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long-métrage - Page 12

  • Sixties, sweet sixties

    Ah, les années 60 : l’insouciance, la prospérité, l’espoir en des jours meilleurs… et le machisme triomphant. Last night in Soho, sorti l'an dernier (et visible aujourd'hui sur Canal+), est un étrange voyage dans le temps, le crime et la folie. Heloise (Thomasin McKenzie), étudiante en stylisme, est fan de cette période : de sa musique mais surtout de sa mode. La jeune femme quitte la campagne anglaise et sa grand-mère qui s’occupe d’elle depuis le suicide de sa mère, dont on ne sait du reste pas grand-chose.

    Elle rejoint Londres pour étudier le stylisme dans une école renommée, mais se trouve en décalage au milieu de ses camarades de promotion. Elle finit par couper les ponts avec sa colocataire et choisir une chambre en ville chez une certaine Madame Collins. La nuit de son installation, un rêve la conduit dans le Londres qu’elle fantasme, celui des années 60. Elle y croise Sandie, son double, une jeune femme fatale bien décidée à réussir dans un monde d’hommes extrêmement dangereux. Et le danger guette aussi Heloise, sur une corde raide entre la réalité, le rêve, le cauchemar et la folie.   

    Edgar Wright fait montre de maestria dans une mise en scène luxurieuse, imaginative et horrifique

    Last night in Soho d’Edgar Wright cache bien son jeu. C'est un petit thriller, certes non sans imperfections, à l’image du personnage de la mère qui aurait sans doute mérité un vrai traitement. Le personnage principal, joué par l’impeccable Thomasin McKensie (Jojo Rabbit, Old), est une très belle invention : une fille paumée, orpheline et rêveuse se plongeant dans sa passion de la mode et les années 60. Dans le rôle de Sandie, il faut absolument parler d’Anya Taylor-Joy, aussi mystérieuse que la joueuse d’échecs du Jeu de la dame.

    Edgar Wright fait montre de maestria dans une mise en scène luxurieuse, imaginative et horrifique dans la dernière demi-heure. Il faut aussi souligner le travail de décors et de costumes, servant un film fantastique et engagé.

    Engagé, oui. Car en visitant le Londres des années 60, Heloise découvre un aspect souvent passé sous silence lorsque l'on pense à cette période - le machisme. Last Night in Soho renvoie au mouvement #Metoo : la piètre condition des femmes et leur asservissement par des hommes prêts à tout. Ce qu’Heloise vit, que ce soit dans les années 2020 et surtout en 1960. Edgar Wright fait en sorte que les deux époques se répondent l’une et l’autre, avec Heloise en voyageuse et médiatrice, finissant par rencontrer une bien inquiétante et mystérieuse âme-sœur.

    Last night in Soho, thriller britannique d’Edgar Wright, avec Thomasin McKenzie, Anya Taylor-Joy
    et Matt Smith, 2021, 116 mn, Canal+

    https://www.canalplus.com/cinema/last-night-in-soho/h/17281483_40099
    https://www.universalpictures.fr/micro/last-night-in-soho

    Voir aussi : "Jojo et son ami imaginaire Adolf"
    "D’échecs en échecs"

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  • Bien rater sa vie à Paris

    Vite, il est plus que temps de faire une séance de rattrapage avec l’adaptation des Illusions perdues de Balzac, disponible en ce moment sur Canal+ ! Un classique qui a sans doute traumatisé beaucoup de scolaires, impressionnés par ce roman ambitieux, mais qui devient grâce au génie de Xavier Giannoli une fresque passionnante. Oui, vous avez bien lu : "génie"… Car il en fallait pour réussir à condenser dans un long-métrage d’environ deux heures 20 les affres d’un jeune homme ambitieux et surtout très naïf et qui croyait pouvoir devenir un loup au milieu des loups.

    Disons-le aussi : sept Césars reçus en 2022, dont celui du meilleur film, est une preuve de l’excellence d’un long-métrage qui refuse l’académisme, tout en respectant les canons de la reconstitution historique et l’adaptation littéraire. Xavier Giannoli fait preuve d’une modernité étonnante, même pour un récit se déroulant durant la Restauration française.

    Dans les années 1820, le jeune Lucien de Rumbempré, orphelin désargenté travaillant dans une imprimerie en Charentes, rêve de carrière littéraire. Il a sorti un modeste recueil de poésie, remarqué par Louise de Bargeton, une aristocrate de la noblesse provinciale. Elle voue à ce garçon sensible une belle admiration, avant de tomber dans ses bras. Pour éviter le scandale d’un adultère, Julien et Louise partent à Paris, ce qui serait aussi l’occasion pour l’écrivain en herbe de rencontrer des éditeurs. C’est le monde de la presse écrite qui lui ouvre les bras grâce à un rédacteur aussi cynique qu’ambitieux, Étienne Lousteau. Les deux deviennent amis et Lucien de Rubempré commence à se faire un nom. Mais le jeune poète oublie que dans le monde huppé de la bonne société parisienne, tout n’est qu’illusions, hypocrisie, calculs et coups bas.  

    Un superproduction prenant par moment des accents scorcesiens

    Nous avions parlé d’Eugénie Grandet et de l'honorable adaptation qu’en avait fait Marc Dugain en 2021, la même année bizarrement que Les Illusions perdues de Xavier Giannoli. Alors que le premier misait sur le quasi-huis-clos, sur l’austérité et sur des tons grisâtres, le second fait de son film une fresque luxuriante, grinçante, colorée et menée tambour-battant. Il faut dire que l’histoire de Julien de Rubempré, jeune provincial à peine dégrossi mais désireux de se faire un nom à Paris, se prêtait à cette superproduction prenant par moment des accents scorcesiens.  

    Le scénario modernise le roman, avec des clins d’œil à l’actualité contemporaines que le spectateur pourra facilement deviner, alors que le texte de Balzac, certes retravaillé, est mis à l’honneur grâce à la voix off de Xavier Dolan. Benjamin Voisin, avec son visage lumineux, "est" Julien de Rubempré, dans toute sa candeur et son enthousiasme. Ambitieux, oui. Mais un ambitieux devenant vite une proie en raison de choix pour le moins hasardeux.

    Illusions perdues se paie le luxe de seconds rôles prestigieux qui prennent un réel plaisir à être dans cette œuvre balzacienne : Cécile de France en Louise de Bargeton, femme amoureuse blessée et ne sachant plus comment gérer son insaisissable amant ; Jeanne Balibar en marquise et mante religieuse redoutable ; Xavier Dolan en écrivain émergeant et dont l’évolution n’est pas la moins inintéressante ; Gérard Depardieu en éditeur… et "épicier". Le spectateur français découvrira sûrement Salomé Dewaels, parfaite dans le rôle de Coralie, cette comédienne de boulevard, paradoxalement l’une des seules personnes romantiques de ce drame cruel. N’oublions pas enfin le formidable Vincent Lacoste qui a été récompensé par un César pour son interprétation d’un éditeur tour à tour cynique, ambitieux, drôle et impitoyable.

    Grâce au film de Giannoli, les allergiques à Balzac vont trouver dans cet écrivain majeur de la littérature mondiale de nouvelles raisons de se replonger dans sa Comédie humaine

    Illusions perdues, drame de Xavier Giannoli, avec Benjamin Voisin, Cécile de France,
    Vincent Lacoste, Xavier Dolan, Salomé Dewaels, Jeanne Balibar,
    Louis-Do de Lencquesaing et Gérard Depardieu, 2021, 150 mn, Canal+

    Honoré de Balzac, Illusions perdues, éd. Folio Gallimard, 960 p.
    https://www.gaumont.fr/fr/film/Illusions-perdues.html
    https://www.canalplus.com/cinema/illusions-perdues/h/17230453_40099

    Voir aussi : "Eugénie Grandet, classique et moderne"
    "Corpus delicti"

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  • Sentinelles

    Je dois absolument vous confier qu’avant de découvrir La troisième guerre, un premier film de Giovanni Aloï, j’étais persuadé que j’allais être plongé dans un film d’anticipation sur fond de discours apocalyptique. Il est vrai que le titre, outre qu’il renvoie à une triste actualité ukrainienne, pourrait se regarder comme un long-métrage lanceur d’alertes, tant l’inquiétude, les questions existentielles et les problèmes environnementaux nous assaillent. Là n’est pourtant pas le propos de La troisième guerre, même si l’on ne peut dire qu’il soit franchement plus gai.

    Giovanni Aloï plante son décor dans une caserne parisienne où vivent des soldats de l’Opération Sentinelle. Cette troupe de militaires est chargée, depuis les attentats de 2015, d’assurer la sécurité, alors que les risques d’attentats persistent. Léo, tout jeune troufion fraîchement débarqué de sa Vendée natale, découvre la vie en caserne, la camaraderie mais aussi le climat lourd de sa mission. L’ennemi semble être partout et nulle part. 

    Un nouveau Désert des tartares

    Il faut souligner l’interprétation des trois interprètes principaux. Il y a d’abord le pioupiou Léo, interprété par l’excellent Anthony Bajon, découvert dans La prière. Il incarne la jeunesse fourvoyée dans un conflit qui n'ose pas dire son nom, cette fameuse "troisième guerre". Son implication mentale et morale, jusqu’à l’aveuglement, transparaît lors de sa permission à la maison familiale de La Roche-sur-Yon, face à une mère admirative transie d’amour (Marie Bunel), un beau-père qu'il juge mou, puis lors d’une scène dans une boîte de nuit.

    Deux autres interprètes explosent de leur talent : Karim Leklou (Bac Nord, la série Hippocrate), dans le rôle du soldat brut de décoffrage et Leïla Bekhti (Tout ce qui brille, Le grand bain), en officier et cheffe de patrouille tiraillée entre son métier, sa vie personnelle et sa condition de femme.

    Cette guerre d’un autre genre va trouver sa conclusion dans un événement que sans doute personne n'attendait, et qui va faire sauter les verrous de ce qui s’annonçait comme un nouveau Désert des tartares, dans lequel l’attente de l’ennemi devient un véritable enfer. Un enfer intérieur. A découvrir en ce moment sur Canal+.

    La Troisième Guerre, drame de Giovanni Aloï, avec Anthony Bajon, Karim Leklou,
    Leïla Bekhti et Marie Bunel, 2020, 92 mn, Canal+
    https://www.canalplus.com/cinema/la-troisieme-guerre/h/16913115_40099
    https://capricci.fr/wordpress/product/la-troisieme-guerre

    Voir aussi : "Corpus delicti"
    "Marseille, côté nord, côté sombre"

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  • Éleveur de championnes

    Will Smith, comme souvent, peut agacer : acteur bankable aux choix cinématographiques parfois discutables, il a autant d’admirateurs que de détracteurs. La méthode Williams, réalisé par Reinaldo Marcus Green – mais où la présence de l’ex Prince de Bel Air est si forte que que l’on peut parler de film "de" Will Smith – est une très jolie surprise et nous rend Will Smith bien plus désirable que l’on imaginait.

    L’ancien homme en noir de Men in Black joue le rôle de Richard Williams. Il est le père d’une famille de cinq enfants, dont deux filles nés de son dernier mariage. Elles se nomment Venus et Serena et montrent un gros potentiel au tennis, sport qu’elles pratiquent avec passion, sous le regard amoureux de leur père, aussi exigeant qu’aimant. Certain de leur talent, il a mis au point un plan pour les hisser au plus haut niveau mondial. Il entend bien suivre à la lettre sa méthode, savamment élaborée sur 78 pages. L’homme se montre intraitable face à des entraîneurs dubitatifs, des sportifs sceptiques et des businessmen aux motivations parfois éloignées du sport.

    Will Smith parvient à montrer tout le charisme d’un père donnant tout pour le succès de ses filles, sans tomber pour autant dans le cabotinage

    La méthode Williams a sans doute plus fait sensation aux États-Unis qu’en France. Pour son rôle du "Roi Richard" (King Richard), Will Smith a été récompensé d’un Oscar et d’un Golden Globes de meilleur acteur. Les nominations (meilleur film, meilleure actrice pour Aunjanue Ellis ou meilleur scénario) ont été nombreuses. C’est dire la qualité de ce biopic.

    Will Smith parvient à montrer tout le charisme d’un père donnant tout pour le succès de ses filles, sans tomber pour autant dans le cabotinage, ce qui était un piège. Sa partenaire Aunjanue Ellis lui donne la réplique dans son rôle de mère discrète mais à l’importance capitale.

    Maintenant, parlons de ces deux actrices secondaires que sont Saniyya Sidney et Demi Singleton dans les rôles respectifs de Venus et Serena Williams. C’est simple : sans en faire trop, elles rendent attachantes les deux futures grandes championnes du tennis mondiale. Nous sommes au début de leur jeune carrière et elles s’affichent en sportives naissantes hyper douées, pugnaces, sérieuses mais aussi humaines et craquantes. Leurs éclats de rire font merveille. Le film s’arrête au moment où Venus entre dans les tournois professionnels. Elle croise, ainsi que sa sœur, ces stars du tennis mondial que sont Pete Sampras, John McEnroe et surtout Arantxa Sánchez.

    Voilà un biopic qui nous cueille par surprise et nous fait découvrir les coulisses du tennis, avec deux des plus grandes sportives du XXIe siècle en guest stars.

    La méthode Williams, biopic de Reinaldo Marcus Green, avec Will Smith,
    Jon Bernthal, Aunjanue Ellis, Saniyya Sidney et Demi Singleton, 2021, 138 mn, Canal+

    https://www.canalplus.com/cinema/la-methode-williams/h/17534960_40099
    https://www.kingrichardfilm.net
    https://www.serenawilliams.com
    https://www.venuswilliams.com

    Voir aussi : "Corpus delicti"
    "Alex Lutz remet le service"

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  • Corpus delicti

    L’Événement d’Audrey Diwan est un très grand, très beau et très puissant film. Basé sur un roman d’Annie Ernaux (L'Événement, éd. Gallimard, 2000), le film relate la tempête et le drame d’une grossesse non-désiré dans les années 60, lorsque la contraception n’existait pas et que l’avortement était un crime. Avoir un enfant non désiré aboutissait pour les femmes – et notamment les jeunes femmes – à l’opprobre générale, au mariage forcé dans le meilleur des cas et la prison au pire.  

    Un poème d’Aragon introduit l’une des scènes du film : "Elsa au miroir", superbe texte de la littérature mais aussi portrait d’une jeune fille évanescente, paisible, soumise mais aussi tourmentée au milieu d’une tragédie.

    Anne, étudiante en lettres brillante à Angoulême, découvre qu’elle est enceinte suite à une brève relation avec un autre étudiant, comme elle. On ne sait que tardivement dans le film l’identité du garçon, mais à vrai dire cette information n’est importante que pour souligner la lâcheté du jeune homme, laissant sa relation d’un soir gérer seule une histoire dont il est coresponsable, pendant qu’il poursuit son cursus et ses relations amicales comme si de rien n’était.  

    Anne se retrouve seule, désemparée, obligée de trouver une solution à sa grossesse non-désirée. Ce drame personnel est aussi un tableau sociologique cruelle de cette France corsetée et hyper moralisante des années 60. L’amour devient vite un problème, ce qu'il ne devrait bien sûr jamais être. Drague, flirts à peine appuyés, séductions, intellectualisation et aussi interrogations sur la vie amoureuse mais aussi le pis-aller de ces jeunes femmes des années 60 : le mariage, les enfants et la soumission aux corvées ménagères, comme l’esquisse le portrait de la mère jouée par Sandrine Bonnaire.

    Les visages en gros plans ce sont aussi ces regards

    La caméra film avec honnêteté au plus près, respect et sans souci de choquer, les corps des jeunes femmes. Les corps mais aussi les visages. Il faut d’ailleurs saluer la performance de l’actrice principale, Anamaria Vartolomei (My Little Princess, La Bonne Épouse), tenant à bout de bras ce film exigeant, égrenant les semaines de grossesse, tel un compte à rebours inéluctable. Les visages en gros plans ce sont aussi ces regards : tour à tour affolés et désorientés (pour Anne), mais aussi méfiants, défiants, arrogants, désapprobateurs et suspicieux (pour son entourage, proche ou non).

    Il faut aussi parler des personnages secondaires, joués par quelques pointures : Sandrine Bonnaire en maman aimante mais enfermée dans son rôle de mère au foyer, Anna Mouglalis en "faiseuse d’ange" ou Pio Marmaï en professeur subtilement campé et moins rigide qu’il n’y paraît. Un coup de canif est au passage adressé au corps médical, avec ces médecins complaisants, résignés, voire contempteur de ces jeunes filles enceintes.

    Sans pathos ni discours lénifiant, Audrey Diwan avance avec délicatesse, parsemant son film de messages néanmoins engagés, sur la place des femmes, l’éducation, la liberté et le droit d’user de son corps. La réalisatrice ne cache pas plus la réalité d’un avortement, avec en particulier deux scènes tournées sans fard.

    Comme un dernier message, le film, qui avait commencé avec une citation  d’Aragon, se termine avec l’extrait d’un poème de Victor Hugo : "Nous garderons l'honneur ; le reste, nous l'offrons. / Et l'on marche..."

    Tout cela fait de L’Événement un très grand film, exceptionnel de qualité et nécessaire au combat féministe. Il a d’ailleurs obtenu le Lion d'or à la 78e édition de la Mostra de Venise.

    L’Événement, drame d’Audrey Diwan, avec Anamaria Vartolomei, Kacey Mottet-Klein, Luàna Bajrami,
    Louise Chevillotte, Pio Marmaï, andrine Bonnaire et Anna Mouglalis, 2021, 100 mn, Canal+

    https://www.unifrance.org/film/51968/l-evenement
    https://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Folio/Folio/L-evenement
    https://www.canalplus.com/cinema/l-evenement/h/17486029_40099

    Voir aussi : "Eugénie Grandet, classique et moderne" 

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  • Droit au but

    Les Marseillais et amoureux de Marseille iront voir ou revoir Stillwater avec plaisir, proposé en ce moment sur Canal+. Et les autres ?

    Lors de la sortie du film en salles en 2021, la communication autour a fait de la cité phocéenne, en réalité  le troisième personnage principal, les deux premiers étant Matt Damon et Camille Cottin.

    L’acteur américain joue le rôle de Bill Baker, un ouvrier de l’Oklahoma, à la fois rude et austère. On apprend rapidement qu’il vivote de petits boulots en petits boulots, est proche de sa mère et vit seul.

    Lorsqu’il prend l’avion pour partir à Marseille c’est pour visiter sa fille Abigail, emprisonné aux Baumettes pour un crime qu’elle jure n’avoir pas commis. Bill essaie de faire ce qu’il peut pour soutenir sa fille mais les relations entre eux deux sont pour le moins fraîches. Cependant, l’ancien foreur est bien décidé à se lancer dans une enquête seul contre tous pour prouver l’innocence de sa fille. Enfin, seul, pas complètement : une Française, Virginie, accompagnée de sa fille Maya, l’aident et le soutiennent dans sa démarche.

    Bill se lance sur les traces d’un suspect en déambulant dans les rues, ruelles et quartiers interlopes d’une ville qu’il découvre.

    La cité phocéenne est filmée avec patience, sous tous les angles, au point d’éclipser par moment l’enquête policière

    Il y a plusieurs manières de regarder ce très bon Stillwater. La première en le voyant comme un honnête thriller sur fond d’injustice et aussi de secrets qui seront dévoilés à la fin. Bill Baker, Américain renfrogné, se révèle en enquêteur pugnace n’ayant peur de rien et prêt à tout pour sauver l’honneur – et la liberté – de sa fille, une jeune rebelle qui avait choisi quelques années plus tôt de couper les points avec son  père.

    La deuxième perspective est justement celle des relations parentales. Il y a bien sûr le couple Virginie-Maya : Camille Cottin est convaincante dans son rôle de mère célibataire, couvant d’amour son adorable fille. Bill, mal aimé de sa fille, débarque de son Oklahoma natale et découvre du même coup qu’il peut être un père aimant, lui aussi, avec une fille de substitution – Maya. Les relations que les deux entretiennent sont d’autant plus touchantes qu’elles étaient improbables.

    Et puis, il y a Marseille. La cité phocéenne est filmée avec patience, sous tous les angles, au point d’éclipser par moment l’enquête policière. Les rues tortueuses, les Baumettes, les quartiers nord, les calanques et bien entendu le Stade Vélodrome et l’OM : le Marseille de Tom McCarthy n’est cependant pas une ville de carte postale même s’il en a bien l’ADN. Le cinéaste a filmé avec justesse, rigueur mais aussi nervosité un match de football – gagné par l’OM –, et qui va contribuer à la résolution de l’enquête.

    Film de genre, enquête policière mais aussi portrait d’un homme qui se révèle et se transforme comme il le dit lui-même à la fin du film, Stillwater renouvelle, mine de rien, le thriller américain en s’ouvrant vers la France et l’Europe. 

    Stillwater, thriller américain de Tom McCarthy, avec Matt Damon, Abigail Breslin et 
    Camille Cottin, 2021, 140 mn, Canal+
    https://www.canalplus.com/cinema/stillwater/h/17028281_50001
    https://www.universalpictures.fr/micro/stillwater

    Voir aussi : "Marseille, côté nord, côté sombre"
    "Pauvre conasse"

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  • Eugénie Grandet, classique et moderne

    Évidemment, Eugénie Grandet peut rappeler des souvenirs plus ou moins douloureux de lectures scolaires. Le classique de Balzac est un tel chef d’œuvre qu’il a rejoint la cohorte de livres injustement mal-aimés. Alors, Eugénie Grandet serait-il chiant ? Non ! Et Marc Dugain le montre dans son superbe film, qui rend l’héroïne de Balzac d’une singulière modernité.

    Eugénie Grandet vit à Saumur. Fille unique d’un négociant en vin, la jeune femme et sa mère doivent souffrir l’autorité de Félix Grandet dont le sens des affaires, le goût pour l’appât du gain et l’obsession pour le profit ont leur corollaire : la pingrerie et l’avarice. Le trio vit dans un quasi désœuvrement en dépit du fait que l’homme, ex-maire de Saumur, a su se bâtir une fortune grâce à la Révolution française.

    Le commerçant a, par ailleurs, su habilement retourner sa veste et profiter de ses avantages sous la restauration. Eugénie Grandet voit ses jours s’écouler dans un univers gris et sans distraction. Dans cette Province dominée par des notables, la jeune femme est un beau parti, mais son père rechigne à la voir marier pour la simple et bonne raison qu’il ne veut pas verser une dot. Débarque dans la maison familiale un jeune homme, le cousin d’Eugénie. Son père, ruiné, l’a envoyé chez son frère avant de se suicider.

    Eugénie Grandet serait-il chiant ? Non !

    Adapter le chef d’œuvre de Balzac sans tomber dans l’académisme est un piège. Dénaturer ce joyau de la littérature française l’est tout autant. Marc Dugain parvient à donner vie à Eugénie Grandet grâce au formidable trio d’acteurs qui incarne cette famille saumuroise du début du XIXe siècle. Olivir Gourmet est impressionnant dans le rôle de cet "Harpagon" sinistre et borné.

    Valérie Bonneton joue le rôle de sa femme, victime muette de son avare de mari. Quant à Joséphien Japy, elle est une vraie révélation. Elle est Eugénie Grandet, jeune femme taiseuse, discrète, timide, naïve mais aussi plus forte qu’il n’y paraît.

    Son visage de madone illumine le film, y compris lorsque son père lui impose une confession pour  avoir eu l’audace d’aimer son cousin… mais aussi lui avoir donné quelques pièces d’or. Marc Dugain fait de cette belle région de Saumur un décor gris et automnal, alors que les scènes d’intérieur sont subtilement composées telles des tableaux, parfois simplement éclairés à la bougie, sans esbrouffe mais sans révolutionner non plus le cinéma.

    Nous parlions de l’académisme du roman de Balzac. Marc Dugain le dépoussière en faisant de la jeune femme une figure moderne. Eugénie Grandet fourbit ses armes contre le patriarcat, dans un film où la notabilité, le pouvoir et l’autoritarisme familial sont uniquement masculins. Les dernières séquences, et notamment les propos d’Eugénie Granget, envoient des messages clairvoyants  et féministes qui rendent le film d’une grande actualité.  

    Nul doute que beaucoup de professeurs de lettres ou de français verront dans l'Eugénie Grandet de Marc Dugain un solide outil pédagogique capable de faire aimer Balzac à leurs élèves.    

    Eugénie Grandet, drame franco-belge de Marc Dugain, avec Joséphine Japy, Olivier Gourmet et Valérie Bonneton, 2021, 105 mn, Canal+
    Honoré de Balzac, Eugénie Grandet, éd. Flammarion GF, 2008, 302 p.
    https://www.advitamdistribution.com/films/eugenie-grandet
    https://www.canalplus.com/cinema/eugenie-grandet/h/17077588_40099
    https://www.babelio.com/livres/Balzac-Eugenie-Grandet

    Voir aussi : "Être ou ne pas être"
    "Le complotisme est-il un humanisme ?"

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  • Mon fils a disparu

    On n’est jamais aussi bien servi que par soi-même, n’est-ce pas ? Christian Carion s’est lui-même attelé au remake anglais de son propre film français, Mon garçon, qui était sorti en 2017. 

    James McAvoy (Split) et Claire Foy (The Crown) endossent dans My Son les rôles que tenaient Guillaume Canet et Mélanie Laurent.

    Edmond et Joan sont divorcés et parents d’un petit garçon Ethan dont la mère s’occupe souvent seule, alors que son ex-mari est souvent en déplacement. Il la rejoint en Écosse à sa demande : leur fils a disparu au cours d’une sortie. La police a été avertie et les recherches commencent. Le pire est possible et même probable. Les soupçons d’Edmond se portent sur Franck, le nouveau compagnon de Joan. 

    Le drame familial, se transforme en thriller

    My Son commence comme un drame familial sur fond de séparation, de non-dits et de rancœur. Pourtant, Edmond et Joan ont visiblement une relation apaisée afin de préserver leur fils. Un fils qui disparaît du jour au lendemain, sans explication. Le père se mû en détective et même en justicier pour retrouver son garçon.

    "Mon père, ce héros" aurait pu s’intituler le film de Christian Carion, car le drame familial se transforme en thriller et en course pour trouver une issue heureuse à ce drame.

    James McAvoy est parfait dans le rôle d’un père désespéré par la disparition de son enfant. Un père qui se transforme en homme prêt à tout. Même au pire. 

    My Son, drame et thriller franco-germano-britannique de Christian Carion,
    avec James McAvoy, Claire Foy, Gary Lewis, 2021, 95 mn, Canal+
    https://www.wildbunch.biz/movie/my-son
    https://www.canalplus.com/cinema/my-son/h/17333629_50001

    Voir aussi : "Amour, musiques, matelas et autres contrariétés"
    "Le trône de mère"

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