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abbatiale saint-robert

  • Pom, pom, pom, pom

    Voici la suite de l’Intégrale des symphonies de Beethoven par l’Orchestre Consuelo dirigé par Victor Julien-Laferrière. L’enregistrement proposé par le label B.records a été capté, comme pour le coffret, à l’Abbatiale Saint-Robert lors du Festival de la Chaise-Dieu, cette fois 27 août 2024. Le programme s’intéresse aux Symphonies n°5 (surnommée "Symphonie du Destin") et la Symphonie n°6 dite "Pastorale". La Symphonie n° 8 vient compléter l’enregistrement.

    Dans la carrière de Beethoven, et dans celle de l’histoire de la musique en général, la date du 27 décembre 1808 est à marquer d’une pierre blanche. C’est en effet ce jour-là, au Theater an der Wien de Vienne, que le compositeur allemand propose un concert-fleuve composée de son Concerto pour piano et orchestre n°4, de sa Fantaisie pour piano, chœur et orchestre en ut mineur, d’une Fantaisie pour piano improvisée, d’un Air de concert pour soprano et orchestre, des extraits de sa Messe en ut majeur et, clou du spectacle, des Symphonies 5 et 6. On aurait aimé être à la place des spectateurs de l’époque. Pourtant, ce concert de près de quatre heures fut un semi-échec pour son interprétation (une seule répétition en guise de préparation) et son organisation (une salle glaciale). Mais les critiques furent magnanimes et l’accueil finalement très positif.  

    De la Cinquième, même le moins connaisseur de classique connaît les quatre notes d’ouverture, les fameux "pom pom pom pom" qui ouvrent le rideau dans l’Allegro con brio, avec un mélange de majesté et de provocation. Quatre notes légendaires qui ont fait sursauter et crier littéralement le public du XIXe siècle lors des premières représentations. Aux questions sur cette entrée en matière tonitruante, Beethoven a expliqué, non sans agacement : "Ainsi le destin frappe à la porte…" Confère le sous-tire de cette Cinquième, "La Symphonie du Destin", donc.

    L’Orchestre Consuelo fait preuve de fougue et de sérieux pour cette nouvelle interprétation. Saluons la prise de son d’Alice Ragon qui profite de l’acoustique exceptionnelle de l’Abbatiale Saint-Robert, donnant à cet enregistrement de la couleur et une belle densité. La Cinquième, véritable révolution romantique (on pense à l’Andante con moto), frappe par les transitions intelligentes entre les quatre mouvements, donnant à cette œuvre le caractère d’un être vivant, entier et au solide tempérament. Les cuivres étincelants de l’Allegro et les cordes enfiévrées  rappellent qu’à l’époque de l’écriture et de la création de cette symphonie, l’Europe est embourbée dans les effroyables guerres napoléoniennes (Scherzo : Allegro). Beethoven avait manifesté son enthousiasme pour Napoléon Bonaparte, avant que ce dernier ne se transforme en conquérant et en tyran. N’est-ce pas justement l’allant guerrier, l’espoir de paix et l’optimisme qui marquent le quatrième mouvement Allegro-Presto, jusqu’à une fin mémorable ?

    Véritable révolution romantique

    On dit des symphonies de Beethoven qu’une sorte de malédiction frappe celles numérotées d’un chiffre pair – les Deuxième, Troisième, Quatrième et Huitième (la Sixième a un statut à part). Mal connues, mal aimées, elles ont du mal à exister à côté des "impaires". Ce second coffret fait une place à la Huitième, à côté de la Cinquième et de la Sixième. Une manière de découvrir cette œuvre.

    La Symphonie n° 8, op. 93, en fa majeur, a été composée en 1812 et créée à Vienne deux ans plus tard. Elle est composée de quatre mouvements qui ont la particularité de ne pas comporter de mouvement lent. Celle que Beethoven nommait "Petite symphonie" est en effet relativement courte – le plus long des mouvements dépasse à peine sept minutes (Allegro vivace e con brio) et le plus court, l'Allegretto scherzando, fait un peu plus de trois minutes et demi. Plus classique que réellement romantique, la Huitième lorgne du côté de Mozart et de Haydn. Le compositeur allemand a même ajouté un mouvement de menuet (Tempo di menuetto). Finalement, le XVIIIe siècle n’est pas loin. L’auditeur gouttera le travail mélodique comme les ruptures de rythmes, en particulier dans le premier mouvement. Voilà qui prouve qu’on ne doit pas prendre à la légère cette Huitième, coincée entre l’exceptionnelle et poignante Septième et la monumentale Neuvième. En vérité, cette Huitième séduit pour sa concision et son aspect de belle mécanique, intelligente et lumineuse. Peut-être aussi nostalgique (Tempo di menuetto), avant un finale puissant, certes moins mémorable que le finale de la Cinquième.

    La Symphonie n°6 fait l’objet d’un disque à part dans le coffret de b.records. Archi jouée, archi enregistrée et archi utilisée (films, séries, documentaires), elle allie classicisme, romantisme et naturalisme. Impossible, à ce sujet, de ne pas frémir à l’écoute de l’Allegro ma non troppo, véritable tube beethovénien. Il faut ajouter – mais on ne s’en étonnera pas – que le compositeur allemand était un amoureux de la nature et que la campagne verdoyante autour de Vienne l’inspira. L’Orchestre Consuelo l’interprète sans chercher à le détourner de sa "pastoralité". Le naturalisme (les chants d’oiseaux, l’orage de l’Allegro ou le vent) se pare ici de romantisme, particulièrement éloquent dans le deuxième mouvement Andante molto moto. Moins connu que le premier, il mérite pourtant de figurer sur les meilleures playlists. Victor Julien-Laferrière le dirige avec subtilité et délicatesse, laissant aux cordes le soin de dominer la partie.

    Comme pour la Cinquième, un soin particulier est donnée aux transitions, en particulier entre l’Allegro du troisième mouvement et l’Allegro-Allegretto du Finale. Un Finale incroyable, puissant et inquiétant dans lequel la nature se met en branle. L’orage éclate. Le vent fouette la campagne. La pluie s’abat. La menace est partout, avant que le calme ne revienne. L’Orchestre Consuelo prend un soin particulier à donner de la densité, du relief, du son et du rythme à la dernière partie, avant un retour vers la paix, appuyée par les thèmes et mélodies du premier mouvement. On est de retour dans le caractère pastorale de cette œuvre majestueuse – la première, sans doute, à écouter si l’on veut entrer dans le répertoire de Beethoven.              

    Ludwig van Beethoven, Intégrale des Symphonies de Beethoven vol.2 : Symphonies n°5, 6 & 8,
    Orchestre Consuelo, dirigé par Victor Julien-Laferrière, b•records, 2025
    https://www.b-records.fr
    https://www.orchestreconsuelo.com
    https://www.victorjulien-laferriere.com
    https://www.chaise-dieu.com

    Voir aussi : "Beethoven, Intégrale, Première"
    "À Beethoven, l’humanité reconnaissante"

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