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Une vie toute neuve

À Séoul, en 1975, Jinhee (Kim Saeron), 9 ans, se laisse entraînée en toute confiance par son père (Sol Kyung-gu) dans une grande et agréable balade. Robe neuve, gâteau, repas au restaurant : rien ne manque à cette journée idyllique. L’objectif de cette promenade est en réalité un orphelinat catholique où Jinhee est abandonnée par son père afin de lui donner la chance d’une nouvelle vie. Puis, ce dernier disparaît ; il ne reviendra plus.   

Pour Jinhee, à l’incompréhension et à la certitude que tout cela ne peut être vrai ("Mon père est un menteur !" lance-t-elle au cours du film) succède la terrible réalité de son abandon mais aussi l’espoir qu’une adoption lui apportera de nouveaux parents et "une vie toute neuve". Une vie toute neuve qui vaut aussi pour ce père méprisé : dans la Corée du Sud traditionnelle des années 70, le divorce est si mal considéré que se remarier nécessitait de faire table rase de son passé, même au prix de l’abandon du ou des enfants d’un premier mariage.

Là où des films comme Holy Lola de Bertrand Tavernier s’attachaient à suivre le parcours de parents adoptants, Une Vie toute neuve suit le quotidien sombre d’une enfant traumatisée par son abandon et  dans l’attente d’être accueillie par des adultes.    

La séparation est la clé de voûte de cette fiction : séparation avec le père, bien sûr, mais aussi séparation de deux amies, séparation de l’orphelinat puis déracinement lors de son arrivée à Paris. Le film se clôt d’ailleurs sans que le spectateur n’assiste à la rencontre entre la fillette et ses nouveaux parents. Ce choix, certes critiquable, met le film à l’abri d’un pathos prévisible et inutile. 

Ayant connu elle-même l’adoption durant son enfance, Ounie Lecomte signe ce premier long-métrage en partie autobiographique d’une très grande qualité. La grande originalité de cette œuvre très personnelle est que la caméra se met à la hauteur des yeux de Jinhee. On peut saluer la réalisatrice qui, non seulement évite le sentimentalisme mais porte en plus un regard plein de compassion sur la petite Coréenne, admirablement interprétée par Kim Saeron.    

Ounie Lecomte, Une Vie toute neuve, 90 mn, 2010 

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