères –, Philippe Katerine s'est entouré d'amis et pointures artistiques : Camille, Gérard Depardieu, Angèle, Chilly Gonzales, Lomepal, Clair, Oxmo Puccino, Léa Seydoux et Dominique A.

    Ces featurings ont choisi de s'engager dans cet album audacieux, dingue (Bof Génération), inventif (Point noir sur feuille blanche, Madame de), drôle (88%), tendre (Une journée sans), personnel (Bonhommes, Aimez-moi), osé (KesKesséKçetruc), intelligent (Duo) mais aussi poétique (La clef).

    18 titres composent cet opus moins patchwork et plus cohérent qu'il n'y paraît. Car Philippe Katerine est un artisan doué autant qu'un compositeur inspiré et un grand enfant au plaisir communicatif, à l'instar du régressif BB Panda ("Vous êtes tous des C.O.N.S.")

    Philippe Katerine n'est pas le dingue que l'on décrit. Il est aussi capable de proposer des moments tendres ou nostalgiques (La converse, Malaise, Bonhommes, Aimez-moi) ou d' inénarrables titres appelés à devenir des classiques (J'aime être stone avec toi, KesKesséKçetruc avec Camille ou Duo avec Angèle et Chilly Gonzales).

    "On a le même tempo mais pas le même pattern"

    L'éternel ado attardé ne s'embarrasse pas d'autocensures dans ses Confessions. Avec Camille, il s'interroge avec loufoquerie sur le sexe ("Le point commun, entre Sigmund Freud et Hugh Hefner / Ils étaient tous les deux obsédés sexuels, mais Freud a révolutionné la pensée occidentale, Hefner la presse américaine, voire mondiale", KesKesséKçetruc), avec Lomedal de l'homosexualité contrariée ("Quinze pour cent des mecs sont pédés (en vrai) / Mais soixante-treize pour cent veulent pas se l'avouer" 88%).

    Dans le Duo avec Angèle (un trio en réalité puisque Chilly Gonzales est de la partie), Philipe Katerine propose une mise en abîme de la création musicale ("On a le même tempo mais pas le même pattern"). Quelques sujets sérieux sont abordés, mais toujours avec l'excentricité qu'on connaît de l’artiste vendéen : l'écologie (BB Panda), le racisme (Blond, avec Gérard Depardieu), les crises actuelles (Bof Génération, avec Dominique A). Sans oublier le sexe et l'humour quasi omniprésents dans ces Confessions pas très catholiques (KesKesséKçetruc, Rêve affreux ou 88 %).

    La meilleure éloge que l’on peut faire de Philippe Katerine est sans doute celle de Léa Seydoux dans Rêves heureux : "Depuis mes 10 ans, je suis fana de toi / Tu as quelque chose que les autres n'ont pas / Enfin, je n'sais pas si c'est un truc en plus ou en moins / Mais c'est pas rien / Depuis mes 10 ans, j'ai pas aimé que toi / Mais je souris quand je t'entends et te vois / Quand je te vois quelque chose me dis / "Tiens, le monde va bien. Le monde va bien ?"

    Philippe Katerine, Confessions, Wagram Music / Cinq 7, 2019
    http://katerine.free.fr

    Voir aussi : "Brol d’elle"

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