Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

jean-claude zylberstein

  • Le derrière de la pop 

    Avril marque le retour de Fantask, le numéro qui étudie le derrière de la pop culture. Et cela est d’autant plus vrai pour ce deuxième numéro, daté de mars 2022, qui entend répondre à une question taboue : nos héros ont-ils une vie sexuelle ? Après un premier numéro sur le mal et ses génies, voilà donc un sujet qui promet d’être tout aussi sulfureux mais aussi drôle, enjoué et léger.

    Vaste sujet que le sexe, sujet que les contributeurs entendent bien creuser à travers des interviews exclusives, des extraits de romans, des articles de spécialistes, des portfolios d’artistes internationaux et des archives inédites. Issa, artiste et fondateur du studio de tatouage Unique-Horn Tattoo, a conçu la couverture à la fois pop et orgiaque.

    Pour ce nouveau numéro, Fantask mêle témoignages d’auteurs (à l’exemple de l’interview de Jean-Pierre Dionnet, "digne fils spirituel de René Goscinny" ou d’Alan Moore), analyses culturelles et sociologiques du sexe dans les arts populaires ("Les parodies au 7e ciel" de Claude Gaillard ou une interview croisée des universitaires Michel Maffesoli et Vincenzo Susca), des focus sur les parodies olé-olé  ("Un siècle de détournement en BD" de Bernard Joubert), sans oublier des portraits d’artistes passionnés (le graphiste TheOneCam et son étonnante collection de jouets sexy, détournés) ou des projets artistiques et éditoriaux (une histoire du roman porno populaire par Christophe Bier ou l’interview de Jean-Claude Zylberstein, l’éditeur de Chute Libre entre 1974 et 1978).

    Léna Pontgelard consacre un article érudit sur le fanart et la fanfiction. Le lecteur pourra s’arrêter avec intérêt sur l’étonnant concept d’Omegaverse, avant de s’essayer à "lire une fanfiction  ou un doujinshi", histoire de voir s’il est réellement "ouvert d’esprit".

    Autre surprise : celle de voir dans ce numéro épicé la très (trop ?) sage marque Disney faire l’objet d’une chronique spéciale. Mais c’est pour mieux insister sur l’aspect a-sexuel de ses personnages ("La frustration pour certains n’en est que plus forte"). Il n’est souvent question dans les films Disney que d’amour irréel, de personnages stéréotypés, de femmes rêvant de prince charmant et d’héroïnes "clairement immatures sexuellement". Ces figures mythiques (Cendrillon, Blanche-Neige ou La Belle au Bois dormant) ont été analysées par le psychanalyste Bruno Bettelheim. Au sujet des films Diney, "la nudité est inimaginable" insiste Christian Renaut, y compris lorsqu’il s’agit de coups de foudre, de rencontres amoureuses ou même d’une petite sirène sortant de l’océan dans le plus simple appareil. Paradoxalement, alors que Disney a toujours voulu être en pointe dans la tolérance, côté sexe, pour le moins, c’est ceinture... Ce qui n’a pas empêché le dessinateur Wallace Wood de réaliser en 1967 un poster scandaleux illustrant une orgie rassemblant quelques uns des héros de Disney. Fantask nous en dit quelques mots.

    Batman, Tintin, Dark Vador, la Princesse Leia, Dracula et les vampires et même les Schtroumpfs (sic) font plusieurs apparitions dans les positions les plus… gênantes, avec toujours humour, du plus léguer au plus noir, tel cet étonnant Alien, dessiné par Miles Teves, dans une pose des plus lascives…  

    Un épais dossier est consacré à "la difficile sexualité des super-héros". Un sujet bien peu évoqué, on s’en doute, dans les films de Marvel, mais que le magazine pop entend remettre au goût du jour : "Depuis les années 1950, cette question ne cesse de d’exciter geeks, universitaires, et même des romanciers". Rodolphe Lachat ajoute même, taquin : "Et avec cette curieuse manie de mettre leur slip par-dessus leurs collants, [le super-héros] nous adresserait-ils un subtil message ?"

    Transgresser pour s’émanciper

    Le dossier est richement illustré de dessins de super-héros aux physiques avantageux, d’étreintes sportives ou de super-héroïnes glamour en diable. Le lecteur s’arrêtera sur les dessins fétichistes de Joe Shuster avec son Superman dans des positions les plus étonnantes : sadique, fouetté, attaché ou gratifié par une gâterie. Un article de Xavier Fournier s’intéresse aux relations entre le personnage le plus célèbre de la galaxie des super-héros et Wonder Woman. Pouvons-nous parler à leur sujet d’une "histoire de cœur, de sexe et de lasso" ? Autre couple bien connu : celui de Batman et Robin, dont la relation homosexuelle est déjà bien connue.

    Richement illustré, le numéro 2 de Fantask propose également un portfolio de Rockin’ Jelly Bean, avec ses vamps surnaturelles (Erostika), dans un "style mouillé et chaud", un autre du Français Vince et ses femmes fatales brunes, blondes, rousses ou afros, sans oublier les vamps robotisées de Hajime Sorayama. À cela s’ajoute une interview du dessinateur légendaire Milo Manara, qui revient sur sa carrière foisonnante, avec des reproductions de ses magnifiques dessins qui viennent apporter un contrepoint sublime au conservatisme contemporain, ce que le dessinateur italien regrette ("L’érotisme, c’est l’élaboration culturelle du sexe").

    Et si le féminisme pouvait avoir sa place ? C’est en tout cas l’ambition de Céline Tran, directrice chez Glénat d’une collection fort opportunément baptisée "Porn’Pop". Fantask en profite pour parler de la place des femmes et des gays dans la culture pop, entre émancipations, révolutions et régressions. Et si l’avenir de la pop résidait dans les séries télé, se demande la journaliste Marion Miclet, dans un article fouillé où elle parle de la représentation de la nudité mais aussi du mouvement #MeToo ?

    L’excellente Maïa Mazaurette termine en beauté ce numéro riche de plus de 240 pages par une question : "Pourquoi la vie sexuelle des super-héros nous fascine-elle autant ?" Et si la réponse venait de ce constat que "la sexualité n’appartient pas qu’au monde pratique, mais aussi à la vaste famille des idées" ?

    Un autre message du magazine pourrait être aussi celui-là : transgresser pour s’émanciper.  

    Pour public averti.

    Fantask, numéro 2, avril 2022, 240 p.
    Numéro actuellement disponible en librairie
    https://www.kisskissbankbank.com/fr/projects/fantask2
    https://www.facebook.com/huginnetmuninn
    http://huginnmuninn.fr/fr/collection/editions-fantask

    Voir aussi : "Fantasque, fantastique et Fantask"
    "Le Caravage ressuscité en BD"

    Tenez-vous informés de nos derniers blablas
    en vous abonnant gratuitement à notre newsletter.

    Likez, partagez, twittez et instagramez les blablas de Bla Bla Blog !